Se faire passer pour mort… C’est quelque chose que j’ai regretté. Enormément. Mais avais-je d’autres choix ? Non, je ne pense pas. Je n’étais plus digne de porter le titre de « Chevalier ». Je n’étais plus en mesure de combattre pour défendre la volonté d’Athéna. Ma Cloth a été complètement annihilé par le Géant et, quels que soient les efforts que j’ai pu réaliser, le Dragon ne voulait s’éveiller à nouveau.

Quatre mois se sont écoulés. Les rumeurs ont été multiples concernant le Dragon Asiatique, Shaokan. Considéré comme disparu, certains ont par la suite pensé qu’il avait pris la fuite, ne supportant plus la pression que l’on peut ressentir en défendant une déesse. D’autres encore crurent que le « Mythique » avait subi de trop lourdes blessures pour continuer son rôle de Saint. Bref, vous l’aurez compris, il y eut beaucoup de rumeurs mais aucune ne s’approchait de la vérité. Aujourd’hui, se tient un homme portant une armure émeraude. Les bras croisés, un sourire prétentieux sur le visage, Shaokan arborait la Cloth du Dragon, plus resplendissante que jamais, à croire qu’elle venait de voir le jour. Plus déterminé que jamais, quelque chose a changé chez le Mythique. Un surplus de puissance ? Une information importante connue que de lui ? Rien de tout cela. Le Chinois avait vécu une longue aventure, dans laquelle il avait découvert bien plus que ce qu’il voulait. Décroisant ses bras, le Dragon avança lentement, souhaitant s’entretenir avec une personne dont, jusqu’à présent, il a pris le soin d’éviter le plus possible : le Grand Pope, Arsiesys du Sagittaire.


Quatre mois plus tôt…
Le voyage n’avait pas été réellement long. Etait-ce dû à ses nouvelles compétences physiques, accrues depuis le combat contre le Géant à Rome ou bien était-ce dû à son désir ardent de pouvoir porter à nouveau sur son corps l’armure qui lui tient tant à cœur ? Shaokan n’aurait su répondre et, à dire vrai, la réponse lui importait peu. S’il était à Jamir, c’était pour une raison bien précise : réparer et récupérer la Cloth du Dragon. De son combat contre Anthrakma Zugilos, seul le Bouclier circulaire du Dragon avait résisté au terrible coup qui aurait dû être fatal pour Antares du Scorpion & que le Chinois avait héroïquement intercepté. Jetant un coup d’œil à droite, puis à gauche, l’ancien Chevalier se demanda s’il était réellement là où sont censés se trouver ces fameux alchimistes, ceux qui ont forgé les armures des guerriers d’Athéna. En effet, l’endroit était désert et la pluie s’abattant sur les lieux n’arrangeait en rien la visibilité de l’asiatique. Mais qu’importe pour lui. Il cherchera ces forgerons jusqu’à ce qu’il meurt : pour lui, hors de question de quitter le lieu sans la cloth du Dragon.

Pendant des jours & des jours, Shaokan chercha les forgerons, en vain. De plus, le manque flagrant de faune et de flore diminua les chances de survie du chinois : il lui fut extrêmement difficile de trouver de quoi se nourrir et il dut se contraindre à changer ses habitudes alimentaires, ne se contentant que d’un repas le soir. Dans cet état, impossible pour lui de s’entraîner, ne serait-ce qu’un peu. Et puis, après tout, quel intérêt ? Dépourvu d’armure, les résultats d’un tel acte seront insignifiants.

Après six jours de recherche et d’une diminution impressionnante de son Cosmos que quelqu’un le retrouva. Un genou au sol, l’ancien Chevalier d’Athéna tentait, tant bien que mal, de continuer d’avancer pour trouver un forgeron. Mais ce fut finalement eux qui le trouvèrent. Voyant que l’asiatique essayait de faire un effort pour lequel il ne disposait plus de la moindre capacité énergétique, les forgerons l’aidèrent et l’emmenèrent au village, afin qu’il puisse se reposer. Le chinois, une fois posé sur le tapis de paille lui servant de lit, s’endormit immédiatement, exténué par son voyage et les conditions de survie difficiles de Jamir.

Lorsqu’il revint à lui, en meilleure forme, vingt-quatre heures s’étaient écoulées. En apprenant ça de la part d’Arkás, le forgeron l’ayant retrouvé, Shaokan se leva immédiatement, bien qu’il n’avait pas totalement récupéré.

« Je n’ai pas de temps à perdre… Je dois réparer au plus vite la Bronze Cloth du Dragon. »

En entendant les derniers mots sortis de la bouche de Shaokan, Arkás eut comme un léger sursaut. Il regarda le chinois d’un air intrigué, comme s’il se demandait ce qu’il faisait là. Portant sa main sur son bouc blond, le forgeron de Jamir s’adressa au jeune homme qu’il avait sauvé.

« La Cloth du Dragon, hein… Intéressant. Jamais je n’aurai imaginé qu’un Chevalier d’Athéna se déplace jusqu’à nous pour combattre à nouveau pour une Déesse… »
« Je ferai n’importe quoi pour veiller sur ma Déesse & son royaume. » répondit spontanément le Mythique, presque agacé par les dires du forgeron.
« Hum… Je vois. Et pourquoi cette armure est-elle… « Brisée » ? »

Shaokan hésita à répondre. A son goût, ce type lui posait trop de question. En sachant qu’il était un Saint d’Athéna, cela aurait dû lui suffire pour réparer la cloth du Mythique. Mais non. Il s’obstine à tout savoir. S’approchant lentement de la sortie, Shaokan hésita une nouvelle fois, puis pensa qu’il n’avait rien à perdre, après tout.

« Dans une mission. Ou, plus exactement, un combat. J’ai combattu un Géant avec les Gold Saints de la Vierge & du Scorpion. J’ai intercepté l’attaque de la créature, qui était destinée au Scorpion. Seul l’Indestructible Bouclier du Dragon s’en est sorti. Indemne. »

Arkás éclata d’un grand rire, faisant trembloter l’ensemble de son corps. Le chinois le foudroya du regard mais cela avait peu d’importance pour l’habitant de Jamir : il ne croyait pas un seul mot de l’histoire de Shaokan. Après tout, il fallait être réaliste : qui va croire qu’un Bronze, qui plus est qui n’est pas le Pégase, a survécu à l’attaque d’un Géant ? Personne. Quittant son siège, l’homme au bouc blond continua à rire et murmura au chinois que s’il tenait à revoir son armure, il avait mieux intérêt à lui dire la vérité. Puis il quitta la pièce, sous le regard enragé de Shaokan.

La récupération de l’armure du Dragon s’avérait être une cause perdue d’avance. Et pourtant…

Deux jours plus tard…
Arkás ne fut pas le seul à, non seulement, refuser de croire à l’histoire de Shaokan mais en plus à lui refuser la réparation de son armure. Apparemment, à Jamir, un Bronze qui défie et survit face à un Géant relève plus du mythe, voire de la blague plus qu’autre chose. Cette considération exaspérait plus qu’autre chose le Chinois : il ne supportait pas de se faire railler ainsi mais surtout, ce dont il ne pouvait accepter, c’était le fait que ces forgerons refusaient obstinément de reconnaître sa force. Il n’était qu’un Bronze certes, mais pas n’importe lequel : l’invincible Dragon ! Mais ça, ils s’en moquaient… Tous, jusqu’au dernier.

Isolé sur le bord d’une falaise située non-loin du village, l’asiatique contemplait attentivement son Bouclier du Dragon puis son bras droit. Il ne pouvait s’empêcher de se remémorer comment il avait perdu sa cloth en échange de la vie d’Antares, comment il s’était montré digne d’Athéna… Puis, un autre souvenir, longtemps oublié, lui revint : la manière dont son Cosmos avait réagi. Il avait littéralement explosé et adopté une forme bien distincte : celle d’un Dragon géant. C’était-il, à cet instant, éveiller à ce que l’on nomme le Septième Sens ? Lui-même l’ignorait et seul un Gold Saint ou quelqu’un comme Elias pouvait lui apporter ce savoir. Or, aucun d’entre eux n’étaient présents pour confirmer les doutes du jeune Dragon.

« Si seulement j’avais un moyen de prouver à ces manants que mon histoire n’est que pure vérité… » murmura Shaokan, perdant à chaque minute son espoir de se battre à nouveau pour la Déesse qu’il aime tant…

C’est alors qu’un autre souvenir, vieux de treize années, lui revint. Une vieille conversation, entre lui et le Dragon Fou, son premier mentor…

« Quelle histoire saugrenue allez-vous encore me conter aujourd’hui, « Maître » ? » disait un Shaokan enfant, complètement ennuyé par la situation.

La main gauche soutenant son petit visage, le corps en position assise et jambes croisées, le petit chinois, alors âgé de huit ans, s’ennuyait profondément. Chaque jour où il s’entrainait en compagnie du « Dragon Fou », son mentor, ce dernier s’amusait à lui faire perdre une heure, temps réel, pour lui raconter une histoire complètement grotesque et absurde. Mais aujourd’hui, le Maître semblait avoir un air sérieux, une expression qu’il n’avait jusqu’alors jamais affiché. S’éclaircissant la gorge, le porteur de l’armure de Bronze du Dragon se prépara à raconter une nouvelle histoire.

« Quand j’étais plus jeune, on m’a raconté une vieille légende concernant ce Bouclier… On m’a dit que, hormis en retournant la cloth du Dragon contre lui, il y avait un autre moyen pour le détruire… »

Le jeune Shaokan eut alors un regard intrigué. Il connaissait le premier moyen de détruire le Bouclier, dû au fait qu’elle provenait d’un vieux conte chinois et, étant de cette nationalité, il n’était en rien ignorant sur les légendes orientales. Mais un autre moyen d’annihiler le Bouclier Indestructible ? Cela le surprenait autant que ça l’intéressait. Retirant sa main de sous son visage, il la posa sur ses genoux, impatient de prendre connaissance de la suite du récit du Dragon Fou.

« Seul un forgeron de Jamir peut réussir à faire cela. Pour ce fait, il doit utiliser une technique ancestrale permettant de révéler les blessures qu’a subi le Bouclier depuis son existence. On m’a dit qu’à la précédente Guerre Sainte, le Saint du Dragon avait dû demander l’accomplissement de ce rituel afin de se débarrasser d’une malédiction ayant atteint l’ensemble de sa Cloth. Mais personnellement, je n’y crois pas. N’y à ce qu’à fait le Dragon d’il y a deux siècles, ni à cette histoire de destruction du Bouclier. N’est-il pas « Indestructible », après tout ? »

Retour à Jamir. Le chinois fronça ses sourcils, se demandant si le Dragon Fou ne se trompait pas au sujet de ce vieux récit. Pour Shaokan, il n’y avait qu’un seul moyen de le savoir. Se levant, il décida de regagner le village, avec cette détermination qu’il a toujours eu durant toute son existence et qu’il commençait à perdre ces derniers jours. Arrivant devant la maison d’Arkás, il entra sans même se faire inviter et foudroya le forgeron du regard. Ce dernier, lui, semblait toujours aussi amusé en voyant Shaokan…

« Tiens, mais ne serait-ce pas notre cher petit menteur de Drag… »
« Boucle-la, Arkás. Je suis venu te demander quelque chose. Mon mentor m’a raconté, quand j’étais enfant, une histoire. Il m’a déclaré que les forgerons connaissent un moyen de révéler les blessures du Bouclier du Dragon avant de le détruire. Est-ce vrai ? »

Arkás sembla comme gêné et choqué par la question de Shaokan. Lâchant un sourire arrogant, il n’en fallut pas plus au Mythique pour avoir sa réponse.

« Intéressant… Puisque tu rigoles tant de mon histoire entre ce Géant et moi, pourquoi ne pas réaliser ce rituel ? Vous l’avez bien fait pour mon prédécesseur d’il y a deux siècles, pourquoi pas pour moi également, hum ? »

En un instant, les rôles s’étaient inversés. Le forgeron était irrité par les révélations de Shaokan, tandis que ce dernier s’en amusait grandement. Le chinois savait qu’il avait gagné : si Arkás refusait la demande du Chinois, nul doute que ce dernier s’attirera les foudres à la fois du Grand Pope, pour avoir refusé de faire le nécessaire pour réparer la cloth du Saint mais aussi d’Athéna, qui considérera son geste comme une trahison, très certainement. Lâchant un « Tss… ! » qui afficha bien sa rage envers le Dragon, il accepta de procéder au rituel le soir venu.

Le soir venu, nombreux étaient les forgerons venus assistés à ce rituel que l’on disait « rare ». Assis près d’un feu de camp d’une taille gigantesque, Shaokan donna l’ultime partie de sa Cloth encore existante à Arkás. Ce dernier y déversa dessus une étrange poussière, fine et brillante, avant de fermer ses paupières, les paumes de ses mains collées l’une à l’autre. Du bouclier émergea alors plusieurs fumées de cosmos orangé, qui allèrent s’écraser avec douceur sur le front et le torse du forgeron. Ce dernier émit alors plusieurs mimiques de douleurs, semblant ressentir tout le mal qui a été infligé à la protection ces deux cents dernières années. Son ultime grimace lui fit, en revanche, hurler de souffrance avant de voir son corps s’effondrer et trembler. Les fumées orange cessèrent d’être émises par le Bouclier et ce dernier se brisa en plusieurs morceaux, sous le regard non-étonné de Shaokan. L’histoire du Dragon Fou est donc vraie. Du moins, en ce qui concerne la destruction du Bouclier. Mais qu’en était-il concernant les souvenirs de la protection ?

« Ce jeune homme… » s’adressa à la foule un Arkás transpirant et affaiblit comme jamais. « Il ne nous a pas menti… Il a réellement affronté un Géant, du nom de Anthrakma Zugilos… Et il a perdu son armure en protégeant l’un de ses camarades Gold… »

Les autres forgerons semblèrent choquer par ses révélations tandis que le Mythique se sentait pousser des ailes. La véracité de son histoire avait enfin été prouvé et à présent, l’assemblée des habitants de Jamir devait passer pour une sacrée bande d’ahuris. Gêné par la situation et ayant honte de la manière dont il avait traité jusqu’alors Shaokan, Arkás s’approcha de lui et lui murmura quelque chose, qui fit retrouver toute sa joie à l’Oriental.

« Je te prie de me pardonner, pour ne pas t’avoir cru. En guise de pardon, je vais te réparer ton armure et la rendre plus puissante & résistante qu’elle ne le fut. Qu’en dis-tu ? »
« J’en dis que je t’en pardonne. » lui répondit doucement Shaokan, satisfait comme jamais de la situation dans laquelle il était plongé.

Le retour du Dragon n’était plus qu’une question de temps. Du moins, c’est ce qu’il croyait…

Une semaine plus tard…
Ce qu’Arkás avait omis de mentionner, c’était que le rituel de réparation d’une Cloth nécessitait des matériaux si rares qu’il fallait un certain temps pour les trouver et, surtout, les préparer. De l’orichalque, du gammanium et de la poussière d’étoile, tels étaient les trois éléments nécessaires à la renaissance de l’armure du Dragon. Voilà déjà sept jours que le forgeron de Jamir n’était pas revenu de sa quête et Shaokan se demandait régulièrement s’il n’aurait pas dû l’accompagner. Bien que dépourvu de l’ensemble de son armure à présent – son Bouclier s’étant brisé pour prouver son récit – l’asiatique disposait encore d’une partie de ses pouvoirs. Mais sans sa Cloth, sa puissance s’en trouvait extrêmement réduite. En attendant le retour probable d’Arkás, Shaokan devait s’occuper comme il le pouvait. Un entrainement ? Inutile. Se reposer ? Inutile. Mais alors, que faire ? Pourquoi ne pas apprendre les techniques de forgeron ? Cela sera utile pour le Sanctuaire. Fier de son idée, le chinois quitta la demeure d’Arkás pour consulter le vieux sage du village et lui demander de lui transmettre ses connaissances.

Sauf qu’il n’en aura jamais l’occasion.

A peine quitta-t-il la demeure qu’il entendit plusieurs villageois émettre des cris de joie. Tournant la tête vers l’Est, Shaokan constata alors que le forgeron était finalement revenu de sa mission. Bien qu’amoché à de multiples endroits – visage, bras gauche et genou gauche – Arkás était fier d’avoir réussi sa quête et d’être revenu, en vie, au village. L’homme, souriant comme jamais, vit le Chinois et s’approcha alors de lui. Le Saint quant à lui ne se contenta que de hocher la tête, en guise de salut et de remerciement à la fois. Arkás avait tenu sa parole d’il y a une semaine et il semblait prêt à tout pour venir en aide au Dragon. Les hommes qui respectent leurs promesses, voilà quelque chose que Shaokan appréciait grandement. Une fois à sa portée, le forgeron annonça au Chevalier la date du rituel de la « renaissance » : d’ici deux jours. Encore deux jours d’attente avant de s’en aller de Jamir et de regagner le Sanctuaire… Au final, l’asiatique aurait passé plus de neuf jours dans le village.

Les deux jours s’écoulèrent rapidement. Pour une question de préférence, Arkás souhaitait réaliser son rituel en pleine nuit, ce qui ne dérangea absolument pas Shaokan. Qu’importe le moment de la journée, tant que le forgeron tenait sa promesse, cela ne signifiait qu’une seule chose : d’ici quelques heures, il porterait à nouveau la Bronze Cloth du Dragon. Cependant, bien que l’asiatique affichait sa joie sans retenue, Arkás semblait comme inquiet par quelque chose. Une chose qu’il avait dû apprendre durant son voyage, si ce n’est avant.

La nuit était tombée. A l’instar de la semaine précédente, un grand feu de camp avait été allumé. Une fois encore, les forgerons de Jamir s’étaient réunis, en cercle, autour d’Arkás. A ce qu’il avait entendu au cours des nombreux jours qu’il avait passé aux côtés des habitants, le forgeron chez lequel Shaokan créchait était le meilleur de toute leur communauté. Quelle aubaine que ce soit celui-ci qui ait retrouvé le chinois lorsque ce dernier se trouvait dans un état proche de la mort. Quoiqu’il en soit, le moment était finalement arrivé. Cet instant, qu’il avait tant rêvé, tant attendu, allait enfin se réaliser. Bientôt, le mal fait par Zugilos sera effacé. Bientôt, le Dragon reviendra d’outre-tombe et déferlera sa colère sur les ennemis d’Athéna. Bientôt, Shaokan sera de retour…

Traversant l’assemblée de forgerons, le Mythique n’eut aucun mal à rejoindre Arkás, auprès du feu massif. Le seul son pouvant être entendu était celui du crépitement du brasier, bien que celui-ci ne s’avère pas gênant pour la cérémonie. Se préparant à s’asseoir, l’action de Shaokan fut interrompue par la voix du forgeron.

« Non. Tu dois être debout. »

Shaokan ne comprenait pas. En quoi sa posture influencerait-elle la cérémonie ? Il n’en savait rien mais il préféra suivre l’ordre d’Arkás, sans répliquer. L’homme de Jamir lança alors le rituel, qui fut pour le moins étrange. Une aura de cosmos orangée émergea de l’orichalque et du gammanium, avant de les faire léviter juste au-dessus des débris du Bouclier du Dragon. La poussière d’étoile se souleva ensuite, et se déversa sur les deux matériaux en lévitation pour ensuite les dissoudre. Shaokan ne put suivre la suite, des flashs réguliers étant apparus et l’aveuglant. Il se demandait même si ce n’était pas un coup du forgeron, exprès pour que le Saint ne découvre pas ses secrets pour ensuite les reproduire. Ceci dura pendant plus d’une dizaine de minutes, à tel point que l’asiatique se tenait la tête à la fin tellement cette lumière récurrente le faisait souffrir.

Lorsque tout ceci se termina et que sa vue redevint correcte, Shaokan se demanda sérieusement si Arkás ne l’avait pas arnaqué. Non seulement, il n’y avait aucune trace de la Cloth mais en supplément, les restes du Bouclier avaient eux aussi disparus. Détestant se faire rouler de la sorte, le Dragon ferma son poing et s’apprêta à l’abattre sur le forgeron mais, une fois encore, son acte fut stoppé par les paroles de sa cible.

« Ta Cloth est désormais réparée. Appelle-la. »

L’armure, réparée ? Difficile à croire. Se jurant de le tuer sans aucune pitié si jamais il lui mentait, Shaokan décida de vérifier par lui-même si sa Cloth était revenue. Ouvrant son poing, le Saint ferma ses paupières et se concentra sur une seule et unique chose : sa Pandora Box. Libérant une légère quantité de son Cosmos, le chinois parvint à ouvrir la boite contenant son armure, reposant à Athènes. Il ne fallut que quelques secondes pour qu’il ressente une sensation familière. Ouvrant ses yeux, il vit alors la Cloth du Dragon revenir, intacte et plus brillante que jamais, et se recomposer sur lui. En quelques secondes, Shaokan le chinois était redevenu Shaokan du Dragon. Seulement, un changement s’était opéré sur son armure par rapport à avant… Un changement qui ne semblait en rien lui convenir…

« Qu... Quoi !? Pourquoi… POURQUOI MA CLOTH EST-ELLE REVENUE À SA FORME INITIALE !?! » aboya Shaokan, laissant déferler sans limite sa rage.

Le Dragon était de retour. Mais pas comme l’espérait son porteur…

« ARKÁS ! C’EST QUOI CE BORDEL !? »

Shaokan n’y comprenait rien. Sa Cloth était belle et bien de retour, mais sous sa forme de base, son aspect le plus fébrile. C’était impossible, inconcevable pour lui… Pourquoi avait-elle cette apparence alors qu’elle était au stade supérieur lorsqu’il avait débarqué au Sanctuaire ? Etait-il redevenu aussi faible que lorsqu’il avait acquis l’armure, à ses treize ans. Avait-il régressé ? Ou était-ce une manipulation de la part du forgeron ? Le Saint ignorait la plupart des réponses, à l’exception de la dernière : Arkás avait l’air aussi abasourdi que lui sur le résultat de la cérémonie. Après tout, l’homme de Jamir avait aussi vu Shaokan porter l’armure à un niveau supérieur, lors du rituel de révélation.

Les autres forgerons ne comprenaient pas vraiment la situation. Pour eux, la cloth du Dragon était réparée et tout paraissait normal. Seuls Arkás et Shaokan savaient que quelque chose ne tournait pas rond. Après une dizaine de minutes à crier dans tous les sens, le Mythique finit par se calmer, bien que la situation l’exaspérait au plus haut point. Il ne cessait de se demander pourquoi il en était ainsi. Athéna l’avait-elle puni pour avoir dégradé l’une de ses créations ? Le chinois en doutait : après tout, il avait sacrifié son identité de Saint pour sauver la vie d’un de ses camarades. Une autre divinité aurait sanctionné son Chevalier pour cela, mais pas Athéna : ce n’était pas son genre. Il en était convaincu. Alors, si Arkás et Athéna n’avaient rien à voir avec tout cela, il ne restait qu’une seule personne sur la liste des suspects : lui-même.

Comme un appel forcé, la Cloth du Dragon lui remémora certains souvenirs. La façon dont il avait obtenu sa protection, son pacte passé avec Trifos et plusieurs autres mauvaises actions de Shaokan depuis qu’il a acquis son armure. Un message s’afficha alors : « 恥辱 ». Etant chinois, il en comprit instantanément le sens : Honte. Puis, un dernier souvenir fit son apparition. Un souvenir étrange car il ne concernait en rien Shaokan : en effet, le protagoniste principal de ce flashback n’était nul autre qu’Hélios, Gold Saint du Lion décédé. Dans ce souvenir, l’asiatique y vit l’homme de Karystos se battre contre son mentor, Trifos et gagner son armure en prouvant à la fois son courage, sa bonté et sa loyauté envers les Saints & Athéna.

Retour à la réalité. Déboussolé par ce qu’il venait de voir, Shaokan s’assit et fixa le sol. Tous ces souvenirs… Le Dragon n’en doutait pas un instant : ils étaient la clé pour qu’il récupère la forme améliorée de son armure. Mais quel rapport avec Hélios ? Cela, il ne le comprenait pas. Cherchant absolument une réponse, Arkás le fit sortir de ses pensées.

« Lorsque ta Cloth est revenue, elle m’a déclaré quelque chose… « Il doit se découvrir ». Je ne sais pas ce que cela veut dire mais… »

Shaokan cessa de l’écouter, comprenant enfin un sens à tous les évènements s’étant produit ces cinq dernières minutes. Fermant son poing droit, le Mythique se releva et fixa intensément le forgeron.

« Je quitte le village demain. Arkás, je risque d’avoir besoin de ton aide. Voilà pourquoi tu m’accompagneras. »
« Et où irons-nous ? » lui demanda le forgeron, intrigue par ce soudain adoucissement de la part du chinois.
« A Karystos. Je dois y découvrir quelque chose là-bas. Je ne comprends pas pourquoi j’ai eu un souvenir de lui mais… Je dois y aller. Pour le savoir. »

Arkás se leva à son tour et n’en demanda pas plus. Hochant la tête, il donna ainsi son approbation à Shaokan pour l’accompagner. Une quête, hein… L’armure du Dragon était joueuse. Soit. Le Mythique relevait le défi. Mais plus qu’un challenge, sa Cloth semblait vouloir qu’il sache quelque chose au sujet de lui, quelque chose qu’on lui a caché. Son armure… Hormis Elias, voilà la chose à laquelle il accorde le plus de confiance. Et si elle voulait le conduire à Karystos… Ce n’était pas sans bonne raison. Et effectivement, Shaokan n’était en rien éloigné de la vérité…