Le regard levé vers un plafond invisible tant la noirceur régnait tout autour de lui, le plus jeune des frères s’avançait avec précaution, tous ses sens en alerte, essayant de percer l’obscurité de la salle. Il ne s’éloignait pas du couloir que formait les immenses statue qui l’encadrait et le guider jusqu'à sa destinée. Qui sait ce qui pouvait se cacher dans cette ombre… Effleurant rapidement la garde de sa courte épée, il se rassura du léger battement qu’elle effectuait contre sa cuisse à chacun de ses pas et laissa le plus naturellement pendra sa main à côté, prêt à saisir sa lame si un quelconque danger se faisait ressentir.

Il continua ainsi sa route, jusqu'à parvenir devant une immense statue qui surplombait toutes les autres. Il sentit au fond de lui un tressaillement, reconnaissant l’effigie de Mars, Dieu de la Guerre. Il s’arrêta un instant, contemplant la pierre froide et se demandant au final ce qu’il faisait là, pourquoi déjà avait-il choisit de venir en ce lieu? Tout se mélangeait dans sa tête, la mort de son Maître d’Arme qu’il avait du tuer, l’assassina de son père par ses frères, qu’il avait consciencieusement aidé d’ailleurs. Et la venue de cet être plus qu’étrange qui semblait receler la même puissance dont son père avait fait preuve, ou non, pas la même…plus, beaucoup plus puissante il le sentait au plus profond de son être. Ephtal comme il s’était présenté n’était pas à prendre à la légère, et surtout avec nombre de précautions, qui savait ce qu’il leur voulait réellement…

Se résolvant finalement à baisser le regard, ses yeux émeraude tombèrent sur deux silhouettes identiques…Primus et Pardos, ses deux frères ainés. Son hésitation put se sentir alors qu’il restait planté là. Avait-il vraiment le droit de se tenir à leur côté, d’égaux à égaux? Il ne savait que penser et resta où il était, observant ses frères faire preuve d’un respect qui lui était étranger et dont il ne connaissait rien. On ne lui avait apprit qu’a courber la tête quand il était jeune, et à ne jamais fléchir l’échine lorsqu’il était plus grand. Le jeune homme ne savait donc quel comportement adopté, devait-il à son tour s’agenouiller devant cet homme imposant, ou rester droit et fier et comme maintenant? Vraiment, qu’était-il venu se perdre en ces lieux insolites?

Jetant un regard derrière lui sur cette porte qu’il ne voyait déjà plus, il savait qu’il était déjà trop tard, il ne pouvait plus faire demi-tour, à moins de vouloir la mort. Il avait accepté de les suivre, il ne lui restait plus qu’a assumer son choix. Et lorsqu’il reposa ses yeux sur la statue du Dieu, puis sur ses frères, il sut qu’au final, il n’y aurait jamais d’autre place que celle-ci pour lui. Parce qu’il n’était pas fait pour le monde extérieur, il n’avait jamais connu que le combat, la violence et le sang. Mars l’accueillait en ses rangs, c’était une opportunité qu’il ne pouvait se permettre de laisser passer. Alors, avec certes encore un peu d’hésitation, mais une résolution nouvelle au fond des yeux. Il était décidé à gagner sa place ici, et un jour à devenir l’égal de ses frères. Mais pas pour le moment, il n’en avait pas encore le droit.

Il vint donc s’installer sur le côté, mais plusieurs pas en retrait, signifiant par-là son infériorité, il n’était que le cadet. Néanmoins il ne savait toujours pas s’il devait s’agenouiller malgré tout… Il opta donc pour rester droit sur ses jambes, mais baissant légèrement la tête, assez pour ne pas provoquer, mais pas trop afin de garder un œil sur leur "accompagnateur". Un mélanges de différents sentiments l’animait alors ses yeux se posait sur la silhouette blanche, respect, peur, admiration, anxiété… Il ne savait que penser de cet homme; et si au final ce dernier ne souhaitait rien d’autre que les tuer?

La queue recourbée entre les jambes, les oreilles plaquées en arrière, l’arrière-main basse pour éviter les coups, les yeux exorbités se fixant sur tout ce qui bougeait, et les sursauts à chaque bruit qui résonnait à ses oreilles… Il n’était pas bien difficile de décoder le langage corporel d’un loup, tout comme il n’était pas difficile de comprendre celui de ce jeune Berserker; il suintait la peur à des kilomètres à la ronde. Ses yeux agrandis et fixé sur la silhouette imposante qui se levait et s’avançait vers eux, sursautant à chaque fois que la faux raclait le sol, attendant la suite avec appréhension. Et elle ne fut pas longue à attendre alors que la lame de la faux se pointait dans sa direction, le faisant reculer d’un pas, aurait-il été un véritable loup qu’il aurait émit un grognement de peur…

Puis l’injonction tomba, nette et précise, ne lui laissant d’autre choix que la mort ou l’obéissance. Il n’était pas encore assez fou pour appeler ainsi la mort, aussi avança-t-il finalement de quelques pas, timidement mais sûrement. Après quoi il suivit la direction que lui intimait le Prophète, observant à nouveau cette immense statue, mais avec plus de curiosité cette fois, avant de baissé à nouveau la tête alors que la voix tonitruante de leur supérieur lui parvenait à nouveau et il concentra de nouveau son regard sur lui, se maudissant intérieurement de l’avoir quitté des yeux plus d’une seconde.

Ce qu’il ressentait? Pas grand-chose en fait, mais il se doutait que ce n’était pas la bonne réponse à donner, d’ailleurs, aucune réponse n’était attendu il en était sûr. Toute son attention était accaparée par l’immense silhouette qui était devant lui et il ne parvenait vraiment à se fixer sur autre chose. Néanmoins, il sut ce qu’on attendait de lui, et ses yeux divaguèrent un court instant sur les silhouettes de ses deux frères ainés. Etait-il capable de faire preuve du même respect qu’ils semblaient témoigner à cette statue –ou était simplement à cet homme imposant? Quoiqu’il en soit, s’il ne ovulait pas mourir prématurément, il lui fallait abdiquer pour le moment, aussi finit-il à son tour par s’agenouiller –mais jamais à la même hauteur que ses aînés, toujours un pas de plus en arrière-, adoptant la même posture que les jumeaux. A la seule différence peut être qu’il bandait tous ses muscles, prêt à bondir pour échapper à un quelconque danger. Mais même ainsi, la tête basse, il gardait ses yeux relevés et fixé sur l’homme qui les avait amenés ici, suivant toujours le moindre de ses mouvements. Il serait facile de le faire obéir, mais pourrait-il seulement être apprivoisé?

Se tendant encore un peu plus alors que le cosmos du Seigneur actuel s’élevait dans la pièce, invoquant trois rais de lumières rougeâtres qui, lorsqu’elles s’estompèrent, laissèrent apparaître trois totems d’animaux. Le jeune blond les reconnu aussitôt, c’étaient exactement les mêmes que celle qui leur étaient apparut le jour de l’assassinat de leur père. Mais loin de se concentrer sur les deux autres, son regard était captivé par la forme de l’oiseau de proie, un Grand Duc représenté dans toute sa splendeur. Le roi des Forêts, celui dont le vol silencieux lui permettait de fondre sur ses proies et de les tuer en un coup. Pourrait-il devenir aussi meurtrier que cet oiseau? En tout cas il le souhaitait, être aussi impitoyable que ce chasseur.

Avec lenteur, il se releva, les yeux fixé sur la Cuirasse, et s’approcha à pas lent et mesure, comme s’il craignait de l’effrayer. Avec ce qui semblait être de la tendresse, il tendit le bras et vint caresser le bec de l’oiseau qui éclata aussitôt, laissant échapper un vent frais et doux, puis vint le recouvrir dans une caresse légère. Aussitôt il se sentit…bien, comme s’il était enfin complet, qu’il venait de retrouver une chose qu’il avait perdue depuis bien longtemps et qu’il venait de retrouver avec grand plaisir. Il se sentait presque invincible, capable de relever tous les défis. Un doux sourire vint détendre son visage un court instant, le faisant rayonner l’espace de quelques secondes, avant que la bulle ne se brise et qu’il ne pose à nouveau ses yeux émeraudes sur le monde réel qui l’entourait –même s’il lui arrivait encore de se demander si tout ceci n’était pas un simple rêve ou simplement le fait de son imagination.

Sa main gauche vint de nouveau effleurer la garde de sa courte épée, comme pour se rassurer, alors que ses yeux voguaient de ses frères à Ephtal. Et maintenant, que devait-il faire?