— Bach, je te dois des explications…

La neige froide et pure disparut peu à peu, les paysages glacés du domaine d’Asgard s’effacèrent pour laisser place à des endroits plus chauds. Nous sentions la différence, et malgré que la glace soit mon élément de prédilection, un peu de chaleur ne pouvait faire de mal à personne. Je posais un instant la box de mon armure, observant devant nous, le Sanctuaire était en vue. On pouvait distinguer une colline abrupte, derrière laquelle se cachaient les onze maisons des Saint, ainsi que la maison du Grand Pope. Nous devions faire notre rapport à ce dernier, et je devrais m’expliquer de ma non-participation aux événements d’Asgard. Je supposais que des combats eurent lieu ici aussi, encore quelques pas et nous découvrirons cela.
Je manquais de tomber à la renverse, bien que mon visage ne traduise aucunes émotions. La maison du Bélier était totalement ravagée, détruite de parts en parts. Alpharius avait dû combattre avec rage et puissance, et je mettais ma main à couper qu’il n’avait pas été le seul à combattre. J’observais ma maison avec soulagement, elle n’avait pas subit beaucoup de dégâts, seulement quelques dommages collatéraux. Je me retournais vers Bach, il était temps de m’expliquer.

— J’ai fait une rencontre au col d’Yggdrasil, l’un des deux Marinas était en fait un ami de longue date que je ne pensais jamais revoir. Ce fut un choc pour moi… Et le temps de vous rejoindre, le combat était déjà fini… J’espère que tu ne me tiendras pas rigueur de cette faute, je pense que le Grand Pope s’en chargera de lui-même, mais nous avons dorénavant un contact dans l’armée de Poséidon, à moi de bien jouer… Me comprends-tu Bach ?

Je laissais un instant pour le chevalier du Taureau, j’espérais sa compréhension. Je n’avais que faire des avis de mes compagnons, je n’avais foie qu’en Athéna, mais garder une bonne entente au sein du Sanctuaire et une cohésion d’équipe était essentielle pour garder notre suprématie. Mon regard se porta de nouveau sur la maison complétement détruite du Bélier.

— Nous devrions nous rendre dès maintenant au Temple, en plus de faire notre rapport, j’aimerais savoir ce qu’il s’est passé ici.

Des explications ? À moins qu'il en ait de bonnes, il pouvait se foutre ses explications où je pense, tout était clair pour ma part. Le voyage depuis Asgard s'était révélé bien plus rude qu'à l'aller, le froid s'incrustant à l'intérieur de mes plaies à découvert, les autres, bien que soignée et à l'abri, continuait de me rappeler qu'elles ne s'étaient pas envolées miraculeusement. D'humeur massacrante tout le long du trajet, chose que le Chevalier du Verseau avait sans aucun doute compris, nous n'avions presque pas échangés de paroles. Je n'étais pas disposé à le faire, pas pour l'instant tout du moins. Car une fois de retour chez nous, une fois le Sanctuaire en vue, tout devint plus calme. La joie de revenir chez soi suffisant à dissiper ma mauvaise humeur, je laissais s'installer un maigre sourire sur mes lèvres, avant de presser l'allure. Ce n'est qu'aux pieds de la longue série d'escaliers menant aux différentes maisons des Gold Saint qu'enfin, cette interminable calvaire pris fin. Laissant lourdement ma box au sol, je m’étirais lentement, un soupir de soulagement ne manqua pas de s'échapper, tandis qu'Aétios semblait ne pas vouloir perdre de temps.

Je ne lui répondis pas directement, constatant avec désolation les ruines qu'était la maison du Bélier. Détruite entièrement, une preuve bien réelle que mes craintes étaient fondées, le Sanctuaire lui aussi, avait dû subir le courroux des Titans. À en juger les dégâts, ces êtres divins n'y sont pas allés de main morte dans la destruction. La demeure du Capricorne également n'était guère dans un meilleur état, bizarrement, les autres ne semblaient pas avoir souffert des combats. Les affrontements ont certainement dû être concentrés dans ses deux points en particulier, d’où le triste sort des deux demeures. Ne restait plus qu'à espérer que les deux propriétaires ne soient pas dans un état aussi lamentable, perdre deux Gold Saint d'un coup serait dur à avaler. Pour l'instant le pire n'était pas envisageable, cependant, après avoir assisté impuissant, à la mort de l'Ases, l'idée qu'il y ait des morts à déplorer n'était pas à exclure. Déjà, ma mine s'assombrissait, plus sévère, l'idée de n'avoir pu apporter mon soutien aux autres Chevaliers m'agaçait. J'espérais que chacun de mes élèves soient encore en vie, ma maison n'étant pas abîmée, ils devaient avoir pu trouver refuge à l'intérieur sans crainte.

Du moins, je l'espère... Chassant ses pensées néfastes, je me retournais vers Aétios, jusqu'à présent ignoré, en quelque sorte. Le comprendre ? Difficile de faire ce qu'il me demande. Comprendre qu'il a préféré bavarder avec un ami perdu de vue, à présent au service du Dieu des mers et océans, plutôt que de venir épauler un frère d'arme ? Non parce que me sortir qu'il était arrivé trop tard, j'en avais rien à foutre. S'il s'était bougé le cul dès le départ, il n'aurait pas manqué de temps, j'en suis certain. Qu'il possède désormais un allié au sein des rangs ennemis, idée que je considère comme débile au passage, n'étant pas admiratif de ce genre méthode, n'expliquait en rien son manque de réaction. Nos regards se croisèrent un instant, plus froid que jamais, le Verseau devait bien comprendre que je ne cautionnais pas ce qu'il avait fait là-bas. Qu'il puisse de la sorte, reconnaître un ennemi comme son ami, qu'il perde son temps à discuter du bon vieux temps plutôt que de répondre à son devoir, tout cela me foutait en rogne. Le poing serré, je réprimais l'envie de lui exprimer ma façon de penser à coup de poings dans la tronche.

- Aétios... ne me demande pas de comprendre ce que tu as bien pu foutre avec un Marinas là-bas. Ils ne sont pas nos alliés, ils l'ont déjà prouvé par le passé, durant les précédentes Guerre Sainte. Ils représentent une menace pour Athéna, pour le Sanctuaire. Deux choses qu'un véritable Chevalier doit faire passer avant toute chose. Des retrouvailles avec un vieil ami, hein ? Cela faisait-il partie de la mission confiée par le Grand Pope ? Je ne pense pas... Je te laisse le soin de discuter de tout cela avec lui, je me contenterai de parler uniquement de la mission et de ce qui a été fait dans son sens.

Les choses étaient claires désormais, tout aussi désireux de savoir en détails ce qu'il s'était produit pendant notre absence, je reprenais ma box et la plaçait sur mon dos. Et tandis que je commençais la longue ascension jusqu'au Temple, j'adressais une dernière parole au Verseau.

- Je ne t'en veux pas pour autant, si c'est ce que tu voulais savoir. En tant que Chevalier d'Athéna, tu restes un ami, un frère d'arme à mes yeux. Que tes actions me déplaisent, ou pas.