Le soleil déclinait dans le ciel, qui se voyait prit de rougeurs à l’approche de l’horizon... Blood évoluait lentement dans la ville, ébahie. Athènes offrait, il fallait bien le dire, un spectacle aussi surprenant qu’agréable a la jeune esthète. Exaltée, elle était prise du désir ardent de regarder partout, de découvrir les moindres recoins de cette cité nouvelle, qui semblait s’offrir si généreusement à elle. Sa précieuse Rome était loin derrière elle désormais, et elle avait de nouveaux lieux à aimer, pour peu qu’elle en prenne la peine.

Ainsi, depuis une heure au moins la jeune femme ne se lassait pas de tout découvrir aussi bien que possible, et déambulait dans ces rues étrangères. Mais les regards sur elle –femme seule- parfois, et la boite métallique pesant sur ses épaules lui rappelaient qu’elle avait des choses à faire, et que le moment de s’attarder n’était pas encore venu. Elle en avait déjà bien trop profité… Et elle aurait tout le loisir, quand le spectre de la Nuit aurait posé son voile de sommeil sur les habitants d’Athène, de retrouver ses si précieuses balades nocturnes. D’ici là, il lui fallait gagner son but : le sanctuaire d’Athéna. Celui-ci, elle le comprit bien vite, était énorme et se composait non pas d’un temple, mais de plusieurs. Si elle voulait y pénétrer, il lui faudrait une raison valable, et peut être se battre. Mais la jeune femme était réticente à cette idée… Quoi qu’il advienne, elle désirait que cela se fasse dans le calme. Le combat lui était encore totalement étranger, mais elle était consciente qu'elle n'y couperait pas, en choisissant cette vie. Malgré tout, elle espérait trouver en ces lieux quelqu'un qui saurait prendre la peine de l'aider et la former avant qu'elle n'en vienne au fait et soit confrontée à un véritable affrontement. Était-ce la trop espérer ? Elle en avait peur, mais ne se décourageait pas.
Il lui fallait en tout cas trouver un abri pour la Nuit, et un accueil. Elle comptait sur l’hospitalité de ceux, qui par leur armure, étaient en un certain sens ses semblables. Mais si elle se savait désormais pleinement ouverte à la maitrise du cosmos, elle se savait aussi novice, et avait peur, au fond d’elle, de se voir rejetée. Ce dont elle ne se rendait pas compte, c’était que le rang de l’armure de l’Aigle qui l’avait choisie prouvait déjà sa valeur, étant donné qu’il ne s’agissait pas là d’une armure parmi d’autre, mais d’une armure puissante, à l’égal de ceux qui se trouvaient les plus proche du maitre du sanctuaire... C’était celui-ci en tout cas, qu’elle cherchait à rencontrer en ce jour. Le « grand pope ». A ce qu’elle avait compris, il représentait l’autorité, et elle pourrait se considérer officiellement comme faisant partie intégrante des rangs de la Déesse Athena. De plus, il était évident que pour joindre les rangs des Saints, il fallait à la demoiselle prêter serment auprès de sa déesse. Mais tout le monde n’avait pas le privilège d’une entrevue avec cet homme aisément, songeait elle. Il lui faudrait donc certainement rencontrer quelques difficultés avant d’arriver jusque-là… Si les choses devaient tourner mal, elle s’arrangerait autrement, trouverait refuge en ville dans une auberge puis tenterait d’entrer en contact avec quelqu’un pouvant l’aider. Mais à ce stade, inutile de tergiverser… N’est-ce pas ?

Blood s’arrêta face aux marches, devant le portique indiquant l’entrée de la demeure de la déesse. Maitresse de la guerre, de la justice et de la sagesse. Cette divinité allait désormais diriger, indirectement, l’existence de Blood… Elle en était pleinement consciente, et se demandait parfois pourquoi elle : si elle estimait grandement la sagesse et bien des principes affiliés a la figure divine, la guerre la repoussait, et elle se sentait plus fervente auprès de Dieux des Arts, comme Apollon. Mais le destin avait voulu qu’il en soit ainsi, et elle l’acceptait. Immobile et muette, elle demeurait là, regardant la noble construction, mi hésitant, mi contemplant. Que faire désormais ? Elle s’imprégnait de ce lieu qui lui semblait déjà familier, et le laissait couler en ses veines. Sur ses épaules, la boite contenant l’armure de l’aigle lui semblait plus légère… L'Aquila inspira profondément, parcourue d’un frisson, et s’avançât enfin.

La demoiselle découvrit avec stupeur un temple en triste état, ou les crevasses et les dégâts étaient nombreux… Portant sur son dos la Cloth box de l’Aigle, on la reconnut sans trop de mal comme une personne faisant partie de leurs rangs, et on lui indiqua le chemin vers le grand pope. Toute cette facilité la surprit… Mais visiblement, le sanctuaire venait de traverser une épreuve éprouvante, et il y avait eu des pertes. Sur les visages, on lisait la fatigue, la lassitude parfois… La jeune femme décida de se rendre droite au but, songeant qu’elle saurait bien assez tôt ce qu’il y avait à savoir.

La montée fut longue, et Blood crut presque qu’elle n’en finirait jamais de gravir des marches. Elle traversa l’une après l’autre les maisonnées des saints les plus importants, ceux qui portaient des armures d’or, et ne posât pas de questions malgré ce qu’elle vit parfois. Puis enfin, elle arriva devant le dernier temple, le plus majestueux… Celui de l’Autorité, voix de la Sage Déesse sur la terre des hommes. Un instant, elle s’arrêtât. A nouveau. Cette même inspiration, cette impression de voler vers quelque chose de nouveau, que le prochain pas serait décisif. Elle pénétrât sous les colonnes, la démarche légère.

Malgré le sol de pierre, ses pas ne laissaient vibrer dans l’air que des ondes délicates, et finalement, Blood avançait au doux son de la caresse des étoffes immaculées recouvrant son corps. A mesure qu’elle s’enfonçait en ces lieux qui semblaient déserts, l’excitation enflait en elle… A peine discernait elle la statue au à l'effigie de la déesse au fond de la pièce qu'elle se sentit submergée par une aura incroyable. La déferlante de pouvoir la prit et l'émeut. En face d'elle, dans un grand trône, siégeait le Grand Pope. Par la force de ses habitudes d’esclave, Blood si tôt qu’elle fut assez près s’inclinât profondément.
Dire quelque chose… Elle aurait voulu le faire, mais elle s’était rendue compte au dernier instant qu’elle ne savait comment. Elle aurait dû y penser avant. Si elle venait pour prêter allégeance et serment, le commencement s’avérait difficile : se présenter. Elle n’avait ni nom, ni statut. Elle n’était plus véritablement Calyps, l’esclave Romaine. Et elle n’était pas encore Chevalière de l’Aigle. Blood... Qu’avait-elle à lui dire, alors ? Sinon le silence. Celui-ci pesât longtemps, avant qu’elle ne parvint à trouver ses mots. Des mots qui lui semblaient correspondre.

- Je viens me présenter à vous, Altesse, pour m’offrir à vous et prêter serment devant la déesse Athena qui m’a reconnue de son armure de l’Aigle.

La jeune femme préserva les yeux baissés, dans une attitude de soumission totale qu’elle devait toute à son vécu d’esclave, si profondément ancré en elle. Cette soumission, cette dévotion qu’elle affichait trahissait entièrement ce statut qu’elle se donnait, et posait d’emblée l’homme dont elle n’avait daigné regarder le visage en maître incontesté sur sa personne. A nouveau, elle se laissât envahir par le silence, le cœur battant lourdement dans sa poitrine, la pandora box semblant lui brûler les épaules.

- Je te souhaite la bienvenue. Tu es ici chez toi, considère ce foyer comme le tien.

- Pose ton fardeau et lève-toi. Tu as fait un long voyage pour arriver jusqu'ici, et je t'en remercie. Quel est ton nom ?

Sans même le voir, la tête ainsi baissée, Blood sentit toute la puissance du Grand Pope l’irradier. Elle était certaine que celui devant lequel elle s’abaissait avec ferveur était à la mesure de son rang. Lorsque sa voix retentit, profonde, elle s’en imprégna dans un mélange d’admiration et de surprise. Aussi belle soit elle, cette voix après tout demeurait humaine, et tout en la touchant profondément, lui rappelait que lui aussi, était un homme. Ses paroles, avenantes, rassurèrent la jeune femme qui avait craint de se trouver sans refuge. Désormais, elle pouvait considérer qu’elle avait un endroit auquel elle appartenait… Pour la première fois de sa vie, certainement. Son cœur en palpita dans sa poitrine avec émotion, tandis qu’elle sentait que l’homme qui lui faisait face lui ouvrait les portes vers une vie nouvelle.

Solennellement, le Grand Pope s’approchât d’elle sans qu’elle ne daignât relever la tête, concentrant toute son attention sur le son de ses pas. Lorsque tout a coup, elle sentit une main se poser sur son épaule, elle tressaillit. Non pas parce que le contact avait été brutal, bien au contraire, il avait été infiniment doux, mais parce que chaque fois qu’on la touchait Blood réagissait ainsi. On avait trop souvent tenté de lui faire violence, trop souvent ça avait mal fini. Rare étaient ceux qui l’avaient touché avec bienveillance ou respect, sans désir et violence. Le contact doux de sa main sur son épaule la lava de ses inquiétudes, et elle oublia son regard fuyant, sa soumission, pour daigner regarder celui qui semblait la prendre tout naturellement auprès de lui... Il était grand, mais ne ressemblait pas pour autant à un homme surentrainé, un de ces soldats idiots et trop larges d’épaules. Tout lui en dégageait une noblesse certaine, et Blood malgré elle devinait, sous la large cape et le casque si cachait son visage, un bel homme.
De sa main le Grand Pope retira son masque de métal pour se révéler à elle. L’esthète le trouva beau en effet, et demeura un instant accrochée aux traits qui se révélait à elle, à sa chevelure d’un bleu intense, puis surtout, à ses yeux d’un outremer plus profond encore. Happée par le regard bienveillant du représentant sur terre de la sagesse et de la guerre, elle sentit une sorte de confiance aveugle grandir en elle à l’égard de cet homme qu’elle rencontrait pour la première fois et déjà estimait profondément. Non seulement pour sa puissance et son statut, mais par ce qu’il dégageait en lui-même. Il était rassurant, et Blood instinctivement se sentait auprès de cette figure protectrice en sécurité. Alors, il lui tendit la main. Par cette paume tendue vers elle, la jeune femme pressentit toute l’étendue de ce qui s’offrait à elle de nouveau en ce jour. Désormais, elle serait plus que celle qu’elle était avant… Alors, doucement, avec cette pudeur et cette retenue qui lui était toute particulière, elle répondit à cette invitation, et vint poser sa main, si blanche et si frêle, dans celle de celui qui serait, à compter de ce jour, son maître et peut être son modèle. Les mains… Chaque contact de ce type qu’elle avait eu au cours de sa vie avait été pour elle une chose spéciale. Rarement, elle se laissait toucher. Plus rarement encore, elle s’unissait à quelqu’un d’un contact aussi intime et réciproque que celui de deux mains. Ici, le geste était lourd de sens. Il avait beau lui paraitre infiniment supérieur, par cette invitation, par la demande qu’il lui faisait de se lever, il l’élevait auprès de lui et, certainement, donnait à l’Aigle la possibilité de tendre vers l’envol. Portée par ce contact elle se releva, laissant la Cloth Box de l’Aquila au sol.

Oui, elle avait fait un long voyage, mais était ce nécessaire de la remercier de cela ? Ce simple voyage déjà avait été pour la jeune femme une source de félicité, par toutes les découvertes qu’il lui avait offertes. Elle y avait vu un présent d’Athena, et désormais le Pope le posait comme un don qu’elle faisait a sa personne et sa déesse. Que croire ? En tout cas, un derien silencieux résonna dans son esprit. Puis vint… la question.
Celle a laquelle elle n’avait jamais réponse aisément. Aux inconnus, a la masse, elle répondait « Calyps ». Mais désormais ? Elle n’avait pas trouvé de réponse précédemment, elle n’en trouvait pas d’avantage désormais. Cependant, il y avait une chose qui avait changé entre cette circonstance et les autres : la nature de l’interlocuteur. Ne devait-elle pas, au grand pope, dire la vérité et toute la vérité ? S’ouvrir à ce personnage ? Un frisson parcouru son échine, tandis que de multiples questions se bousculaient dans sa tête. Puis, des paroles anciennes lui revinrent… « Choisis en un ». Peut-être le jour était-il venu de se choisir un nom ? A nouveau, elle hésitât. Mais toujours, elle n’était pas prête, toujours pas. Malgré tout, le regard porté sur elle, et le contact de la main qui tenait la sienne lui permirent de prendre au moins une décision… Pour la seconde fois dans sa vie, elle allait dire sa vérité.

- Je n’en ai pas réellement… On me connaît sous le nom de Calyps, il semblerait que je m’appelle Blood.

Les même mots, le même poids pour la jeune femme. A nouveau, elle révélait ce nom qu’utilisais Beast pour la désigner, ce nom qui planait sur son esprit, à nouveau, elle prononçait ce nom à la sonorité étrange. « Blood ». Jamais, autre que Beast ne l’avait appelé ainsi… Mais ce mot, simple, planait sur son esprit depuis le jour de son éveil.

- Libre à vous de me nommer comme bon vous semble, je serais celle que vous choisirez...

Ainsi, elle laissait le choix, encore. A défaut de pouvoir choisir elle-même, elle offrait à nouveau cette alternative, celle d’être tout et rien. Celle d’être une personne nouvelle tout en restant elle-même. En ce jour certainement, elle deviendrait l’Aigle… Mais elle était avant tout à la recherche de son moi profond, de qui elle était et serait véritablement. Et au sein du temple, auprès de cette figure qui représentait son autorité d’une toute autre manière, bien plus forte, que les maitre qu’elle avait pu servir, elle se voyait donné l’occasion de renaître.

[69 ! \0/ ] Ainsi, une fois de plus, elle serait Calyps. Mais elle ne serait pas seulement Calyps, cette fois ci… Pouvait-elle voir naitre en elle une Calyps nouvelle ? Elle serait l’Aigle. L’Aigle noir qui sommeillait au fond de son cœur, elle le sentit devenir plus concret en elle. Il sommeillait là, au fond de son sein.
Il ne lui posât pas de question. Avec générosité et clairvoyance, il ne cherchât nullement à imposer à la jeune femme la nécessité de raconter. Pour le moment, elle continuerait de garder ses spectres au plus profond d’elle. Parler un jour de Beast… Peut-être le ferait elle, mais ce jour n’était pas encore venu. Blood ignorait tous des facultés du Pope, et pourtant, elle sentait déjà qu’il avait fait ce choix, ce choix de ne pas la mener à raconter en usant de son autorité. Si on lui avait demandé par le passé, elle se serait tu ou aurait menti. Mais face à la voix sur terre de la Déesse sage, s’eut été différent.

La lumière du soleil irradia doucement la pièce. Ce fut ce qu’elle pensât spontanément, alors même qu’elle prenait conscience que cette lumière n’était autre que celle du grand pope. L’homme face à elle irradiait véritablement, et en sa présence les ombres de la nuit disparaissaient tels des fantômes illusoires, condamnés à n’être jamais. Son cosmos n’avait rien de ces flammes qui englobaient le corps et sembler lécher l’être, l’entourant de ses flammes. En déployant son énergie, l’homme a la chevelure d’azure devenait tout simplement une source de clarté, et sa lumière était diffuse. Son cosmos était fait de rayons splendides qui se déployaient dans toutes les directions et inondaient tout, rendant ce qu’ils touchaient clair et lumineux. Comment ne pas songer alors à l’astre céleste qui donnait chaque jour aux hommes leur lumière ? Comment ne pas songer que plus qu’un brasier, il était tel cette source inépuisable qui éclairait le monde ? Blood autant qu’elle était fascinée s’en sentit si différente de lui… Son cosmos était sombre, et lorsqu’il se déployait autour d’elle il était tel le voile de la nuit, d’une infinie profondeur. Si chaud mais malgré tout si sombre. Mais en la présence du Grand pope, la Nuit même laissait place au jour. Alors elle, avait-elle sa place … ?

Etre elle-même et être libre. Voilà ce qu’elle recherchait, voilà ce qu’il lui offrait par ses paroles. Mais être elle-même… Qu’est-ce que cela voulait dire ? Encore et toujours, elle demeurait en quête, d’autant plus depuis le jour où elle s’était vue confrontée a la possibilité de choisir son nom. Etre libre et être maitre d’elle-même… C’était ce qu’elle était venue chercher en ce sanctuaire d’Athena, et aux mots du grand Pope, elle sentit les chaines de la servilité glisser de ses épaules. Peut-être deviendrait-elle, bel et bien, une femme libre. Plus encore, elle se voyait offert la possibilité d’être tout et son contraire, elle se voyait offert la suprême liberté de l’homme. Mais n’était-ce pas aussi effrayant, cette infinie liberté qu’elle semblait tout à coup avoir ? Au fond d’elle, Blood en voulant être elle-même désirait ne pas changer de trop. Mais elle garderait certaines chaines, pour ne pas se perdre dans le dédale de l’infini des possibilités. Malgré tout, elle évoluerait peut être… Tout essayer. Cette voie projetait en elle un trouble étrange, elle s’en sentit même rougir. Voilà bien une chose qu’elle n’avait absolument jamais faite.
Le Grand pope fit tomber les habits qui lui étaient attribués, pour révéler une armure d’or. La demoiselle en fut surprise, sans réellement savoir ce que cela signifiait. Or, Argent… Elle ignorait tout de ces rangs, et ne savait rien de la vie des chevaliers, de leur langage, de tout ce qui les concernait. Ce qui la fascina par contre, ce furent ses ailes… Le regard de la demoiselle se posa avec fascination et envie sur les splendides excroissances, rayonnantes. Des ailes…. C’était ce qui lui manquait, bien qu’elle fût l’Aigle. Et comme elles les entouraient, elle se sentit soudain proche de celui qui un instant au par avant était encore si loin au-dessus d’elle malgré son geste d’accueil, et un infini bien être la prit. Dans ce cocon doré, il n’y avait plus qu’elle, lui, et cette force qui faisait d’eux des êtres différents… Et ainsi entourée de ces grandes ailes d’or, elle se sentait bien, elle se sentait protégée. Femme si fragile, elle aurait pu demeurer longtemps la, au centre de cet étau si doux. Ses yeux se posèrent sur son visage bienveillant.


Arsiesys. Tout changeât profondément. Il avait un nom, et il était humain au même titre qu’elle. Le soleil s’était éteint et la Nuit était revenue, Blood se sentit redevenir elle-même, intimement, et être elle-même auprès de cet homme qu’elle rencontrait et qui se voulait son égal. « Fait tout ce que tu as envie d’essayer. »

- Tu peux compter sur moi.

Une idée folle. Aux yeux de la jeune femme, jamais elle n’aurait imaginé tutoyer le Grand pope. Mais un sourire était sur ses lèvres, et toute proche d’Arsiesys, elle avait vu naitre en elle le désir de s’essayer à s’écouter, à commettre cette folie. C’était mineur peut être, insignifiant même, mais pas à ses yeux. Tout à coup, elle lui était proche. Il lui demandait confiance et amitié, elle les lui offrait pleinement. Jamais la jeune femme, si retenue, si secrète et éloignée toujours n’avait agi de la sorte par le passé… Et elle se trouvait l’audace de ne pas le faire avec n’importe qui en plus de cela. Mais lui, comment le percevrait il ? Il semblait à la jeune femme que la chose était importante pour Arsiesys : être considéré comme un compagnon, un égal. Mais en tant que Grand Pope, même malgré la confiance et l’amitié, on ne devait pas le tutoyer souvent. Alors, elle se donnait à cette expérience, et prenait la décision de la mener jusqu’au bout, ne craignant pas de faire fausse route.


Et désormais qu’elle avait fait ce choix, autant qu’elle prenne la peine de dire ce qui devrait être dit, de révéler ses inquiétudes et de se renseigner, sur ce qu’elle était en train de devenir.

- L’armure m’a choisie alors que je ne connaissais même pas votre existence…

Sa main se vit irradiée de son profond cosmos nocturne. Son cosmos. Elle le maitrisait depuis longtemps désormais, très longtemps, bien qu’elle n’eut jamais eu connaissance de sa nature profonde, son nom, ce qu’il représentait.

- Je maitrise le cosmos depuis longtemps désormais, mais je ne me suis jamais battue et ne sais guère comment l’utiliser.

A vrai dire, elle avait déjà, tenté un peu, de se débrouiller avec. Si elle devait se battre, peut-être s’en sortirait-elle. Mais elle était très peu sure d’elle, et préférait présenter les choses comme elle les vivait et les ressentait. Son œil vint poser son regard au fond de celui qui lui faisait face, et elle exprimait un mélange d’interrogation et d’espoir, de trouver de l’aide certainement. Elle était inquiète, et doutait d’elle-même. Elle n’était pas quelqu’un d’ouvert non plus, et cachant profondément son secret et ses sentiments, elle ne se saurait capable de faire partie d’un groupe, de combattre au côté d’autres personnes, de vivre ainsi en tant que Sainte… Comme il l’y avait invité par ces actes, elle s’ouvrit à lui. Elle baissât les yeux.

- Je ne sais si je serais à la hauteur…

- Je t'apprendrai.

- Qu'est-ce qu'être à la hauteur ? Efface ces doutes et écoute ce que te dit ton coeur. La foi en l'âme humaine échappe à la raison et défie les frêles certitudes de notre savoir. Tu ne dois pas avoir peur. Les compétences, tu les as déjà. Elles sont inscrites en toi depuis le jour de ta naissance. Tous peuvent discerner cette lumière, mais rares sont ceux à la dompter. Tu en fais partie, l'Aigle l'a lu en toi. Sans cela, tu n'aurais pu devenir son havre de paix, l'endroit où reposer ses ailes. Ce sont désormais les tiennes. À toi d'en faire bon usage.

- La vie est l'arc, la corde est le rêve. Soyez l'arc et le trait, l'énergie et l'attraction de votre vie.

- C'est pour ça que nous sommes là.

- Ne crains rien. Va à ton rythme. Nul ne t'en blâmera. Prends le temps de consolider tes ailes et vole plus haut que quiconque. Élève-toi au-dessus des vicissitudes de la vie et deviens celle que tu as toujours voulu être. Ton avenir n'appartient qu'à toi, et personne ne pourra jamais te le voler.

- Il se fait tard. Tu devrais te hâter de prendre tes quartiers. Tu as amplement mérité de t'abandonner à un sommeil réparateur. Je te souhaite encore une fois la bienvenue au sein de notre Sanctuaire, et espère que tu t'y plairas. Ceci est ta demeure, et je n'en suis que l'humble propriétaire. Ne l'oublie jamais.

Je suis confus. Je te prie de m'excuser. Où avais-je la tête ? Pour te répondre, tu as dû passer à côté en arrivant. Rares sont les bâtiments assez grands pour accueillir toute une armée, celui frappé de l'emblème d'Athéna contient les dortoirs. Tu devrais pouvoir t'y faire une place sans le moindre mal, tu seras bien accueillie. Hormis de rares exceptions, seuls les Golds Saints sont autorisés à demeurer en dehors afin de monter la garde de leur maison. Si tu le souhaites, je peux demander à un garde de t'y conduire...

- ...À moins que tu ne préfères dormir ailleurs ? Je conçois qu'il puisse être déstabilisant de devoir s'immiscer dans une communauté comme la nôtre à une heure si tardive, en particulier après avoir fait un si long voyage. Je te propose donc de t'offrir le gite, non pas ici mais dans mes quartiers au sein de la maison du Sagittaire. Comme tu t'en doutes, je suis retenu ici et ne peux m'y rendre à ma guise. Que tu y séjournes ne me dérangerait aucunement, tant que ce n'est que temporaire. Considère cela comme mon cadeau de bienvenue.