L’Antichambre de la Terreur a été bâtie dans l’unique but d’affaiblir et non de détruire tout indésirable. Premier rempart de l’élite, cette énorme structure taillée dans l’obsidienne la plus sombre ne se vante que du sentiment offert par sa composition intérieure, son ambiance et ce qui l’accorde. Quiconque pose un orteil sur le seuil n’est pas plus frappé par l’absence quasi-totale de lumière, ni même par le doux vrombissement qui en émane. Mais bien par la brume, épaisse, acide, et son odeur de putréfaction. Au contact de la vapeur émeraude, toute parcelle de chaire rentrant en contact direct se met à pourrir de façon plus ou moins rapide selon le temps d’exposition, car si au premier abord il n’existe aucune réelle entrave physique en ces lieux, le simple fait de s’y trouver sans invitation déclenche un système d’autodéfense pouvant être fatal et il va sans dire que le seul cosmos peut en suspendre les effets… Pendant un certain temps.
Un tapis de ronces minérales recouvre les parois de cette vaste rotonde dont les dimensions ne sont connues que de l’architecte. Okra n’est pas âme à engager un duel frontal, ce pourquoi le bastion est composé de telle manière à ce que la lutte devienne traque morbide. Cachée derrière son épaisse muraille vaporeuse le prédateur observe avant de fondre sur sa proie, qui aura grand peine à la débusquer et ce pour de nombreuses raisons. Chaque pierre de l’antichambre est parcourue de veines ne réagissant qu’au contact d’un tiers, ce qui en plus de lui communiquer sa position, met également sa survie en péril. Un large bloc de jade au plafond éclaire sommairement la pièce en son centre, dans une palpitation en étroite liaison avec l’organe vital de son hôte. Le cœur ainsi représenté s’orne de huit cariatides disposées en cercle. Chacune représente une face de la Terreur et de la maladie, chacune expose son visage putréfié à la faible lueur du joyau central, et chacune incarne ici son propre fléau. Partout des ombres menaçantes chantonnent une marche funèbre, partout nuée d’insectes se mouvant dans la pénombre acide. Parfois se dessine à l’aplomb du cristal un trône lui aussi fait de ronces pétrifiées et d’innombrables nuisibles sur lequel se juche fièrement le Cardinal et sa noire cuirasse, le tout dans un ballet de gaz et de silhouettes.
L’ambiance se veut inhospitalière, macabre, empoisonnée. Comme une vulgaire mouche dans la toile l’intrus ne peut qu’attendre et entendre le premier claquement de Kryuk, fléau du Souffle d’Arès. Démenez-vous et la mort ne sera que plus rapide. Eternisez-vous et son baiser ne manquera pas de saveurs.