HRP

Âge : L'éternité n'a pas d'âge...
Quelle est votre expérience des forums RP ? Ça devrait pas poser trop de problèmes.
Comment avez-vous connu SSU ? Par une amie IRL que je remercie chaleureusement !

RP

Nom : Kryo

Âge : 15 ans

Armure demandée : Orque

Spoiler:

On ne peut pas dire de Kryo qu'il en impose au premier contact. Semblable à tous les garçons de son âge, voire même plus petit que la normale, il ne se distingue que par la blanche chevelure encadrant son visage. Tout dans son apparence rappelle le calme et le froid d'un solstice d'hiver. Son nom, qui en grec y fait directement allusion, pourrait vouloir dire que c'était déjà le cas à sa naissance à moins que ce ne soit que pure coïncidence. Si sa soeur n'est plus si loin de l'âge adulte il garde pour sa part les traits ronds de l'enfance, en harmonie avec un caractère très candide sous certains aspects. Plutôt mignon, son apparence le rendait populaire auprès des filles de son âge avant qu'il ne soit arraché à ses racines et traité comme un monstre pour ne pas être comme tout le monde. Si l'on ne peut pas dire qu'il l'ait particulièrement bien vécu pour le moment il n'en a aujourd'hui plus cure et demeure sociable même s'il n'est pas dans ses habitudes d'aller spontanément vers les gens.
Un fait notable est qu'il ne se sépare jamais de l'écharpe qu'il porte autour du cou et semble y tenir comme à la prunelle de ses yeux, ce qui ne se remarque pas tant en général puisqu'il s'habille chaudement en toutes circonstances. Sans doute une précaution vis à vis de ses pouvoirs. Parfois idéaliste à outrance il n'en garde pas moins la tête sur les épaules et se présente donc comme un garçon plutôt débrouillard pour son âge. On peut imaginer que ses troubles de la personnalité ne sont pas inconnus à cette instable maturité. Il est à vrai dire difficile de s'en faire une idée concrète car il s'avère assez timide, ce qui se traduit par un manque flagrant de confiance en lui et une recherche constante du perfectionnement. Du moins, ça, c'est en ce qui concerne sa vraie personnalité. Dès qu'il y a du cosmos dans l'air, il change du tout au tout et devient mystérieusement plus agressif et menaçant. Transcendé par sa propre force il s'emplit de morgue et de suffisance mais sa brusque montée en puissance justifie au moins en partie ce changement radical.
Quand survient ce phénomène, ses cheveux se hérissent alors sur son crâne et ses yeux habituellement d'une couleur froide se mettent à flamboyer – ce qui toutefois n'affecte aucunement la nature de ses arcanes. Impulsif et malicieux, il est alors tout en contraste avec son état normal et le signe le plus évident de cette transition brutale est certainement le rictus goguenard qui prend place sur ses lèvres lorsqu'il passe de l'un à l'autre. Il est seul à savoir quelles sont les raisons de cette bipolarité : même sa soeur ne saurait qu'affirmer que son cosmos en est l'élément déclencheur, sans plus de précisions. Fort de son mètre cinquante-sept, il ne pèse pas plus d'une bonne quarantaine de kilogrammes et est donc facilement sous-estimé, ce qui l'arrange : l'habit ne fait pas le moine et beaucoup devraient apprendre à s'en méfier davantage.

Kryo vit le jour deux ans après sa soeur aînée. Chétif de naissance en plus d'être né prématurément, on crut plus d'une fois le voir passer de vie à trépas avant que son état ne stabilise. Néanmoins, il en garde la séquelle qu'est sa santé fragile et son sa silhouette efflanquée. Un gabarit qui lui vaudrait une attention parentale toute particulière qui allait très vite finir par l'étouffer. À la différence de Kyara, il se révéla être un enfant très calme et ses pleurs n'étaient que trop rares. Cela devait se confirmer par après étant donné qu'il ne devint jamais plus dynamique, préférant se complaire dans une attitude timorée et se tenir à l'écart des autres. Toutefois son Italie natale lui offrit le climat dont il avait besoin pour grandir en douceur, si bien qu'il eut tout à loisir de se renforcer. S'il restait fragile, il l'était bien moins qu'au départ. Son père se refusant à suivre cette idéologie il fut élevé dans le déni de toute religion monothéiste.

Ce n'était certes pas toujours vu d'un très bon oeil car les tendances générales allaient pour leur part en ce sens mais il n'en avait que faire. Plutôt que de se rallier à l'opinion publique pour suivre le troupeau il préférait de loin écouter d'une oreille attentive les conseils avisés prodigués par leur cher père. Déjà à l'époque il développait une relation de confiance avec sa soeur, qui même aujourd'hui reste attentionnée à son égard même si la plupart des gens n'ont d'elle qu'une image condescendante. Ainsi coulèrent-ils des jours heureux au sein d'un cocon familial. Cocon qui, par malheur, était loin d'avoir l'indestructibilité que le garçon lui prêtait à l'époque, quand tard le soir il en venait à souhaiter que ce bonheur jamais ne prenne fin. De manière anecdotique, on lui reconnut à l'époque une aversion profonde pour le froid auquel il était particulièrement sensible.

Pour d'obscures raisons, le moindre courant d'air glacé le mettait mal à l'aise. Sa génitrice sut l'apaiser en lui faisant cadeau d'une écharpe cousue par ses soins. Aussitôt, le bambin s'y attacha et ne la quitta plus même au moment de dormir, si bien qu'il fallut la rallonger au fur et à mesure de sa croissance jusqu'à lui donner la taille qu'on lui connait à ce jour. S'il peut arriver à titre exceptionnel qu'il allège sa tenue, même tout l'or du monde ne le contraindrait pas à en faire de même pour ce qu'il voit comme un héritage et semble même prêt à y laisser la vie si cela peut empêcher qu'elle soit abîmée d'une quelconque manière. Leur famille n'étaient pas si aisée et ils ne vivaient que d'un confort tout relatif, mais bien suffisant pour couler des jours heureux. Hélas toute personne ayant fait l'expérience de la vie sait que ce bonheur volé n'est pas fait pour durer...

.: Entrée en Matière :.

Pour des raisons tant morales que financières, leurs parents ne purent se résoudre à les confier à des enseignants. Même si c'était à but pédagogique, ils ne pouvaient que réprouver les méthodes courantes au sein du corps professoral qui si elles avaient fait leurs preuves n'en étaient pas moins abjectes à leurs yeux. Cette pénitence leur fut donc évitée au profit d'une formation à domicile. Et s'ils n'étaient pas instructeurs de profession il fallait admettre que c'était bien plus agréable que d'être confiés aux mains de tortionnaires de toutes sortes. L'éducation fut donc répartie en égales proportions entre eux et ils prirent en main la formation de leur progéniture. En ce qui le concerne, Kryo était toujours effacé mais suivait chaque leçon avec assiduité, n'ayant aucune envie de décevoir les espoirs que l'on pouvait placer en lui. Sa conduite studieuse le poussa à travailler d'arrache-pied et à obtenir d'étonnants résultats, toujours à l'affût de ce qui pouvait étendre sa culture. Il croquait à pleines dents le fruit de la connaissance et la soif qu'il en avait paraissait inextinguible.

S'il était à craindre qu'il peine à tenir le rythme en terme d'éducation physique il s'avéra plus solide qu'on ne l'aurait cru, se donnant du mal pour s'endurcir et gagner en endurance – aider à cultiver le modeste champ qu'ils avaient à disposition pour subvenir à leurs besoins alimentaires. Être à la traîne était impensable. Dès qu'il avait atteint l'âge de raison, celui de la conscience de ses actes et de leur conséquence, il s'était fixé pour objectif de ne pas laisser sa faiblesse prendre le pas sur sa progression et ce coûte que coûte. Il s'y était astreint avec rigueur et pas une fois il n'avait failli à sa parole. Et il n'eut aucun regret d'avoir été si dur envers lui-même quand vint le jour où son ascendance fut mise en lumière. S'il ne s'était pas escrimé à tenir le choc quoi qu'il arrive peut-être n'aurait-il pas eu droit à ce cours on ne peut plus particulier. Une matière qu'on ne peut apprendre ni dans les livres, ni de la bouche d'un instituteur revêche...

Cette force avait pour nom « cosmo-énergie », plus communément appelée « cosmos ». Ce nom trouvait ses racines en le fait que toute chose dépende de la création de l'univers, qui avait insufflée en chacune d'elles un infime fragment du Big Bang qui donna naissance non seulement à ce monde mais aussi à beaucoup plus que cela. Depuis son plus jeune âge, Kyro avait toujours été fasciné par les étoiles et l'attraction qu'elles exerçaient sur lui avait plus d'une fois fait sourire son père d'un air songeur – il n'en comprenait le motif que maintenant. Ainsi donc même eux étaient pourvus de ce don du ciel, de cette puissance insondable datant de la nuit de temps, en harmonie avec l'immensité de l'espace que le ciel nocturne leur faisait à peine soupçonner. Il ne fallut qu'une poignée de minutes de plus pour réaliser que les connaissances de leur père n'étaient pas que théorique. Il s'en doutait déjà, son ton professoral ne pouvant être qu'issu d'une maîtrise avancée de son sujet. La certitude fut faite quand entre ses doigts, une pierre prit feu sans aucun signe avant-coureur, incitant son enfant à un mouvement de recul instinctif.

Une peur primitive qu'il n'aurait su contrôler tant cela était soudain, mais il ne fallut pas longtemps pour qu'elle soit supplantée par une curiosité tout aussi maladive. Certes, nombre de gens auraient exigé de le condamner au bûcher pour sorcellerie... Mais eux avaient été éduqués de telle sorte à être ouvert d'esprit et préféraient de loin comprendre le processus à l'origine de ces arcanes plutôt que de fuir comme la peste celui qui leur donnait forme. Plus encore que sa soeur, Kryo en fut admiratif, étant toujours à cette période de l'enfance où il nous est indispensable d'avoir ds exemples à suivre, des modèles, des héros. Lui aussi mourait d'envie de maîtriser cet art subtil et était prêt à tout pour y parvenir, ne demandant qu'à exceller autant que son père pouvait le faire. Et dire que cette démonstration n'était faite que pour être un avant-goût ! Il en piaffait d'impatience. Voir la roche se rompre comme un bout de pain entre ces doigts qui lui ébouriffaient les cheveux chaque matin le conforta dans cette idée, ne le laissant pas même envisager les malheurs que cela pourrait engendrer.

.: Chasse aux Sorcières :.

Là où Kyara avait le nez dans les livres, lui préférait les activités physiques. Sans doute par frustration de n'être pas aussi performant à ce point de vue qu'il le voudrait, ni même à la hauteur de la plupart des gamins de sa tranche d'âge. Les balbutiements de son cosmos étaient une aide substantielle mais on leur avait fait comprendre que s'en servir publiquement ne leur attirerait que des ennuis et qu'il fallait taire ce secret à tout prix s'ils ne voulaient pas créer des ennuis qu'ils ne sauraient juguler. C'était d'autant plus vrai dans son cas, où les émanations de son aura occasionnaient des troubles sur lesquels il n'avait pas la moindre emprise. Y avoir recours voulait dire se métamorphoser pour obtenir une personnalité qui n'était pas la sienne et n'avait que peu en commun avec son état d'origine. Le pire dans tout cela était sans doute d'être spectateur de ses faits et gestes mais de ne plus pouvoir interférer, prisonnier de son propre corps dont il n'était plus maître. Ainsi avait-il prit le parti de se diversifier et d'étendre son contrôle sur nombre de domaine. S'il ne pouvait être plus robuste alors il n'avait plus qu'à accroître la portée de ses talents pour avoir plus d'une corde à son arc.

Judicieux choix de mot puisque sa matinée s'était accompagnée de tirs de flèches d'une précision parfois douteuse. Il n'y avait finalement renoncé qu'une fois que ses bras ne furent plus en mesure de tenir l'arc avec la stabilité sine qua non à tout maniement d'un tel ustensile. Ce fut le moment choisi par sa tendre mère pour lui venir en aide en allant faire les courses avec elle. Ses protestations ne furent pas entendues et il le regretta, au moins autant que de n'avoir pas eu la force de continuer à cribler cette cible de projectiles, ce qui lui aurait constitué une parfaite excuse pour ne pas s'y rendre. Car s'il n'avait de prime abord fait qu'objecter, il avait fini par céder et lui avait emboîté le pas sans trop s'en plaindre. Sans doute aurait-il du le faire. Son dernier souvenir fut celui d'une odeur d'alcool bon marché emplissant l'atmosphère... Et puis plus rien. Son esprit avait été plongé dans le noir comme pour passer sous silence ce qui était arrivé. Sa mémoire des événements ne reprit que quand sa mère le tira par la manche comme pour l'arracher à un rêve à la fois profond et terriblement réel. Et pour cause, il venait de changer un homme en statue de glace de ses propres mains sans même s'en rendre compte.

Celui qu'il était avait disparu pour en faire un autre homme l'espace de quelques secondes, juste assez pour offrir aux badauds la vue d'une diablerie comme ils n'auraient pu l'imaginer sans son aimable concours. Une participation qui allait avoir de lourdes répercussions, qu'il était inapte à concevoir tant il était déboussolé. Avoir à la fois le sentiment de sortir d'un long sommeil et celui d'être plus réveillé qu'il ne l'avait jamais été l'emprisonnait dans un paradoxe qu'il ne s'expliquait pas, et l'affolement de sa mère n'était pas ce qu'on pourrait appeler une réponse explicite aux questions qu'il pouvait se poser. Qu'on lui demande de faire ses bagages était une chose, qu'on lui en explique les raisons en était une autre et rester dans l'ignorance l'avait toujours agacé au plus haut point. Bon gré mal gré, il s'exécuta tout de même en s'apercevant que discuter ne ferait que hausser d'un cran la tension ambiante. Sa soeur ne tarda pas à lui emboîter le pas et c'est dès lors que tout commença à basculer – comme si la fatalité avait patiemment attendu qu'ils soient tous réunis pour leur jouer ce coup du sort dont ils se souviendraient.

Vider les lieux ne l'enchantait guère mais il n'avait pas élevé la voix, se contentant de chercher ce qui pouvait justifier ce branle-bas de combat inopiné. Cette effervescence ne lui disait rien qui vaille et il avait bien raison, à son grand regret. Voir chanceler les torches à l'horizon lui rappela combien le feu l'effrayait plus que le froid en vérité. Car dès l'instant où il avait vu les flammes lécher les doigts de son père, même si ce n'était qu'un effet d'optique puisque le cosmos était une énergie neutre, il avait su ce qu'il voudrait faire du sien. Commander aux éléments et en infléchir le cours, maîtriser les saisons et ordonner à l'hiver de prendre place. Le meilleur moyen de se défaire d'une peur, qu'elle soit ou non enfantine, reste de l'affronter en face et prendre le contrôle de la sienne lui avait non seulement paru fort à propos pour ce faire mais aussi l'une des plus belles preuves de son savoir qu'il pouvait donner. Toucher à la nature par le biais de son pouvoir et en changer jusqu'à la forme demandait beaucoup d'efforts mais il s'était échiné à les fournir et cela avait payé. C'était un franc succès et il en était heureux car rien ne pouvait lui faire plus plaisir que de répondre aux attentes d'Auguste. Hélas il avait fallu que l'ombre au tableau de ses troubles psychologiques viennent ternir sa réussite, même s'il n'en était pas moins fier d'avoir réussi à atteindre le but qu'il s'était donné depuis ce fameux jour.

Fameux jour qui devait leur coûter cher et il était aujourd'hui temps de régler des comptes, semblerait-il. Mais n'en avoir aucun à rendre ne semblait pas une excuse pour la foule en colère qui grouillait au dehors et ne reprendrait son calme que quand sa soif de sang aurait été assouvie. Plus que jamais, Kryo entrevit alors combien l'homme pouvait être une bête sanguinaire pire encore que tous les monstres en liberté dans la nature. Ainsi comprenait-il mieux pourquoi il s'était toujours intuitivement tenu à l'écart de tout le monde. La peur qui lui dévorait les entrailles n'était là que pour lui rappeler à quel point il avait raison de vendre sa confiance à prix d'or. Leurs revendications étaient intolérables et il sentit une colère sans bornes provenir du plus profond de son être, et c'est alors que les chaînes achevèrent de se briser. Le gris de ses pupilles vira à un jaune inquiétant, presque lugubre tandis qu'un rictus mauvais fendait ses lèvres pour mieux lui donner une moue colérique, sa tignasse de neige se hérissant sur son crâne au fur et à mesure qu'il entendait ce que hurlaient à pleins poumons ces misérables.

Pourtant, toute la hargne que lui conférait cette transe ne fut d'aucune utilité puisque son père prit les devants. Ce fut la première fois que sa jambe de bois lui apparut à ce point comme une évidence et de ce fait comme une gêne flagrante pour ce qu'il voulait entreprendre. Même lui qu'il pensait pouvoir tout faire à une époque faisait pâle figure face à cette meute ivre de haine et c'est pourquoi Kryo aurait pu tout faire pour avoir sa place sur ce champ de bataille. Néanmoins, il était profondément instable à cet instant précis et l'étreinte paternelle acheva de semer le doute dans son esprit, le choc des consciences engendrant un crash psychologique qui devait le plonger dans un état d'inertie totale pour les prochaines heures. Ce fut tout juste s'il se rendit compte que sa mère l'empoignait pour l'emmener avec eux et sa dernière vision fut celle du halo nimbant le corps robuste de son père avant de sombrer dans l'inconscience... Cette fois, sa perte de connaissance n'était pas qu'une illusion. Il se demanda d'ailleurs s'il ne l'aurait pas préféré, puisqu'il rentra en contact avec une forme de vie qui lui était tout sauf amicale.

Ben dis donc, ils sont sympa les gens par chez vous ! Heureusement que j'ai pu régler son compte à l'autre minable, c'est déjà un de moins à supporter !
...Qui est là ? Répondez !
Alors mon petit gars, t'es long à la détente on dirait...
Qu'est-ce que vous voulez dire ?
T'en as encore beaucoup des questions comme celle-là ?
...
T'as pas encore compris ? C'est moi qui ai liquidé le pilier de comptoir sur la place du marché ! Un joli coup, ce sac à vinasse en méritait pas tant si tu veux mon avis !
Pourquoi tu as fait ça ?
Oh, alors tu me tutoies maintenant ? C'est pas plus mal, après tout on est liés toi et moi ! Mais pas pour longtemps ! Parce que tu vas me laisser ta place et plus vite que ça ?
Ma place ? Quelle place ?
Fais pas l'innocent, tu sais très bien de quoi je parle ! Ça fait trop longtemps que j'attendais de sortir, alors maintenant tu vas me faire le plaisir de dégager et de me laisser prendre les commandes ! J'ai pas l'intention de te laisser m'empêcher d'exploser toutes ces ordures pour ce qu'elles ont fait au vieux !
Mon père m'a dit de ne pas intervenir ! Je ne sais pas qui tu es mais je ne te laisserai pas y aller, ça ne te regarde pas ! Je ne sais pas de quoi tu parles mais il n'est pas question que je reste là sans réagir alors que tu veux gâcher ce qu'il a fait pour nous, c'est pas tes affaires !
Oh que si ça me regarde, c'est mon père aussi figure-toi ! T'as pas encore compris que j'étais toi, pauvre larve ? Si toi t'es pas capable de te bouger pour lui sauver la peau, moi je compte pas baisser les bras ! C'est pas parce qu'on m'a dit de pas m'en mêler que je vais obéir bien sagement ! Bouge-toi de là !
...
Quoi, t'es surpris ? Bah oui, je suis toi. C'est comme ça. C'est pour ça que t'as pas de regret à avoir, je fais que prendre la place qui est la mienne et te virer de là. J'ai assez attendu que tu te remues sans résultat, alors maintenant tu vas me faire le plaisir de me laisser passer. Allez, pousse-toi, tu me gênes !
Il n'en est pas question... Jamais...
Hein ? Qu'est-ce que tu dis ? Parle plus fort, l'avorton, j't'entends pas !
JAMAIS !

Le rêve se brisa en mille morceaux et il entama une longue chute dans les limbes, perdu au milieu d'un vide abyssal couleur de ténèbres. Puis, la scène qui leur avait valu d'être pris en chasse défila devant ses yeux, celle de sa chevelure immaculée se dressant sur son crâne avant que ses pupilles ne revêtent une couleur chatoyante qui ne leur correspondait pas et qu'un rictus goguenard ne s'étende sur ses traits. La cause de leur malheur n'était nul autre que lui car il s'était laissé dominer par ce mal qui le rongeait sans même le savoir et qui avait fini par prendre le dessus. Ce n'était pas que son cosmos, tout son corps était gangrené par la maladie qu'incarnait cet affreux personnage dont les traits étaient l'exact reflet des siens. Maintenant il savait, il savait tout. Et il aurait préféré ne rien savoir. Toute vérité n'est pas bonne à entendre... À son réveil, n'ayant que peu erré dans les méandres de son subconscient, la première chose qu'il fit fut d'essuyer les larmes qui ruisselaient sur son visage – depuis quand ? - d'un revers du poignet et d'attendre que sa soeur soit prête à l'entendre pour lui faire part de ce qu'il de se remémorer.

Alors qu'il s'était tenu sur ses gardes de peur de recevoir une gifle, si ce n'est plus, il n'eut droit à rien de tout cela. Il ne s'attendait tout de même pas à ce que l'émotion l'emporte sur la raison et qu'elle s'en prenne à lui à grands coups d'effusions cosmiques, d'autant plus que cela ne ferait que propager le problème, mais de là à être préparé à ce qu'elle ne lève pas le petit doigt... En un sens, qu'elle le frappe l'aurait soulagé ; il aurait voulu le faire lui-même mais n'aurait su comment s'y prendre pour que ce soit efficace, tandis qu'en prenant un coup en provenance d'une personne extérieure il y avait peut-être une chance pour que cette Ombre en fasse les frais elle aussi. Toujours est-il que cela n'arriva pas, et il garda ce désir pour lui même si l'envie de se faire du mal le démangeait. À vrai dire elle ne s'estompa que pour être balayée par la peur panique qui le submergea de même que les eaux déchaînées engloutissaient un bateau fait pour lui servir de repas. Tout cela s'était passé trop vite pour qu'il ait à loisir de croiser les doigts pour sa survie et il devint le jouet des flots, qui l'acheminèrent jusqu'à de lointaines contrées en raison de la masse négligeable que représentait son corps malingre. Une fois de plus la vigueur lui faisait défaut, même s'il était déjà inanimé et n'en saurait donc rien.

Suffoquant, il recracha à pleine bouche toute l'eau qui s'était instillée dans les poumons. À croire que tout était fait pour lui faire vivre les pires moments de sa jeune vie à intervalles réguliers, l'expérimentation de la noyade venant s'ajouter à la liste de ses récents déboires avec brio. Il aurait applaudi des deux mains s'il n'avait pas été à peine conscient en plus de devoir s'en servir pour se redresser, titubant et ayant grande peine à comprendre par quel moyen il avait pu s'en tirer. Car il n'était peut-être pas en très bon état mais son intégrité physique était sauvegardée, et même un bilan approfondi des dégâts ne lui fit pas repérer d'inconvénient notable en dehors de son état de choc. Ce dernier n'était que plus virulent en raison de sa solitude, toute relative puisque les bancs de poissons circulaient toutes nageoires dehors à ses côtés mais néanmoins dépourvue de présence humaine. Celle de sa mère et de sa soeur plus spécialement, leur survie l'inquiétant – même si sa localisation avait elle aussi toutes les raisons de solliciter ses angoisses pour peu qu'il cherche une explication rationnelle à la mise en place de ce décor maritime. Sa première pensée fut pour la qualité du transport, qui laissait à désirer il fallait bien l'avouer...

Dire qu'ils avaient investi tout le contenu de leur tirelire dans ce voyage pour en fin de compte connaître une déconvenue de plus... Puis, voulant s'étirer, il sentit ses doigts heurter une surface solide. Un prudent effleurement lui garantit qu'il ne s'agissait que de bois, certes quelque peu pourri mais loin de pouvoir attenter à sa vie. Ce qui le différenciait en cela d'à peu près tout ce qu'il avait frôlé dans les dernières vingt-quatre heures, à bien y réfléchir. Un examen plus minutieux lui fit comprendre qu'il se situait dans la coque d'un navire, dont l'étendard même s'il était déchiré de toutes parts était porteur d'un emblème dont l'allusion à la piraterie ne faisait aucun doute. Parcouru de frissons, il se surprit à penser qu'il devait s'attendre au pire et que peut-être les propriétaires de ce galion naufragés étaient-ils toujours dans les parages. Un pas de côté le fit buter contre la main décharnée d'un squelette jauni par le temps et lui prouva le contraire – il en convint une fois la stupeur passée et un glapissement de terreur plus tard. Un coup d'oeil par l'une des brèches dans la coque de l'épave offrit à sa vue moult espèces de poissons reconnues pour leur exotisme, si bien qu'il fut en droit de s'interroger sur sa position actuelle.

Une question qui aurait pu prendre nettement plus d'envergure si l'éclat d'un métal précieux parmi les ombres n'avait pas attiré son attention. Au fond de la cale se dressait un coffre au trésor, trônant au milieu des décombres, intacts. On aurait pu croire qu'il n'attendait que le jour où on lui ferait quitter cette dépouille éventrée n'ayant plus d'esquif que le nom. Lui-même n'avait que peu d'attrait pour l'argent, mais cette fortune tombait à point nommé. Il voyait à travers elle une récompense pour toutes ses tribulations et un moyen de refaire leur vie une fois qu'il aurait retrouvé les siens, s'étant entre-temps persuadé de leur faculté à se tirer de situations épineuses. Par le gain alléché, il se précipita en oubliant toute notion de prudence et tomba dans le piège grossier que lui tendait ce plancher vermoulu. Sa main tendue pour attraper ce don du ciel ne le toucha même pas qu'il passait déjà au travers des planches pour ne comprendre que trop tard qu'une faille gigantesque l'attendait sous l'embarcation, trop petite pour l'y entraîner mais assez grande pour y laisser passer des hommes par dizaines. Ses mains voulurent se suspendre aux poutres tombées de toutes parts mais ne rencontrèrent que le vide et il tomba, sans fin.

Enfin, presque...

La chute vertigineuse lui retourna les entrailles, mais c'était un moindre mal comparé à ce qui l'attendait en bas, à l'atterrissage, si la pression ne le broyait pas avant. Respirer sous l'eau n'en faisait pas un surhomme et négliger les risques de mort aurait été absurde. Non pas qu'il ait vraiment eu le choix, mais au moins savait-il à quoi s'attendre au bout de cette descente aux enfers faisant écho à celle que toute cette période de sa vie illustrait à la perfection. Par chance, sa vie fut sauvée grâce à l'aide d'une luciole, venue lui prêter main-forte. Sa propulsion se suspendit pour faire place à un flottement, qui le mena à visualiser autour d'eux une bulle invisible qui l'aurait ralenti dans sa course vers le désespoir. Bientôt, cette lueur éphémère se changeait en une nuée de feux follets qui vinrent l'encercler de leur couleur dorée pour ensuite virer au noir et blanc, en alternance. Il ne se doutait pas un seul instant de ce que cela pouvait vouloir dire avant que des pièces d'armure ne s'y substituent pour le mettre au centre d'un amas de pièces détachées gravitant autour de sa faible chair.

La taille de ses bras et jambes, puis même de son corps dans son ensemble, ne sembla pas être un obstacle. L'armure s'affinait, s'allégeait et se rétractait pour être à sa taille et lui aller comme un gant. Comme si elle était soudain dotée de conscience et faisait tout pour lui plaire, pour lui convenir. Dorénavant, elle dépendait de lui et n'était ni plus ni moins que le prolongement de son corps. Il lui incombait la lourde tâche de le protéger contre vents et marées – surtout marées d'après l'environnement – jusqu'à se briser en mille morceaux. En d'autres termes, ils étaient liés à la vie, à la mort. Quoi de plus logique donc que de tout mettre en œuvre pour lui correspondre et répondre à ses attentes à tout point de vue. Ce bloc de métal froid ne l'était pas tant en définitive, et si il lui avait paru encombrant au premier coup d’œil il n'en était plus question désormais. Adaptation oblige, l'Écaille épousait désormais sa frêle carrure et lui faisait arborer ses couleurs : noir et blanc. Plutôt pertinent, à en voir les deux facettes de sa personnalité, diamétralement opposées. Plusieurs minutes furent nécessaires à un Kryo stupéfait pour qu'il s'examine dans le reflet de l'eau, un silence religieux pour toute compagnie. Il avait fière allure, sans l'ombre d'un doute. Seulement, ce n'était pas la question.

Ce qui l'intéressait n'était pas de savoir comment cette cuirasse s'était jetée sur lui mais pourquoi. Le processus importait peu maintenant qu'il l'avait sur le dos, il était autrement plus urgent de savoir ce que tout cela signifiait. Toujours perplexe, ce n'est que d'ordonner à ses doigts quelques flexions pour en vérifier la mobilité qu'il réussit à reprendre ses esprits. Aussi délirante que soit cette réalité, elle n'avait rien d'un rêve. Il venait de poser le pied sur le sentier de la guerre bien malgré lui et aussi longtemps qu'il porterait cette Scale, son identité serait celle d'un soldat de Poséidon. Et si l'idée que sa vie était maintenant entre les mains d'une entité supérieure n'était pas pour le réjouir il ne s'en offusqua pas non plus. Non, ce qu'il se demandait, c'était principalement quels changements cela allait impliquer mais aussi et surtout si Kyara avait connu le même sort. Peut-être s'était-elle noyée quand le bateau avait fait naufrage mais Kryo ne pouvait s'empêcher d'émettre une réserve à ce sujet. S'il s'en était tiré sain et sauf, il serait surprenant qu'il n'en soit pas de même pour elle. Il n'y avait aucune raison qu'elle ait couru plus de risques que lui car ils possédaient une force semblable. Peut-être y avait-il beaucoup d'appelés et peu d'élus mais s'il l'avait été, ce serait également le cas de son ainé.

Il en aurait bien mis sa main au feu mais c'était un gage difficilement réalisable dans les fonds marins. Aussi préféra-t-il partir du principe qu'elle était en vie et bien portante. Y croire dur comme fer l'aida à se détendre et il put alors libérer de ses chaînes une cosmo-énergie qui brûlait d'impatience de se faire entendre. Pouvoir enfin la faire sortir après tant d'années à la réprimer par tous les moyens était une délivrance dont il n'aurait pu se passer plus longtemps. Un sentiment de plénitude l'envahit et son corps partit à la dérive sans qu'il ne s'y oppose, soulagé d'avoir enfin pu laisser s'exprimer toute cette énergie dont était gorgée chaque fibre de son être. Si la quantité en était faramineuse à ses yeux elle devait être dérisoire pour d'autres, mais il s'en moquait éperdument, trop heureux d'avoir relâché toute cette pression pour imaginer en prendre ombrage. Grisé par cette soudaine légèreté, il en vint à oublier combien il était anormal de pouvoir respirer sous l'eau et même de s'y déplacer sans avoir à nager. Preuve était faite qu'il n'était plus sur la terre ferme mais au sein du royaume englouti de l'empereur des mers.

Tout lui apparut plus clair. La science infuse venait d'être greffée au fin fond de son cortex cérébral et la voix de son seigneur résonna du plus profond de son esprit pour l'informer de ce qu'il était à présent. Le jeune garçon qu'il était avait péri dans le naufrage du bateau qui devait les mener à bon port et il n'y avait plus ici qu'un marina reconnaissant envers celui qui lui avait sauvé la vie, et surtout en pleine possession de ses moyens et de sa Scale à la propreté éclatante. Elle était comme neuve, lui suggérant que personne ne l'avait portée au préalable – ou que s'offrir à lui était une nouvelle naissance pour elle. Pour parer au plus urgent, son nouveau maître lui inculqua le strict minimum pour mieux le livrer à lui-même, avec la ferme conviction que ses lacunes seraient comblées en temps voulu. L'enfant était porté disparu, c'était dorénavant un soldat et en tant que tel il devait venir gonfler les rangs d'une armée en pleine résurgence. Tout cela était nouveau pour lui et si son bon sens lui intimait de prendre ses jambes à son cou sans se préoccuper de ces sornettes il le mit en sourdine et passa en revue tout ce qui s'était passé au cours des journées précédentes. Cette étude lui montra qu'il n'avait rien à perdre à se laisser porter par le courant pour voir où cela pouvait le mener, se disant naïvement qu'il pourrait toujours reculer si ce qui l'attendait au bout du chemin n'était pas à sa convenance.

Se concentrant, Kryo relâcha une impulsion de cosmos, ni trop grande ni trop petite, calculée pour n'être qu'une onde insignifiante dans toute cette eau. La peur de voir son double resurgir était toujours bien présente. Un usage modéré de cette force était nécessaire s'il ne voulait pas perdre pied à nouveau, sans quoi il y avait fort à parier qu'il ne s'en tire pas aussi facilement qu'à leur première entrevue. Il avait les nerfs aussi bien que les sens à fleur de peau et sa perception était accrue, mais de même que l'armure tout cela était nouveau pour lui et il n'osait pas s'y fier de peur d'être induit en erreur par un excès de confiance. Il y préférait de très loin cette fonction de sonar qu'il s'attribuait de son plein gré et ne fut pas déçu du résultat puisque quelques minutes de total immobilisme suffirent à accrocher un puissant écho qui lui répondit sans ménagement. Des auras du même ordre que la sienne se trouvaient non loin de là – ou en tout cas en un point moins éloigné que ce à quoi il aurait pu s'attendre en épiant la faune locale. Ne demandant qu'à en savoir plus sur ce qui lui était arrivé, et surtout n'ayant pas meilleur point de départ en vue, il se mit en route vers cette destination dans l'espoir qu'on lui donnerait toutes les informations dont il avait besoin une fois sur place. Même s'il fallait bien avouer que cela coulait de source...