Des choses étranges, il avait déjà pu en voir. Le Prophète pouvait même considérer que rien que sa vie actuelle était déjà une particulière étrangeté. Combattre était une chose. Mettre d'énormes coups d'épée afin de démembrer de futiles adversaires au nom de son maître avait toujours fait partie de sa vie, son quotidien. Découvrir une ville souterraine, une incarnation divine, devoir parcourir le monde pour trouver d'autres fous à lier comme lui qui accepteraient de tout plaquer pour porter une armure étrange leur permettant d'exploiter des pouvoirs phénoménaux pour servir une divinité dont ils n'avaient à la base sans doute rien à faire... Mouais, des trucs bizarres, ce n'était pas ce qui manquait dans sa vie désormais. Mais même par rapport à ces nouvelles habitudes, ce qui venait de se dérouler était particulièrement notable. En effet, comment expliquer que trois de ses hommes, dont deux Cardinaux, venaient subitement de disparaître ?

Oh, ce n'était pas comme s'ils étaient sortis de la citadelle pour une balade, non. Un instant leur cosmos était là, et l'instant suivant, Poum ! plus rien... Guerre, Pestilence et le Frelon. Tous trois disparus, sans la moindre explication. Et Arès n'avait pas répondu à son appel. Ne s'était pas présenté à son bras droit pour répondre à ses interrogations. Pourtant, il en avait grand besoin. La simple acceptation de la situation ne lui convenait pas. Comment s'en satisfaire ? Un mort au combat n'était déjà pas acceptable, mais néanmoins inévitable et compréhensible. Rien à voir ici. Aucun signe d'invasion. Aucune trace d'eux. Pas de reste d'aucune sorte... Juste envolés !

Ephtal ne supporta alors plus de rester enfermé. Ainsi, un homme se trouvait assis en tailleur. Sa faux lui barrait les cuisses, tandis que son regard se portait dans la direction du grand lac, à quelques lieues de là. Dans cette plaine, cet homme encapuchonné de sa tunique blanche pourrait voir à la ronde si quelqu'un approchait. Cela ne lui procurerait sans doute pas de réponse, à moins qu'un nouvel acte ne se produise. L'on ne sait jamais. Une attaque de leur position n'était pas à exclure après un coup de ce genre. Mieux valait être paré, au cas où quelque chose de ce style se produisait...

Citation :

Repos 2 (full pv)

S'il existait une personne qui n'était pas difficile à trouver, c'était bien Ephtal. Qu'il se trouve dans la citadelle ou sur le territoire bordant leur tanière, la pression si particulière de son cosmos était toujours présente. Il est dit que personne n'échappe à la mort. Lorsque l'on connaissait le Prophète comme je le connaissais moi même, je savais que cet adage était plus que réel. Certain me jugerait trop partial dans cette histoire mais je pensais parler en connaissance de cause : l'homme de confiance de Arès n'était pas n'importe qui et de tout les Cardinaux, il était le seul que je redoutais réellement.

Si je le cherchais en ce jour, ce n'était pas sans raison. J'avais senti une certaine effervescence au sein de la Citadelle et j'en avais évidemment deviné la cause, l'ayant moi-même perçut assez nettement. La disparition des Berserkers était inexpliquée. Et si la disparition de simples soldats aurait pu passer inaperçu, il n'en était pas de même de deux Cardinaux. En l'espace d'un instant, le cœur même de la Citadelle s'était retrouvé affaibli. Les Gardiens même d'Arès, appréhendés par une force obscure. Une force capable d'atteindre une cité masquée aux yeux des hommes pouvait être un vrai danger pour nous. Et les Berserkers craignaient cette force.

Je doutais que mon maître soit capable de comprendre ce qui se passait - sans quoi nous aurions déjà retrouvés les disparus - mais je pouvais au moins savoir ce qu'il en pensait. Si celui-ci était sorti, c'est qu'il était dans l'attente d'un événement. Jamais la Mort ne sortait sans raison après tout. Là, dans la plaine, je le trouvais. Posé en tailleur, faux en travers des cuisses, il semblait extrêmement attentif. Il m'avait sans doute repéré au moment même où j'avais aussi quitté la citadelle. Il ne pouvait en être autrement et je n'avais pas cherché à masquer ma propre présence. Une sorte de tunique sombre masquait ma cuirasse aux yeux des gens, même si les plaines étaient d'ordinaire désertiques, je n'aimais pas montrer la source de mes pouvoirs aux non-initiés. Alors que j'arrivais à sa hauteur, j'inclinais respectueusement la tête pour saluer celui qui était également mon maître.

- Toujours aucune explication sur ces disparitions, Maître ? En attendant, nous avons renforcé le dispositif de sécurité et nos patrouilles ont ordre d'accentuer les rondes. Si notre position a été localisé, nous serons alors prêt à répliquer !

Ce n'était en rien une chose rassurante mais au moins savait-il que nous étions prêt à toute attaque ennemie.

Rien. Juste le relatif silence, quelques bourrasques venant le troubler en quelques sifflements. Rien de notable ne venait à se produire, donc... Voilà qui le laissait ainsi, à n'enregistrer aucune information nouvelle. Entièrement concentré sur les cosmos en approche, Ephtal se lassait de n'avoir rien à se mettre sous la dent. Ce n'était pas ainsi qu'il allait pouvoir progresser et retrouver ses soldats ! C'est dans l'effort qu'il enrôlait ses fauves. C'est avec une grande dépense de temps et d'énergie qu'il agrandissait sa récolte. Autant dire qu'il n'était pas disposé à en perdre autant d'un seul coup sans en avoir la moindre explication ! Le Prophète n'en resterait pas là, c'était certain. Mais pour l'instant, il ne savait tout bonnement toujours pas où chercher... Du temps perdu, encore... Frustration et colère s'accumulaient ainsi sans qu'il ne puisse rien y faire.
Mais finalement, quelqu'un approchait de lui. Pour autant, le Cardinal de la Mort ne se précipita pas, n'esquissa même aucun mouvement. Il savait déjà exactement qui il était. Le ressentant à son cosmos avant même qu'il ne sorte de la citadelle, Nosgoth de la Tarentule venait à la rencontre de son maître. Cet élève était sans doute la personne dont il pouvait s'estimer le plus proche à l'heure actuelle. Depuis qu'il le connaissait, s'il faisait l'addition de ses actes et ses commentaires, il était clairement de ceux qui se trouvaient plus fidèles au Prophète qu'à Arès. Une chose qui ne devrait pas être, certes. Car si la Dieu de la Destruction s'en rendait compte, la Tarentule passerait sans doute un sale quart d'heure... Ephtal n'en dirait jamais le moindre mot en tout cas, n'estimant pas qu'il était nécessaire que cela arrive aux oreilles de leur divin maître. Ce ne serait qu'une perte inutile...
Le colosse l'écouta sans l'interrompre, et laissa même le silence s'installer un moment lorsqu'il se tut. Et finalement, lorsqu'un son sortit de derrière son masque, ce fut un long, très long soupir.

Rien... Pas le moindre trouble. Pas le plus petit indice. Rien de notable ne s'approche ni ne s'éloigne. Aucune trace d'eux... Si seulement cet acte avait été revendiqué, nous pourrions agir. Mais que faire lorsqu'il s'agit d'une disparition pure et simple ? Si quelqu'un est capable de nous priver ainsi d'une telle part de notre force de frappe sans que nous ne puissions rien faire... autant dire que nous sommes finis !

Une vision pessimiste, certes, mais bel et bien réaliste. Deux Cardinaux et un des plus fidèles soldats... Qui pouvait leur assurer qu'au prochain passage, ce ne seraient pas les deux derniers Cardinaux ainsi que Nosgoth qui viendraient à disparaître ?
D'autres questions venaient à l'effleurer. Pourquoi pas lui, tout d'abord ? Quitte à enlever quelqu'un avec tant de simplicité, pourquoi ne pas directement priver Arès de son bras droit ? Cela n'avait pas de sens... Ou bien les trois pioches n'étaient-elles que des fruits du hasard ? Peu probable, mais ce n'était pas à écarter non plus... D'une certaine façon, il avait besoin de prendre un peu de recul. Pour cela, entendre l'avis de quelqu'un d'autre pourrait le servir...

Que penses-tu qu'il ait bien pu se passer ici ? As-tu la moindre hypothèse sur la disparition aussi soudaine qu'inexplicable de trois éléments dont deux Cardinaux ?

Lui n'avait pas de réponse en tout cas. Rien de clair et évident en tout cas. Rien d'étayé non plus. Autant dire donc tout simplement qu'il n'avait rien, rien d'autre que ce que son imagination était capable de produire. Seul un Dieu pouvait avoir commis un tel acte en tout cas. Aucun humain ne pouvait s'introduire dans la Citadelle, y faire ses courses et en repartir aussitôt sans avoir été détecté entre temps. Une question de portes spatio-temporelles, ou quelque chose d'approchant... Quelle autre thèse développer ?