Tu n'as pas de pitié à réclamer et tes larmes ne serviront à rien... Tu n'es qu'un pion, totalement dénué d'intérêt si tu ne me dis pas ce que je veux entendre. Et dois-je t'expliquer à nouveau ce qu'il va t'arriver si tu ne m'es d'aucune utilité ?
Non ! S'il vous plait ! Je ne sais rien !
Sans doute, oui... Mais je ne peux pas en être certain tant que je n'aurai pas suffisamment gratté la surface...

La lame de sa faux vint infliger une nouvelle taillade sur le torse de l'homme. Une diagonale tracée avec lenteur, qu'il puisse apprécier la douleur à sa juste valeur. "Gratter la surface". Le Cardinal de la Mort était pour le coup très "premier degré". Ce ne fut là qu'une zébrure de plus s'ajoutant aux autres, presque parfaitement parallèles. Et l'homme ne pouvait rien faire pour l'éviter, cloué à un mur de l'antichambre du Feu par des faucilles de cosmos plantées dans ses poignets et chevilles, les membres dirigés en un semblant de X. Qui est ce martyr ? Ephtal ne s'est pas donné la peine de lui réclamer son nom. Il n'est qu'un simple garde d'Athéna, dont le Prophète essaye d'extirper quelques informations. En trop mauvais état lorsqu'il l'avait ramené, un prêtre d'Arès s'est chargé de le soigner assez que pour qu'il puisse être torturé. Le prêtre est toujours non loin d'ailleurs, manière de garder le soldat assez longtemps en vie. Une nouvelle droite est tracée à même la peau de sa victime sans qu'il n'ait posé la moindre question depuis la précédente. L'homme n'hurle plus si fort, commençant à tourner de l'oeil.

Parle et mets fin à tout ceci : où se trouvait le Grand Pope ? Quel genre de technique possède-t-il ? Réponds !
Je l'ignore ! Je... Je... Je ne sais pas !

Voix plaintive entrecoupée de sanglots. Le prêtre s'approche, s'attendant à devoir le soigner à nouveau, mais un signe de tête d'Ephtal l'en dissuade. Il a une meilleure idée... Il tape du bout de sa faux contre le sol poussiéreux de son antichambre, déclenchant la naissance de flammes sur l'ensemble des parois de la pièce. Une odeur de viande grillée émane instantanément de sa victime et ses hurlements redoublés s'adjoignent aux crépitements des flammes. Le feu s'éteint un couple de secondes plus tard, laissant le garde lâcher un semblant de phrase qui ressemble plus à une série de borborygmes humides émanant de sa gorge. Son dos fumant grésille toujours un peu...

Fais un effort voyons... Pas étonnant qu'Athéna soit à la dérive si ceux qui la protège sont si faibles qu'ils ne parviennent même plus à articuler après une simple petite récréation...
J'sais rien... rien... rien...
Hmm... Oui, d'accord... Disons que je te crois ! Ne me reste plus qu'à user de ton existence comme bon me semble !

Un signe de tête au prêtre, qu'il use de ses soins. Le bourreau n'avait pas envie que cela s'achève trop rapidement, souhaitant que son jouet tienne jusqu'au bout ! Quelques taillades supplémentaires qui vinrent s'ajouter encore avant que de ses doigts il aille arracher les longs lambeaux de peau, un à un. C'était un bel ouvrage, la plupart des lanières ainsi créées restant entières. Le visage de l'homme n'était plus que souffrance, et les filets de sang qui glissaient le long de ses lèvres ne faisaient qu'ajouter à la flaque purpurine déjà bien étendue à leurs pieds et nettement visible malgré la pénombre de l'endroit. Mais la récréation touchait à sa fin... Une sensation bien reconnaissable s'insinue jusqu'au plus profond de son abdomen. Un appel de son maître qu'il ne peut ignorer. Mais il ne peut pas non plus laisser ce labeur inachevé. Sa main vient englober le visage de sa victime. L'instant d'après, il déclenche son Soul Possession, aspirant son âme et ne lui laissant dans son état aucune chance de survie. Les faucilles disparaissent et le corps retombe mollement dans un impact moite. Se retournant alors vers le prêtre, il lui donne ses dernières directives.

Laisse là ce cadavre. Il fait désormais partie de mes trophées. J'aimerais par contre avoir un autre souvenir plus particulier dirons-nous. Emporte donc ces lambeaux, et vois s'il t'est possible d'en faire... une relique commémorative ? Je pense qu'un fouet serait particulièrement adapté ! Que le torturé devienne un instrument de torture... n'est-ce pas là une forme ultime et parfaite de réminiscence artistique ?

De la voix grave et rocailleuse du Prophète, cette ironie faisait froid dans le dos. Mais le prêtre ne se contenta que de hocher du chef. Cette caste ne parlait jamais, ayant fait voeu de silence dans son intégralité. À présent que cela était entendu, il n'y avait plus à rester là.
L'amusement était terminé. La partie sérieuse allait débuter...


Il ne fut pas étonné lorsqu'il pénétra en le Temple d'y voir Arès, assis dans le trône d'obsidienne. Cela ne faisait que quelques heures qu'ils étaient rentrés du Sanctuaire. Leur Maître avait dû considérer qu'il y avait eu là largement assez de temps pour que les Cardinaux récupèrent assez de leurs forces pour pouvoir passer au compte-rendu... La divinité du carnage devait avoir déjà connaissance du verdict. Il ne pouvait pas ignorer que le succès n'avait pas été au rendez-vous avec une folle évidence. Mais il souhaiterait sans doute connaître la situation plus en détail, et ce de la bouche de ses quatre Généraux. Ephtal s'approcha assez, faux en main, pour s'arrêter à un trio de mètres de l'estrade. Là, il posa un genou en terre et s'inclina jusqu'à ce que son torse ne se trouve qu'à deux doigts de son avant-bras, lui même posé contre son genou surélevé. Sa main libre de son arme était refermée en poing, appliquée contre sa poitrine. Le regard baissé, en déférence envers son seul et unique maître.

Mes respects et hommages, mon Maître...

Mais celui à qui il s'adressait ne répondit pas, préférant sans doute attendre que tous soient là avant de s'exprimer. Ephtal ne fit qu'attendre alors, gardant la même position...

Le sortant de sa torpeur, une sensation de puissance plus ou moins étrangère s'imposait à lui, l’empêchant pendant ce laps de temps de continuer ses vaines réflexions. Les paupière du Cardinal s'ouvrait instantanément alors qu'il comprenait le message ; Cela ne venait pas du Prophète et pourtant, sa cuirasse semblait réagir avec empressement face à cet appel. Le même genre de prise de contact que se permettait le Flamboyant avec les soldats de son armée, un classique certes, mais un classique qui cette fois-ci appartenait à une entité supérieure et ça, il ne tarderait pas à le découvrir. Quittant son trône de ronces puis intensifiant instinctivement l'acide brouillard qui occupait son Antichambre, il se dirigeait sans plus attendre vers le lieu dédié au culte de la destruction.

Après une marche brève, l'homme à la chevelure écarlate passait le seuil de la porte débouchant sur le Temple. La réaction du nouvellement promu ne se fit pas attendre alors que son regard passait immédiatement de la Mort, un genou à terre, à l'imposant trône d'obsidienne ou l'incarnation même de la statue était installé. C'est à dire Arès, qui d'autre ? Tant l'aura émanant de ce dernier que l'attitude d'Ephtal confirmait cette pensée et, il adoptait donc une attitude en conséquence avant même de chercher à répondre aux nombreuses questions qui s'insinuaient dans son esprit. Rejoignant son supérieur, il s’arrêtait légèrement plus tôt que ce dernier pour respecter malgré cette scène nouvelle la hiérarchie habituelle, puis adoptait une position similaire -autant que sa cuirasse lui permettait de souplesse- en direction de la divinité guerrière.

Maître, quel honneur... Je vous salue avec le plus grand respect.

Préciser son titre était bien inutile face à Arès, mais si Casshern ne savait pas spécialement comment lui rendre hommage par les mots en cet instant il espérait montrer malgré tout suffisamment de dévouement envers celui-ci. Figé dans cette posture en hommage à la déité, il songeait un instant à sa mission passée en Egypte il y a de cela bien longtemps déjà... Alors comme ça l'incarnation de son maître s'était déjà déroulée en secret. Depuis quand ? Si une telle chose le comblait en tant que Cardinal et fervent serviteur de l'armée de la destruction, cela l'étonnait encore de ne pas avoir été mis au courant moins tardivement.

Une Citadelle a l'abri des regards, une armée capable d'effectuer des frappes chirurgicales de grande envergure et le Dieu de la guerre lui même pour en gérer l'impact sur terre ; La Pestilence souriait un instant. Si des doutes avaient pu l'envahir, sa foi risquait fort de se voir grandement revigorer maintenant que le représentant même de ce pour quoi il livre bataille se tenait devant lui...

Des tréfonds de son antichambre, Guerre avait ressenti à nouveau « l’appel » mais son intensité était elle qu’elle ne pouvait signifier qu’une chose. « Il » réclamait leur présence, il ne s’agissait plus de Mort réclamant la présence de ses généraux, mais bel et bien d’Arès en personne convoquant ses cardinaux. On ne pouvait absolument pas se permettre de faire attendre une telle puissance, aussi Guerre se lança immédiatement dans le dédale de couloirs menant au trône d’obsidienne. Rentré depuis peu, son armure portait encore le sang séché du dernier Ase qu’il avait mis à mort mais le voyage et le givre qui pouvait recouvrir son métal, que cela soit à son initiative ou bien au gré des conditions extérieures semblait en avoir toutefois supprimé l’odeur.

Les corridors furent le moyen pour le Cardinal de se remettre en question, d’essayer de se préparer à l’éventuelle colère de son dieu. Son expédition dans les lointaines terres du Nord avait été, selon lui, un franc succès : les défenses du Temple avaient été éradiquées, il avait mis à mort avec l’aide des Marinas deux Ases sous les yeux de leur Seer, avant que ce dernier ne prenne la fuite, trop lâche pour affronter la mort qui lui tendait les bras. La mission qui lui avait été confié avait donc été accomplie haut la main : soutenir le bras vengeur de leurs alliés et jauger les forces du dieu Odin.

Toutefois, le Cardinal n’était pas serein, c’était sans doute du au fait qu’il redoutait par-dessus tout l’immense puissance d’Arès, et le Cosmos qu’il détectait au sein de la citadelle brillait tellement qu’il risquait à tout moment de faire disparaitre tous les autres sous son joug. Il était le Cardinal de la Guerre, et lui était le Dieu de la Guerre, il était son absolu, le dépassait, l’écrasait. Même s’il était dans un sens plus vieux que lui, de par la moitié non-humaine de sa personne, leur puissance n’était absolument pas comparable. Le Cardinal allait être en présence de quelqu’un qu’il n’égalait pas ou ne dominait pas, et cela faisait naître en lui un soupçon d’angoisse auquel il n’était absolument pas habitué.

Un frisson glacé parcourut son échine au moment même où il pénétrait dans la salle du Trône, devant ce dernier, Mort était agenouillé dans un geste de dévotion sans pareille. Alors qu’il marchait au sein des claquement métalliques de sa lourde armure, Guerre n’osait relever sa tête privée de son heaume sur « Lui », il était un Dieu, il n’était pas digne de commettre un tel acte. Ses pas s’arrêtèrent derrière son Prophète, pour qu’il s’agenouille à son tour. Son dos était tout aussi proche du sol que son prédécesseur, tandis que Guerre mis un poing au sol pour retenir le lourd poids de son armure. Ses longs et immenses cheveux platines côtoyaient le sol alors que résonnait sa voix :

- Loué soyez vous, mon seigneur et maître …

Il avait pris position derrière Ephtal, car même s’il ne pouvait être que des Cardinaux aux yeux divins de leur interlocuteur, il ne restait malgré tout qu’un simple général pour son Prophète, il ne pouvait figurer au même rang que lui. A ses côtés se trouvaient d’ores et déjà recueilli Casshern, le nouveau Cardinal de la Pestilence dont les cheveux rougeoyaient tout autant que ceux de Guerre pouvaient être pâles. Quant au rapport du Général de l’Armée des Flammes, il était là, ancré dans son Cosmos, fort de souvenirs tout aussi frais et plaisant que les visages des Ases abandonnant le monde des vivants ou bien le sang tâchant la neige immaculée dans une myriade tons déclinant de la couleur d’un tel nectar. Ils n’attendaient qu’à être cueillis …

Les Cardinaux arrivaient un à un dans le Temple et présentaient tous leurs hommages à Arès. Ce dernier n'avait toujours pas dit le moindre mot, ne répondant à aucun d'entre eux. Au moins, tous s'étaient inclinés comme ils se devaient de le faire. S'il n'avait pas eu de doute à ce sujet sur Pestilence et Guerre, il se souvenait aussi des remontrances qu'il avait déjà pu faire à la Famine et se trouvait donc rassuré qu'elle ait su adopter la bonne attitude. Un moment de flottement où aucun des quatre généraux ne s'avance à prendre la parole qui est toute réservée au Dieu de la Guerre. Et puis finalement, le silence est tranché par la voix qui fut celle de Phobos...

Alors ? Qui se dévoue pour être le premier ?

Il n'y avait pas de questions à se poser, tant il se trouvait évident que l'attaque était le sujet qu'Arès souhaitait voir aborder. Il n'y a aucune raison autre que celle-ci pour laquelle il aurait pu appeler à lui ses quatre Cardinaux en ce jour. Bien sûr, le Prophète se dévoua alors tout en relevant la tête. Ce n'était pas chose habituelle qu'il s'adresse à Arès en restant genou à terre, mais il se devait ici de montrer l'exemple aux autres Cardinaux.

Ce fut un échec, mon Maître. Les nôtres se sont bien battus, mais nous étions trop peu et-
Tu as été vaincu...
Oui... J'ai bien peur que désormais ma réputation ne me précède, et que j'en sois donc devenu une cible privilégiée et-
Ne te cherche pas d'excuses ! Une défaite reste une défaite !
Oui Maître...
Poursuis !
Nous étions donc trop peu nombreux. Si seulement cet Orpheus ne s'était pas mis en tête d'aller châtier les chiens d'Asgard, nos forces combinées auraient fait tomber sans mal le Sanctuaire d'Athéna.
Pourquoi avoir attaqué tout de même alors ?
Mon Maître... C'est vous qui-
Moi qui quoi ? Tu vas encore rejeter la faute sur un autre ? Sur moi cette fois, c'est cela ?

Le Prophète inclina de nouveau la tête. Les mâchoires serrées, il n'ajouta rien. Arès avait voulu que cette attaque ne soit pas reportée, et lui-même d'ailleurs était de cet avis, ne pensant pas qu'ils seraient stoppés si tôt, sans doute trop confiant. Que pouvait-il répondre à présent ? Confirmer que tout ça était de la faute d'Orpheus et que de toute manière Arès lui-même n'avait pas laissé d'autre choix possible ? Ce ne serait que lui donner raison en rejetant la faute sur d'autres. Il avait lui aussi sa part de responsabilité, il ne l'oubliait pas. Mais quoi qu'il en soit, il ne souhaitait pas se lancer ici dans un débat avec le Dieu de la Destruction. Ce ne serait pas donner une bonne image aux autres que de jouer au fier face à leur maître tout puissant.

Et vous autres alors ?! Qu'avez-vous à me raconter ?

Le signe de soumission du Prophète semblait apparemment suffisant à Arès pour qu'il s'intéresse aux autres Cardinaux, qu'il leur réclame leur récit plutôt que de poursuivre avec celui qui était déjà accablé...

A mesure que la brève discussion entre Arès et le Prophète progressait, les battements de cœur de Casshern s'intensifiaient. S'il avait déjà craint certaines réactions de la part d'Ephtal, voir ce dernier se faire dominer dans cette situation si particulière sans pouvoir s'exprimer clairement transférait -dédoublait même- les inquiétudes de la Pestilence lorsque le Dieu de la destruction s’intéresserait à leurs cas. Prenant une discrète inspiration pour récupérer son sang-froid, il décidait de prendre la parole alors que les mots brusques de la divinité attendaient une réaction de la part des cardinaux. Redressant sa tête sans la moindre hésitation après avoir effacé ses émotions, il élevait donc la voix pour apporter le compte rendu de son armée.

Hm. L'armée de la Terreur a accompli sa mission sur tout les fronts ; Deux chevaliers sont tombés sous nos coups à la bataille du Sanctuaire et le fléau qui est votre a corrompu ces terres maintenant désolées.

Les images des ruines et des corps pratiquement ensevelis par les ronces lui revenaient, mais également la vision de Jevren ayant échappé de peu à la mort par ses soins. La victoire avait donc été totale de son point de vu, ce dernier s'en étant remis bien rapidement après avoir échappé à l'inconscience.

L'un de mes soldats envoyé à Asgard est également revenu après victoire sur l'ennemi, mon Seigneur. Je ne déclare donc aucune perte réelle lors de cet assaut.

Sans savoir l'importance qu'Arès accordait aux conflits du Nord, l'homme à la chevelure écarlate ne manquait pas de taire toutes les informations en rapport avec son armée. Bien que l'idée de mettre ses troupes en avant ne quittait pas son esprit, il profitait donc de la bonne réussite de celles-ci pour légitimer cet éloge. Des victoires et aucunes pertes, il espérait évidemment que ces nouvelles conviennent à son Maître. Mais un autre détail lui revenait soudainement à l'esprit, plus récent celui-ci et surtout moins... satisfaisant. Il n'avait pas encore eu le temps d'en parler au Prophète et l'information tombait donc pour la première fois.

Autre chose... L'un des chevaliers d'or filait l'arrière garde de notre armée sur le chemin du retour. Un homme portant le nom de Kallas, des Gémeaux, bien qu'il semble prôner le culte de la destruction tout autant que nous. Un détail dont se moquait peut-être les autres, mais peu importe. Ma lame l'a sous-estimé au moment du coup de grâce, non... J'ai fauté. Et bien que lui même n'était plus en état de se battre, il est malgré tout parvenu à disparaître dans un étrange portail.

Casshern baissait un instant le regard, craignant que la connaissance de cette information lui retombe dessus. Au moins avait-il brisé la recherche du Saint qui ne s'était donc pas rendu plus loin qu'il ne l'était déjà, mais cela n’empêchait qu'il était reparti avec une connaissance approximative du territoire berserker. Les plaines balkaniques étaient grandes et les portes d'obsidiennes bien cachés, mais des recherches approfondies de la zone n'étaient pas à exclure de la part des ennemis.

Dans le doute, j'ai donc brouillé les pistes en changeant ma destination. Mais sa présence cosmique s'était tout simplement évanouie... mes talents de pisteur n'étaient pas à la hauteur pour en découvrir plus. J'en suis sincèrement désolé Maître...

La Pestilence reprenait son attitude initiale, visage baissé et le corps profondément incliné en signe de dévouement. Son rapport ne pouvait-être plus complet, et si ses dents grinçaient encore lorsqu'il songeait à cette faiblesse dont il avait fait preuve face à Kallas, il espérait au moins ne pas avoir déçu le Maître de la guerre...

Le Dieu de la Guerre semblait être froissé, il était donc de bon aloi de ne rien faire ou dire pour ne pas attiser un tel courroux divin. Le malaise était dû au fait de pouvoir trouver l’équilibre délicat entre occulter la vérité et mentir. Vu l’attitude d’Arès envers le Prophète, Guerre parvint même à douter de son bilan qu’il jugeait plus que positif. Toutefois, sachant pertinemment que le temps jouait contre lui, le Berserker passa immédiatement à son compte rendu sans se faire davantage de nœuds au cerveau.

Il se redressa légèrement, le genou toujours posé contre le sol, mais ne pouvant toujours poser les yeux sur son Dieu en guise de dévotion, aussi ces derniers fixaient inlassablement la base du trône sur lequel son Seigneur était assis. Au fur et à mesure qu’il racontait son histoire, les images du combat défilaient devant ses pupilles immaculées :

- L’Armée des Flammes a rempli sa mission avec brio en Asgard, mon Seigneur, nous avons prêté main forte au bras vengeur de nos alliés. Le Seer a été défait et j’ai personnellement ôté la vie de deux des Ases d’Odin. Leurs défenses ont été éradiquées et nous n’avons plus eu qu’à nous retirer pour laisser aux hommes de Poséidon le soin de laisser libre cours à leur vengeance, y compris dans le Temple.

Il était maintenant temps d’aller plus loin, d’aller au-delà d’un simple rapport, n’importe quel sous-fifre était capable d’un tel exercice, mais les plus values d’un Cardinal résidaient par exemple dans le fait d’être à même de pouvoir livrer une analyse :

- Odin a péché par sa faiblesse, comme si le fait d’être tant isolé du monde qu’il l’est signifiait être à l’abri de toute menace. Cela aurait pu être le cas s’il n’était pas allé fouler du pied un nid de frelons. Ses hommes n’étaient pas au niveau et l’ampleur de leur défaite en est un parfait symbole.

Guerre fit une pause, en espérant de tout cœur que les dernières choses qu’il s’apprêtait à dire ne viennent pas à bout de la patience divine de son interlocuteur.

- La puissance des Marinas, elle, est bien réelle. Et outre des aspects purement quantitatifs, c’est avant tout la force de leur volonté qui est un de leurs plus grands atouts. J’ai vu de simples soldats se battre comme des lions, accomplissant des prodiges avec leur Cosmos qu’il est difficile de concevoir pour des hommes de leur rang. Leur propre volonté, leur détermination, le charisme et les qualités de meneur du Légat Orpheus sont redoutables. Ces … alliés sont puissants.

Le Cardinal avait fait exprès de marquer un petit temps mort avant de prononcer le terme d’alliés, d’une part parce que le stratège qu’il était savait reconnaitre la valeur de l’allié en tant que tel, mais également parce que l’homme, ou plutôt l’armure d’expérience qu’il était se méfiait d’une trop grande puissance de ses amis. Il redoutait qu’un jour tout cela puisse exploser aux visages des Berserkers sans que ces derniers puissent réagir, trop attendris par une trop grande proximité et un manque d’attention logique tout en étant fatal. « Sois proche de tes amis et encore plus de tes ennemis », voilà un adage qui prenait tout son sens et qui pouvait donner matière à réflexion pendant un moment.

Toutefois, il était encore impossible de dire si Guerre avait laissé volontairement une telle subtilité pour les mêmes raisons qu’il venait de citer ou bien parce que la force avérée de ses alliés pouvait lui promettre un combat magnifique si jamais il devait un jour les affronter. Voila l’une des reflexions tout à fait typiques qui pouvait lui passer par la tête. En revanche, le mystère était tel que si un jour son histoire était contée, un personnage omniscient tel qu’un narrateur n’aurait pu savoir à ce moment précis quelles étaient réellement ses intentions.

Les yeux du Cardinal revinrent fixer le sol, avec la prière muette, adressée à celui qui lui faisait face, de ne pas l’avoir vexé.

Casshern fut le premier à s'exprimer. Le plus récent Cardinal, ayant pris la place de son plus ancien élève en tant que Pestilence. Il relata alors ce qu'Ephtal savait déjà. Jevren et lui avaient remporté leur affrontement. Il ajouta même qu'il n'y avait aucune perte à déplorer en son armée, ce qui était une précision futile puisqu'il n'y avait tout simplement aucune perte dans l'ensemble des troupes des Berserkers - si l'on ne comptait pas les simples gardes qui n'étaient même pas vraiment à considérer, n'étant pas aptes à porter les Cuirasses - mais cela Casshern ne pouvait pas le savoir. La suite du rapport fut plus intéressante par contre ! Le Prophète n'ignorait pas qu'un combat avait eu lieu, mais en ignorait la teneur. Ainsi, un Gold Saint les avait suivi et avait affronté la Pestilence. Mieux que cela, à cause d'une erreur de ce dernier, il avait pu filer. Le combat avait eu lieu trop près de la Citadelle... Certes, il ne saurait pas la situer avec précision, mais cela n'empêchait pas qu'à présent, ils auraient une idée d'où les hordes d'Arès pouvaient se cacher. Et cela n'était clairement pas un bon point. Pourtant, le Dieu de la Destruction ne dit rien pour le moment.

Ce fut au tour de Guerre, alors. Ce dernier avait affronté le Seer en personne, et les Ases avaient été vaincus. Son Cardinal s'était donc montré plus efficace que lors de leur première sortie au Sanctuaire. De plus, il amenait un rapport sur les forces des Marinas. Le Prophète savait qu'il fallait les craindre, mais les estimait comme possédant des forces similaires aux leurs. De même, il ne craignait pas le Légat Orpheus pour l'avoir affronté seul à seul et l'avoir vaincu sans connaître de problème majeur. Oh, il n'était pas faible pour autant, c'était là chose évidente. Mais disons que ses capacités n'avaient pas su réellement inquiéter le bras droit d'Arès. Mais toujours, ce dernier ne prononça pas un mot, regardant à présent Frozia, la dernière à s'exprimer.

Elle n'apporta quant à elle rien de nouveau pour le colosse représentant la Mort. Arrêtée à mi-parcours, elle avait dirigé le dernier combat, le seul qui n'avait pas trouvé temps de s'achever. Et lorsqu'elle était tombée, il n'y avait plus eu lieu de poursuivre. En forçant, ils auraient sans doute pu passer, mais n'auraient alors pas pu aller beaucoup plus loin. Simplement le fait de continuer leur attaque alors n'aurait mener qu'à la perte des envahisseurs, ce qui n'aurait été profitable qu'aux Saints. Enfin, cela ne valait que si les forces d'Athéna se trouvaient encore suffisante pour faire le poids une fois la maison de la Balance passée... Par contre, elle le rejoignait parfaitement sur le fait que plus nombreux, en cas d'attaques des deux armées conjointes comme Ephtal le déplorait, le Sanctuaire ne serait plus qu'un souvenir.

Là, enfin, Arès allait leur répondre.

Je suis... profondément déçu... Sur toute la ligne, c'est un échec. Les sbires de Poséidon ont su retirer bien plus de gloire de ces attaques que nous n'y sommes parvenus ! Ils ont manifestement corrigé leurs rivaux alors que nous... Vous ne faites que trouver des excuses là où votre seule force aurait dû suffire ! Et que dire de cette autre erreur face aux Gémeaux, hum ?

La colère dans sa voix semblait s'exprimer face à la déception de la globalité, ne visant personne en particulier, balayant ses quatre Cardinaux du regard. Pas d'éclat de voix cependant, juste une tension qui se perçoit dans le ton qu'il emploie.

Laissez-moi ! Tous ! J'ai besoin de réfléchir sans avoir à vous voir, vous et vos visages qui me rappellent cet échec ! PARTEZ !

Là, par contre... C'était clair qu'il valait mieux ne pas chercher à discuter. Tous n'eurent alors pas d'autre choix que de quitter le Temple s'ils ne voulaient pas froisser leur maître...