Golem imposant nimbé d'ombres, à la chiche lueur des torches ne couvrant qu'une faible zone, de par la conception étriquée de la citadelle, l'homme errait sans but, sans une réelle motivation profonde, juste pour se familiariser avec son nouvel environnement, étant donné son arrivée récente. Le Prophète lui avait fait traverser terres et mers pour finalement aboutir dans cette citadelle souterraine pleine de coins et de recoins, et surtout pas éclairée pour un sous. C'est sûr que la décoration détonnait, ça avait de la gueule, pensait il, mais ce n'était pas le genre à user de ce genre d'artifices pour signifier aux autres qu'il était à prendre en considération, du moins à fuir. Quoique, vu l'aspect du Prophète, c'était pas si étonnant, à tout bien réfléchir.

Les premiers pas avec son armure avaient été quelque peu conflictuel, l'un comme l'autre ne supportant pas vraiment les ordres direct. A vrai dire, ces deux têtes de cochon s'assemblaient parfaitement, même s'ils ne le comprenaient pas encore. Nan, ils en était encore au stade de la soumission mutuelle, chose parfaitement normale à cette heure, chacun essayant de prendre le pas sur l'autre, afin de le modeler selon son bon désir. Le Phacochère était têtu, et possédait un vrai sale caractère. Et son avatar allait dans le même sens. Autant dire que, une fois vêtu de sa cuirasse hérissée de piques, le Berserker du Phacochère était l'image même de l'instabilité, même si un relatif status-quo s'était installé entre les deux bêtes.

Foutue saloperie de porc! Tout de suite à essayer de me faire mettre à genoux...ça avait bien du le faire marrer, le Prophète! Mais j'suis pas du genre à m'laisser abattre, surtout pas par un cochon...j'aimerais bien voir la tête des types de Ctésiphon tiens, s'ils me voyaient arriver en porc géant. La gueule qu'ils tireraient! Ouais, je sais que tu m'entends, l'armure, mais t'inquiètes donc pas, je vais t'apprendre à me respecter. Et c'est pas parce qu'une fois sur moi tu peux m'envoyer tes décharges qui piquent à loisir que je vais me laisser chier sur la tête. Il l'a dit, le Cardinal, moi je suis un Fauve de la Terre!

Ruminant ses pensées dans l'immensité obscure de son esprit, sans aucun écho en retour, il continuait de laisser ses pieds le mener où bon leur semblait. Son nouveau voisin de conscience avait décidé d'opérer un repli stratégique, voyant que ses tentatives de soumission avaient échoué, mais il ne tarderait pas à revenir. Dans un sens, cela plaisait au perse. la perspective d'un combat était toujours alléchante, même si malheureusement ses muscles n'entraient pas en ligne des comptes, pour sa plus grande frustration. C'était un nouveau défi sur un nouveau terrain de jeu, voilà tout. Les choses avaient changé bien vite, comme d'habitude, et il fallait s'y faire. De toute façon Lazar avait développé à terme une certaine capacité d'adaptation, qui datait déjà de son enfance. Lorsque l'on a rien pour subsister, on se débrouille ou on meurt. Et tout événement imprévu est le bienvenu, même s'il est mauvais. D'ailleurs, on réapprend ce qui et bien et mal pour soit et pour les autres, dans de telles circonstances.

Mais pour l'heure, le colosse sorti de son monde chimérique pour constater que, et bien, il était de toute façon complètement paumé. Facile pour quelqu'un qui vient juste de se risquer à sortir des quartiers qu'on lui avait attribué. Mais plutôt problématique.

Ben, comme dirait l'autre, si je continue de marcher j'arriverais bien quelque part...par contre y s'rait temps que je me trouve de la boustifaille moi, parce que lutter contre des cochons ça donne matière à gargouiller. Qui sait, y a peut être un petit génie qu'à eu l'idée de construire une taverne à l'intérieur de la citadelle, ouais! C'ui là j'l'embrasserais sur les deux joues!

Mais ne dit on pas que le gai oiseau qui zozotte sur son arbre n'est pas foutu de voir s'il va grêler sur sa tronche de canari? Et forcément dans un décor à la Ahriman en plein dépression, bah ça joue sur les nerfs. Et quand un type déboule d'un couloir, lui aussi teinté d'ombre, la logique se met en place. Surtout quand le grand gaillard d'oiseau en question s'amuse à faire frotter les pointes de son armure sur les moulures constellant les murs de la citadelle, histoire de passer le temps. Et alors qu'il découvrit qu'un autre était là, ses réflexes défensifs se mirent en place, comme un homme qui chasse une mouche du revers de la main.

Oh putain tu m'as fichu la frousse! Désolé le moucheron, tu m'as pris par surprise! Sans rancune hein, la faute à pas de chance!

L'histoire ne dira pas s'il l'avait effectivement heurté ou non, puisque de toute manière, lorsqu'il lançait un coup, le troll ne sentait plus grand chose. Mais on s'en fout un peu, en fait.

S'il y a une chose que je possède, c'est bien de très bons réflexes. Et porter la cuirasse de la Tarentule n'avait fait qu'améliorer cette particularité chez moi. C'est sans doute ce qui me préserva de la défense de ce type. Alors que je me réceptionnais sur mes jambes après avoir esquiver l'assaut, je posais mes yeux sur celui qui avait réagi vivement. Son armure m’était inconnu et je n'avais encore jamais vu ce visage parmi les hommes de l'armée d'Arès. Cela signifiait donc qu’il était nouveau. Ou alors qu'il se cachait à longueur de temps. Une chose était sûre, c'est qu'il n'appartenait nullement à l'armée de mon maître. Un tel faciès, je n'aurai pu l'oublier.

Alors qu'il m'appelait moucheron, je fronçais les sourcils, passablement irrité d'entendre pareils propos alors qu'il était en tort. Que croyait-il donc ? Qu'au cœur de la citadelle, il risquait une attaque ? Les soldats du dieu de la Guerre étaient certes stupides mais pas au point de défier un des Fauves de la terre. Et ces cuirasses que nous portions ne laissaient aucun doute quant à nos fonctions. Encore que lui, s'il était nouveau, ne s'était peu être pas rendu compte de cette particularité. Quoi qu'il en soit, s'entendre appeler moucheron alors que j'étais leur pire ennemi, voilà qui était risible.

- Avoir peur pour si peu, voilà qui promet sur un champ de bataille. Je n'ai pas l’impression de t'avoir déjà vu, soldat. J'ai cru un instant que tu étais nouveau mais à la lumière de tes propos, j'ai plutôt l'impression que tu passes ton temps à te cacher dans ces couloirs. Le courage est affaire d'homme, je ne peux pas demander à tous d'en avoir, n'est-ce pas.

J'y avais été peut-être un peu fort mais je ne supportais pas la trop grande confiance que pouvaient avoir ces brutes épaisses. Car nul doute qu'il entrait dans la catégorie de ces soldats un peu fous, utilisés comme chair à canon et comme leurre pendant que moi, je m'infiltrais à travers les rangs ennemis pour porter un coup fatal à leurs généraux. Je ne dénigrais pas cette fonction, il en fallait après tout, mais je n'étais pas pour autant disposé à subir leur caractère de dégénérés.

- Je suis Nosgoth de la Tarentule, Gardien de ce souterrain. Tu as un nom, l'ami ?

Si je ne remplissais pas cette fonction de manière officielle, je n'en étais pas moins celui qui patrouillait le plus souvent dans cette partie de la Citadelle. Combien de berserker s'étaient donc perdus par ici. Innombrables. Peu à peu, la surprise passée, je reprenais mes habitudes. Je n'étais pas l'ombre de la Mort sans raison et il aurait été dommage qu'un guerrier disparaisse dans ces souterrains. Un mot de trop et je me ferai une joie de le parquer dans mon garde-manger. N'avais-pas quelques pulsions à assouvir après tout ?

Citation :

Repos 2/2

Passé la surprise, le géant sentit l'amer goût du fiel se répandre dans sa gorge, sous l'effet des paroles de cet asticot. Clairement bravache, la remarque de l'importun visait à faire sortir l'homme de ses gonds, comme pour se venger de sa réaction tout à fait normale. Mais le Perse ne s'y laissait pas prendre, ça non.

Couille de chameau, fils de chacal puant, par le côlon d'Arhiman, saloperie de trou du cul de...aaaaaahhhhhhhh!!!

Oui, il encaissait vachement bien. D'autant que, passé la surprise première, qui pouvait sûrement se voir sur son visage - à peu près équivalente à quelqu'un qui aurait mangé un œuf pourri - la logique implacable se mit en route, calculant les aboutissants à une telle confrontation. On est pas aussi grande gueule quand on a une telle silhouette de jouet à zizi pour philosophe en mal de trou de balle, ça non. Donc, il avait affaire à quelqu'un qui assurait, et il finirait bien par lui faire manger ses genoux, avec un petit effort...ou à un menteur, mais dans ce cas là c'était pas vraiment grave, parce qu'il finirait bien par lui faire manger ses genoux. Vigilance, donc, respiration profonde, et un sourire de circonstance, dévoilant des dents aiguisées par ses bons soins. On pouvait néanmoins distinguer un tic nerveux lui agitant l’œil gauche, comme d'infimes soubresauts attestant de sa tension jugulée à grand peine.

Mon nom c'est Lazar, mon lascard, et si t'es l'gardien d'ce souterrain, j'crois qu'on va être copains! C'est pas que j'me fais du bile à m'balader tout seul, c'est juste que, ben c'est un peu nouveau ici, tu vois? Et à vrai dire, je vais pas m'promener avec une cible dans l'dos sous prétexte qu'on est tous sous la bannière du Dieu de la Guerre! D'où le fait que j'ai failli t'en foutre une...

Devant son regard insistant , l'homme s'interrompit dans son monologue. Léger détail, il est vrai qu'il n'avait pas présenté sa nouvelle armure, toute en pointes et en surfaces rugueuses, comme taillées dans la pierre. Mais en même temps, il était tout juste en plein guerre froide avec.

Ah oui, ça, c'est la Cuirasse du coch...phacochère. Le Père la Mort me l'a refourgué, et depuis elle me colle à la peau, si on veut...la Tarentule hein? Hé hé...

Oui, vous avez vu juste. Il venait juste de repenser au coup du "moucheron". Y a pas à dire, il savait vivre, cet homme là, profiter des bonnes choses de l'existence!

Et donc ton seul truc à toi, c'est de ramper un peu partout dans la citadelle à la recherche d'intrus? C'est pas mal, il en faut des comme toi...et sinon à par ça, il t'arrive de sortir, ou...?

Le dos posé nonchalamment contre le mur, une jambe croisée devant l'autre, il feignait presque l'innocence, dans ses questions. Mais il ne fallait pas s'y laisser prendre, il savait qu'il avait affaire à bien plus vicieux qu'il n'y paraissait.

Parce que Tarentule + Souterrain + petit maigrichon = foutu truc qui te rampe dans le coup pour te piquer = saloperie de machin vicelard.

Loin dans sa conscience, comme un écho venu des âges, sauvage, incontrôlé, une entité se faisait connaitre. Et elle avait clairement l'air de lui dire "Arrête ton char, pauv'con, si il possède une cuirasse c'est pas la dernière des tanches. Tu ferais mieux de te remuer les fesses avant de finir six pieds sous terre...". Enfin en tout cas, c'était un panel d'émotions qui s'en rapprochait. Non pas que la Cuirasse soit incapable de vraiment s'exprimer, mais de par sa nature d'entité sauvage, elle était sensations brutes, sentiments incontrôlés.

Ramper un peu partout, voilà une définition qui pouvait effectivement me coller à la peau. Alors qu'il continuait de l'ouvrir et de jacter, je lui adressais un sourire véritable, de ceux qui veulent dire "t'as raison mon pote, t'as visé juste". Quant à lui, il était le digne représentant du Phacochère. Animal sordide au possible mais qui pouvait rapidement devenir dangereux, je le savais. Vicieux... Et cet homme semblait correspondre en tout point à l'animal qu'il représentait. Un peu comme moi à la vérité. Amusante situation que celle-ci. A croire qu'Arès savait précisément à qui offrir telle ou telle cuirasse. Rien n'était laissé au hasard et la Mort récoltait les fruits du dieu de la Guerre.

Il était tout de même insultant qu'il me croit seulement capable de conduire les égarés sur la bonne route. Car en ma qualité de Gardien de ce dédale, je possédais bien d'autres spécificités. Mais se dévoiler trop tôt était inconsidéré. Pourtant... Qu'est-ce que j'aurai apprécié lui faire manger son arrogance. Des soldats comme lui, il en disparaissait des dizaines sans que quiconque se questionne. Un de plus ou un de moins. Quoi qu'un des fauves d'Arès, ça risquait d'éveiller la curiosité de mon maître. Ce n'était que partie remise de toute façon. Des occasions comme celles-ci, il m'en présenterait d'autres, j'en étais persuadé. Avant de reprendre la parole, je me penchais, attrapant une sorte de gros cancrelat rampant au sol. Levant ce dernier à hauteur de nos visages, je l'observais se débattre entre mes doigts.

- Sortir ? Pourquoi ferais-je cela alors que mes proies viennent se prendre dans ma toile... Il ne m'est pas nécessaire de quitter ce lieu, qui est un passage obligé pour tous. Curieuses choses qu'un insecte, n'est-ce pas ? Ils se croient à l'abri des dangers et pensent pouvoir se diriger à travers ce dédale. Certains comptent sur leur force, d'autres sur leur ingéniosité... Il y a même des discrets, qui pensent pouvoir traverser sans être repéré.

Je reposais alors l'insecte au sol, le libérant de mon entrave. J'étais plutôt fier de mon petit effet. Cette fois, c'est à gorge déployée que je riais. Mon discours pouvait paraître surprenant, presque décousu. Mais si l'on savait lire entre les lignes, alors la menace était bien présente. Je ne prenais pas spécialement plaisir à parler aux autres mais en ce jour particulier, j'étais de bonne humeur. Même si cet homme avait presque failli me frapper. Car j’étais repu. Repu de viandes fraîches. Et comme toute drogue, une fois que l'on satisfaisait son manque, on se trouvait dans une sorte d'euphorie particulière. Qu'il s'estime heureux. Car il y a quelques heures, je l'aurai tué pour son affront.

- Ils ont cependant tous un point commun. Ils gesticulent tous dans la toile de la tarentule sans espoir de revoir la lumière du jour. Personne ne quitte ce labyrinthe si je ne le souhaite pas.

J'observais cet homme en apparence serein. Sans savoir ce qui lui trottait dans la tête. Contrairement à d'autres, il ne s'était pas départi de son ton dédaigneux. Peut-être se méfiait-il un peu plus de moi désormais mais il n'en restait pas moins plein d'assurance. Sa grande gueule montrait cependant une chose : il ne se laisserait pas facilement démonter par mes propos. Rendant ce jeu plus intéressant encore.

- Tu as mentionné mon maître, Ephtal, Cardinal de la Mort. Appartiens-tu à l'armée qu'il dirige ? Si tel est le cas, nous sommes en quelque sorte des frères d'arme. Mais je parle, je parle, et je ne sais même pas si tu désires quitter cet endroit. Si tu le souhaites, je te montrerais le chemin de ta liberté, Lazar.

Acceptes ! Et tu ne le regretteras pas.

L'homme avait ri, à gorge déployée. Il avait fait tout un discours, une bestiole à la main, et ce fut son erreur, le minuscule insecte devenant le grand tout obnubilant la conscience de son vis-à-vis. Un peu comme si l'on avait agité un morceau de viande devant un chien. Et tandis qu'il avait relâché la créature, partant dans des spasmes incontrôlés, le guerrier de la Tarentule était devenu un objet du décor. Oui, car ce qui était intéressant, c'était la...

Paf! Morte la bestiole. Mor-te-la-bes-tiole!

A grand renfort de coup de coup de tatane sur le sol de pierre, le géant s'évertuait à faire fusionner organique et minéral. Comme si sa force aidait. Le Prophète n'avait il pas dit qu'il était à même de pourvoir éclater les atomes? Alors il devait bien réussir ça...Puis, s'avisant que l'autre en face attendait des réponses de sa part, il releva la tête, affichant un air neutre, de celui que les parieurs affichent au moment de miser le tout pour le tout. Une chose avait germé dans son esprit, une remarque pertinente qu'il ne pouvait par conséquent garder pour lui même. C'était ce qu'il pouvait y avoir de plus troublant chez lui: quand bien même il faisait lourdaud, grosse brute, ses interventions, parfois inutiles, bien à lui, avaient le goût piquant de l'exactitude, pour certaines. Éludant les dernières questions de son interlocuteur, il revint sur ses toutes premières remarques. Chose difficile car il avait du remonter dans sa mémoire, faisant le tri dans les phrases et les interrogations, qui du coup venaient au second plan face à l'image de la bestiole tentant d'échapper à ses gros pieds.

Mais dit moi, si personne n'a vent de notre existence, et si tu dis toi même attraper des proies plus que tout autre, est-ce que cela n'voudrait pas dire que tu t'fais une joie de zigouiller à tout va les forces de l'armée d'Arès? Je sais pas ce qu'en dirait l'patron, mais il m'a tout l'air de pas être un fanatique des morts inutiles...il faudrait bien sûr lui apporter des preuves solides, tangibles, du genre une prise la main dans l'sac...

Il était parti dans ses réflexions, ignorant presque le têtard qui lui faisait face, une main caressant son menton, l'autre appuyée sur son coude opposé. On aurait presque dit un philosophe. Et avant que le maitre en apparence du Dédale perde patience, il stoppa ces mimiques, pour reprendre une contenance. Pensées spéciale pour sa foutue Cuirasse.

Et bien, puisque mon "armure" s'est manifestée au niveau de l'antichambre de la Calamité, j'suppose que c'est là que j'dois être. Quant à savoir si j'appartiens à c't'armée, ça dépendra du pauvre type qu'en est le chef. Pour l'instant, je n'réponds qu'au Prophète, c'est bien l'seul qui m'fait assez d'effet pour que j'le respecte. Tu l'dis ton maitre? Donc nous serons appelé à nous revoir dans l'futur, peut être. Sans doute. Enfin, probablement. Quoique...bref. Sache une chose, mon petit! Tous les ch'mins qu'Lazar empreinte son pavés d'liberté! Et ouais! Suffit d'avoir les chaussures adéquates!

Passé la méfiance, il y avait un certain amusement...

Bordel de merde, tu l'as dit mon p'tit! Les gars d'ici sont sacrément rigolos, j'ai d'quoi me marrer pour un moment!

Malgré le fait que la Tarentule était toujours placée dans la liste des ennemis potentiellement ennuyants, il titillait la volonté du nouvellement promu Berserker. Il avait toujours une forte envie de l'éclater contre le mur, malgré une certaine inconnue qui le retenait, mais avait décidé de prendre les choses comme elles venaient, acceptant cet état de fait.

Mais j't'autorise à rester avec moi, si d'aventure tu veux d'la compagnie dans ces couloirs! Y parait qu'ils sont pas très sûr, ces derniers temps. Comme ça tu vas m'raconter c'que tu sais sur le train d'vie ici! A moins que tu passes vraiment tout ton temps comme un vieil ermite, et qu't'en sache rien...bah! Dis moi c'que tu connais d'ici, pour que j'me fasse une idée. Un petit quelque chose, c'est toujours mieux que rien!

Autant dire qu'il n'aurait jamais l'occasion de me prendre la main dans le sac, comme il semblait le croire. Car des victimes, il ne restait rien. Et la raison, je la gardais précieusement pour moi. A quoi bon faire état de ma particularité alors qu'il ne la comprendrait pas. Et son petit chantage n'avait évidemment aucune prise sur moi. Pourquoi craindre qu'il en parle à Ephtal ? Si mon maître l'avait su, il aurait de lui-même exécuté une bonne partie d'entre eux. A faire la fête dans les salles communes, à boire plus que de raison. En un sens, j'avais seulement agi pour le bien d'Arès.

En tout cas il était amusant. M'autoriser moi à l'accompagner. Risible mais en un sens, il restait en quête d’information. Et moi aussi... S'il était nouveau et avait soif d'apprendre, je restais curieux d'en savoir plus sur lui. De par mon ancien métier et de par mes fonctions actuelles, je savais que plus j'en savais sur quelqu'un, plus j'étais susceptible de m'en débarrasser sans éveiller de soupçon. Le plus dur n'était pas de liquider un homme gênant, le plus compliqué était de se débarrasser du cadavre de façon à ce qu'on ne le retrouve jamais.

- Et bien je vais te suivre. Je suis curieux de voir comment tu vas te sortir de cet endroit ! Montre moi le chemin de ta liberté, Lazar du porc !

Nous nous défions mais je pouvais sentir qu'il s'en amusait tout comme moi. Quoi que j'avais peut-être poussé l'insulte un peu loin en comparant le phacochère à un vulgaire morceau de lard sur pattes. Et il m'apparaissait comme inéluctable qu'à un moment, on allait en venir aux mains. Mais pour le moment, autant profiter encore un peu du fait qu'il puisse parler. Et j'aviserai par la suite. Mes sens restaient en éveil malgré le fait que nous soyons en territoire allié. Je ne baissais que rarement ma garde et mon propre esprit était déjà en train de scruter les moindres recoins. Ephtal m'avait enseigné à voir avec autre chose que mes yeux. Et je m'évertuais depuis à mettre en application son enseignement dès que je le pouvais. Un entraînement basique mais qui me sauverait certainement la vie un jour ou l'autre.

Et pendant ce temps, je réfléchissais à ce que je pourrais lui apprendre qu'il ne sache déjà pas. Ephtal semblait l’avoir rencontré et ce Lazar respectait mon maître. En soit, c'était déjà une information importante. Car si la Mort cueillait en personne les Fauves de la terre qui serviraient Arès, elle n'en était pas moins distante une fois la citadelle regagnée. Non pas par timidité mais bien parce qu'il avait d'autres priorités que de faire la causette avec chacun d'entre nous.

- Le train de vie d'ici ? L'armée d'Arès a pour ordre de se préparer à cette guerre. Et cela passe par de multiples entraînements. D'autant que certains en arrivant ne savent pas ce qu'est le cosmos ou ce que représentent ces cuirasses. Autant dire qu'une remise à niveau est indispensable et que là dessus, nous avons un retard considérable face à nos ennemis. Fort heureusement, il semble qu'Arès découvre des guerriers accomplis, qui n'hésiteraient pas à mourir en combat pour un honneur quelconque. Des sacrifices utiles pour ceux qui sont dotés de véritables capacités, si tu veux mon avis.

Et bien sur, je me considérais comme appartenant à cette seconde catégorie. Et cet homme, dans laquelle figurerait-il ? J'avais bien peur que ce ne soit que la première, fou qu'il était. Je poursuivais toutefois.

- Jusqu'à maintenant, il est rare que les soldats d'Arès quittent cet endroit, accaparés qu'ils sont par nos entraînements quotidiens. Tu dois déjà le savoir mais il existe quatre antichambres se trouvant juste après ce dédale dont j'ai la garde. Des antichambres protégées par nos quatre Cardinaux. Chacun a la direction d'une armée et celle de mon maître, le Prophète Ephtal, est celle du Feu. Dont je fais parti. Pour le moment, c'est le plus important à savoir, le reste n'étant pas important à mon sens. Il y a bien ça et là d'autres guerriers qui trainent mais rien de bien captivant en vérité. Voilà pour les grandes lignes. Mais dis moi, Lazar... Comment t'es-tu retrouvé sur la route de la Mort ? Avant de revêtir la cuirasse du Porc, tu devais bien faire quelque chose de tes dix doigts ?

L'autre avait répondu à l'affirmative, le suivant dans les couloirs du Dédale. Tant mieux, n'avait pas vraiment le choix! Et alors que le géant marchait d'un bon pas, l'air conquérant, il lui narra ce qu'était la vie ici, dans cette citadelle de Fauves, prêts à se déverser sur le monde pour leur dieu. L'allusion au cosmos et aux cuirasses étant, sans que la Tarentule le sache, très à propos. Fronçant les sourcils sur cette remarque, le guerrier affichait un air de constipation du meilleur cru. Oui, il lui restait des choses à apprendre, et il n'était pas au bout de ses peines. Mais le bénéfice était si grand...qu'il saurait s'en accommoder. Avec sa chance habituelle, il avait déjà eu le meilleur professeur qui soit! Si c'était pas un signe ça! Et voilà qu'il rencontrait maintenant son apprenti, un type qui n'était pas le plus impressionnant du monde mais qui semblait en avoir sous le pied.

Et ben, c'te vieille pute de Fortunae doit ouvrir ses cuisses, d'temps en temps!

Et le type fluet d'établir des catégories de combattants au sein de cette armée. Classique, la chair à saucisse, et les loups de guerre. Nul doute qu'il se situait dans la seconde catégorie, et qu'il y croyait dur comme fer...et bien, il lui faudrait partager cette place avec le nouveau venu! Car ce n'était pas aujourd'hui qu'on allait faire de la Merguez avec les tripes de l'oriental, foi de Lazar!

Mourir par honneur, c'est quand même un peu con. Y a pas d'honneur dans une bataille, c'est juste un combat pour la survie entre deux types, et généralement chacun connait l'issue de l'affrontement. L'honneur, c'est juste le beurre qu'on s'fout sur l'cul en espérant qu'ça f'ra moins mal quand le gros passera! Quand à savoir si leur sacrifice est utile ou non, j'peux t'dire qu'si tu crève dans ma bande et qu'c'est vache maigre, j'hésiterais pas à louer ta mort, lorsque j'aurais cuit un d'tes cuissots, et que je m'en paierais une bonne tranche!

Et de lui dire ça avait un air jovial, comme si rien n'importait, rien n'avait de sens. C'était facile, pour une homme complètement déconnecté de la réalité de ce monde, d'affirmer aimer de telles extrémités. Il n'avait jamais eu de repères, concernant la bienséance dont parlait les philosophes. Ses seules limites, il se les était tracées lui même. Pas de prise de tête, pas de faux semblant. Et les seuls regrets qu'il avait étaient à l'échelle de ce qu'il vivait: complètement à part, très paradoxaux.

Alors c't'une très bonne chose que j'sois parmi vous, hein, ça nous fait du captivant...avant j'vivais tranquillement, faisant un peu c'qui m'plaisait. c'est l'avantage, quand on a mes attributs. On peut marcher parmi les hommes comme un loup! Pas un loup de Germanie hein, ces petites bêtes f'rait pas de mal à une mouche. Nan...je profitais, voilà tout. Quand j'avais besoin de quelqu'chose, bah je le prenais. Aussi simple que ça. Après, tu dois te demander comment j'ai pas fini la tête au bout d'une pique! Bah, faut savoir se creuser la cervelle, pour survivre, c'est pas pour rien que la Mort elle même est v'nue me chercher! J'l'évite depuis un moment, j'préfère nettement la dispenser aux autres, ça ouais!

Tout ça ponctué par des coups de battoir sur son plastron luisant. Il aimait raconter ses histoires, le Lazar, les relents d'épique, ça l'excitait. D'ailleurs...

Mais dis moi...

Se tournant d'un bloc, avec une rapidité insoupçonnée pour sa taille, il se retrouvait à une paume du visage de son vis-à-vis. Son ton était froid, bien loin de l'amusement innocent affiché plus tôt.

Quand est ce que tu vas arrêter d'me titiller avec le "Porc"? Pas qu'ça m'dérange pour l'instant, mais j'sens bien qu'tu cherche à m'tester...

Laissant la tension atteindre son paroxysme, il la rompit d'un grand coup de langue en direction de Nosgoth, pour lui repeindre le visage. Un rire gras sorti des profondeurs de sa trachée, éclatant au sortir de sa bouche et rebondissant sur les parois des couloirs alors qu'il se redressait sous l'effet des spasmes.

Même si j'ai l'sentiment qu'on va finir par se mettre sur la gueule, j't'aime bien l'moucheron! Tu m'as l'air d'en avoir une sacrée paire, ou alors t'es fou, comme moi! Alors on va s'entendre, peut être! Mais au fait...tu m'parlais des Cardinaux, qui sont-ils? De c'que j'en ai vu, sont pas très présent ici, ou alors c'est les seuls qui foutent le nez dehors. En tout cas, on peut dire qu'ils ont le sens de la déco, dans leur bouge, reste à savoir si ils ont aussi le sens des affaires...

Lui aussi il me faisait marrer. Son franc parler n'était pas courant, même parmi les autres Berserkers qui se targuaient d'être de vrais durs. La plupart parlaient plus qu'ils n'agissaient à la réalité, ce qui me donnait l'occasion de bien me foutre d'eux lorsque je le pouvais. Il avait raison en un sens : je le testais. Et si l'envie de combattre restait aussi présente dans mon esprit alors que je n'étais pas un homme de force, c'est qu'il y avait une raison. De plus, quelque chose dans ses propos m'avait quelque peu surprit. Admettre que si la situation l'exigeait, il pourrait se repaître de cadavres, voilà une donnée qui n'était pas courante.

Mais voilà. Voilà qu'il agissait comme un porc. Sans mauvais jeu de mot. Et si son coup de langue me surprit, ce fut rapidement la colère qui l'emporta sur l'autre sentiment. Lui qui se trouvait sur mon territoire, il osait me défier ouvertement de la sorte. Et s'il pensait que son comportement me calmerait, c'était tout autre. Il se gaussait comme un môme, fier de sa connerie, se permettant même de me poser une question. Mais à l'instant présent, je me fichais des Cardinaux. Je me fichais aussi des conséquences de ce qui allait suivre. Lazar devait comprendre où il se trouvait. Et si ses manières avaient amusés sa galerie à l'époque, ici il n'était rien d'autre qu'un futur sacrifié pour Arès.

De la paume de ma main, je frappais rapidement à hauteur de son plexus. La force n'y était pas mais je ne désirais qu'une chose : le faire reculer. Et cela fonctionna puisque son dos toucha la paroi derrière lui. Il ne m'en fallut pas plus pour libérer ma technique. Plusieurs filins sortirent de mon armure pour former une toile presque immédiatement après, une toile qui se plaquait sur le corps de cet homme afin de l'emprisonner contre le mur. Si la solidité et la résistance de cette attaque laissait à désirer, elle n'était là que pour lui montrer que la prochaine fois, je le tuerai. Il dansait dans ma toile. Il était à ma merci. D'un geste de la main droite, je dégainais une dague de sous ma cuirasse. Certes, je n'avais pas besoin d'arme d'ordinaire. Mais mon ancien métier m'avait laissé quelques traces.

- La prochaine fois, je te tranche la langue et je te saigne... Comme un porc !

Je m'adressais à lui avec un sourire et une sérénité réelle. A quoi bon s'emporter alors que je pouvais l'exécuter quand bon me semblerait ? Il souhaitait des réponses, j'allais donc lui en donner. D'un simple coup, je tranchais les liens de cette toile qui retomba au sol, libérant l'importun.

- Les Cardinaux ? Ils sont les quatre Généraux d'Arès. Mais qu'importe... Seul Ephtal est important. Les trois autres ne sont rien de plus que des vassaux. Ils dirigent leurs armées mais obéissent aux ordres du Prophète. Il parait que leur puissance est au moins égale à celle d'Ephtal. Mais j'en doute... Comme je te l'ai dit, ils ne sont rien de plus que des faire-valoir. Prie seulement Arès pour qu'il t'accorde la chance d'intégrer les armées du Feu. Sans quoi je ne donne pas cher de ta peau.

Sans doute que j'y allais un peu fort. Mais aucun des trois autres n'avaient d'autorité sur l'ombre de la mort que je représentais. Si je devais mourir au combat, ce serait avant tout pour lui. Et pour Arès. Mais les trois autres Cardinaux n'étaient rien.

- Depuis ton arrivée, tu n'as vu que le Prophète n'est-ce pas ? Fais gaffe quand même, l'ami. Car si pour ma part je suis plutôt patient, nombre de berserker n'attendent qu'un faux pas des nouveaux pour leur faire ravaler leur fierté. Prends ça comme un conseil de bienvenue...

Il avait réussi, il avait fait sortir le soldat de ses gonds. Et il avait pu constater que l'homme était à la hauteur des espoirs que Lazar fondait en lui. Vif comme l'éclair, il avait frappé de la paume, avant de laisser son énergie s'enfler, faisant surgir de nulle par des filaments délétères, qui l'avait fermement arrimé au mur contre lequel le géant avait buté. Singulière expérience, en même temps qu'extrêmement importante, il avait maintenant les aptitudes nécessaires pour "voir", en quelque sorte, l'énergie déployée par un quidam sachant le faire. Et ce, pour quelqu'un d'autre que le Prophète. Aux anges, il se laissa complètement faire, affichant un air narquois quand son interlocuteur le menaça de sa dague, jouant encore sur les mots, d'une lourdeur qui doucha l'enthousiasme de sa victime. Décidément, ce gars là n'aimait pas rire.

Libérant la grosse mouche de sa toile, il parla des Cardinaux, de leur relative insignifiance face au Guide, de la chance d'appartenir à son armée personnelle. Gardant pour lui ce qu'il savait, il écouta les conseils du Berserker, un sourire aux lèvres alors qu'il lui tournait volontairement le dos pour continuer d'avancer. Il avisa une entrée, à l'extrémité d'un des couloirs, et s'orienta derechef dans cette direction. C'est d'une voix calme et réfléchie qu'il s'adressa au Gardien du Dédale.

Vois tu l'ami, jusqu'à présent, j'ai fait d'toi ce que j'désirais. Tu m'as servi d'guide contre ton gré, et a répondu sagement à mes questions, quand bien même ça t'coutait un bras d'répondre. En plus de ça, tu a commencé à m'dévoiler tes pouvoirs, et c'est quelque chose de pas négligeable.

L'oriental se tourna d'un coup, ouvrant grand les bras tout en pénétrant dans la pièce vers laquelle il s'était dirigé. Un sourire carnassier s'était épanoui sur son visage. Chacun de ses pas étaient lourds, comme s'il prenait le temps, comme s'il savourait l'instant.

En fin d'compte, tu colle à merveille à ton rôle de Gardien du Dédale! Malgré les fanfaronnades, tu m'as bien guidé, et tu m'as permis d'en savoir un peu plus sur c'qui s'passe ici, et sur ton opinion envers la hiérarchie en place. Bref, je n'pouvais pas rêver meilleur accueil! Merci pour ça, cher ami!

Une idée venait de germer dans son esprit. L'occasion était trop bonne! C'était ici qu'il fallait mettre les choses à plat.

Alors maintenant qu'on a fait l'tour, quel est l'programme? On continue à ronger not'frein et à se la mettre à coup d'hypothèses? Ou on retrousse nos manches et on s'fait not'propre hiérarchie? Parce que mon p'tit, si on est am'nés à cohabiter sous la même bannière, à savoir celle de l'armée du feu, y faut mettre les choses au clair au plus tôt, j'pense. Parce que si j'suis un nouveau, et que par conséquent j'dois faire attention à pas froisser les aut'membres d'la soldatesque, j'peux aussi bien montrer c'que j'vaux et en finir tout d'suite avec ces conneries d'cirages de pompes pour des types qui sont peut être en dessous de moi, tu vois? Et éviter à l'av'nir les remarques désobligeantes comme les allusions au cochon...Bref, ça t'dirais d'venir voir c'que j'donne en vrai et pas en fantasme? Comme j't'apprécie pas mal, on à qu'à dire qu'c'est au premier qui mort la poussière, correct?

Il en salivait d'impatience. Nul doute que le type en face de lui était un cador. Nul doute qu'il aurait à le revoir. Et nul doute que le Prophète verrait d'un très mauvais œil si on s'amusait à zigouiller son Gardien du Dédale. Il désirait donc conserver cet homme comme un trophée, ou du moins comme quelqu'un dont il connaitrait les capacités à l'avenir et qui lui permettrait de se faire la main avec ses nouvelles capacités.

Ouais, en fin de compte ce type est vraiment serviable, un amour.

Bataille?

Ouais, si tu veux bien participer, le Razorback.

Plus je le regardais faire le pitre, plus je me demandais ce que Arès pouvait faire de pareil tocard. Fort, il l'était, c'était une certitude. Grande gueule aussi mais cela n'enlevait rien à sa puissance. Mais croire qu'il me manipulait depuis le départ, voilà une chose qui était quand même paradoxal. Mais je n'étais pas homme à priver un enfant de ses rêves les plus fous. Il pensait se jouer de moi, tant mieux, j'allais lui laisser ce petit cadeau. De toute façon, il comprendra bien assez tôt que je n'étais pas homme à me laisser embobiner par un autre. Quant à l'histoire des capacités dévoilées, je plaidais évidemment coupable. Coupable de lui avoir montré que la Tarentule jouait avec des fils. L'information était primordiale. Et quelle surprise surtout... Je souriais. Quelle naïveté touchante. J'aurai eu un cœur, j’aurai presque eu des scrupules à m'amuser de ses réactions et constatations. Mais je n'en avais plus. Plus depuis que j'étais devenu une ombre.

- En effet, je n'y ai vu que du feu. T'es plus doué que je ne le croyais, me berner comme ça, c'est tout simplement impressionnant. Par contre, n'oublie pas que c'est mon rôle e guider les âmes perdues à travers ce dédale. En rien une faveur. Tu ne porterais pas cette cuirasse, tu n'aurais même pas eu le temps de fanfaronner. Là, même si tu es un peu spéciale, tu restes un Berserker. Si ta disparition ne saurait m'attrister, elle risquerait surtout de me causer des ennuis avec Ephtal. Et puisque tu l'as rencontré, tu dois savoir qu'il est préférable de ne pas le mécontenter.

Est-ce que je craignais le Prophète ? En un sens, oui. Mais je savais de quoi il était capable alors que ces autres soldats, eux, ne pouvaient que le deviner. Par contre, Lazar ne semblait plus hésiter quant à ce qu'il voulait faire. Imposer sa présence en me combattant. S'il gagnait, il validerait forcément le fait qu'il était un combattant d'Arès et pas le premier débile venu. S'il perdait, il prouverait qu'il avait le courage nécessaire à un soldat du dieu de la Guerre. Pour ma part, je n'étais pas contre lui faire fermer un peu sa bouche. Il parlait trop mais ce n'était pas que ça : mon instinct me criait de me méfier de lui. Mon instinct me disait qu'il était dangereux. Et je savais très bien que contre ce genre de personne, j'étais désavantagé. Une ombre ne se dévoilait pas totalement.

Hors ici, dans un combat décidé d'avance, je ne pouvais faire autrement que d'aller au front sans tergiverser. Et en puissance brute, j'étais certainement l'un des plus faibles de la Citadelle. Je compensais cependant largement avec d'autres talents. Si je perdais, j'accepterai avec joie sa supériorité dans l'art du combat. Si je gagnais - et j'allais tout faire pour - je ne ferai que confirmer que je n'étais pas là sans raison.

- Le premier qui mord la poussière ? Pourquoi pas... Si tu gagnes, j'arrêterai de faire allusion au porc lorsque je m'adresserais à toi. Par contre ne te fais pas d'illusion, Lazar. Cette hiérarchie à laquelle tu fais allusion, ne comptes pas trop sur le fait qu'elle évolue si facilement. Que tu gagnes ou que tu perds n'y changera rien. A toi l'honneur !

Citation :

Repos 2

Il sentait bien que l'autre se foutait ouvertement de sa gueule, mais c'était plutôt bénéfique, augmentant la colère qui prenait peu à peu le pas sur la raison. Oui, il en avait besoin, de cette colère, pour pouvoir augmenter ses aptitudes au combat. Il était un véritable Berserker d'Arès, et à ce titre il se battait comme tel. La Tarentule avait pourtant raison sur une chose: il ne fallait pas mécontenter le Prophète. Et à ce titre, il devait tempérer ces ardeurs. Cruelle situation pour celui qui se complaisait dans la brutalité et la rage. D'autant plus que le type finissait sur une note honorable, promettant de ne plus jamais le titiller avec son surnom, sans aucune contrepartie. Une note assez drôle, en fait. Ne tirait-il aucune satisfaction d'un pari gagné? De l'emprise que l'on pouvait avoir sur une victime à terre, véritable promesse d'épanouissement de toutes les envies qui pouvaient surgir?

Et ben, commençons donc. J'te préviens, j'ai tendance à m'faire plaisir dans l'feu d'l'action, donc t'étonnes pas si un ou deux membres volent dans l'décor. Bref, allons y mon ami!

Tapant dans ses mains, comme pour se préparer pour un souper gargantuesque, le colosse en profita pour se faire craquer les jointures, tout en s'étirant. Puis, presque nonchalamment, il bondit sur son adversaire la main tendue en arrière, avant de tenter une baffe magistrale en direction de la Tarentule.

On fait ça en douceur! Voici venir la baffe! 'va bien voir c'que l'cochon nous garde en réserve!

Le but évident était de couper les jambes de son adversaire, d'entrée de jeu, afin qu'il reste hésitant durant tout l'échange. Sa cible aurait le déplaisir de se rendre compte que son corps astral foutait le camp, perturbant ainsi son corps physique. Et cela lui prendrait plusieurs minutes avant que les deux ne re-coïncident. Minutes durant lequel il ne pourrait se battre avec ses pleins capacités. Peut être que cela ne fonctionnerait pas, et à en juger par le roublard en face, c'était peut être le cas, mais l'autre s'en fichait, il était à l'image de sa Cuirasse, fonçant toujours devant lui, faisant fi des obstacle, superbe dans sa liberté sauvage, son...

Ta gueule, le scribe, j'essaye de baffer, là. Et voilà un revers pour toi, la petite araignée.

Comme on chasse un moustique, le troll fit repartir son bras dans le sens opposé, dans le but évident d'intercepter l'autre avec son membre, semblable à un tronc. Il ne laisserait pas le temps à l'autre d'user de fourberie, et lui couperait ses fils un par un, le faisant tomber de son perchoir pour l'écraser sous sa botte. Peut être que s'il venait à se faire le Gardien du Dédale, cela lui permettrait de se faire un nom tout de suite. Et qui disait notoriété, disait plus de péquenauds pour tenter sa chance auprès de lui. Et il pourrait se marrer! Ouais, c'était vraiment la chance qui l'avait mis sur la route de cette chenille...et le colosse était à peu près sûr que Nosgoth devait avoir une relation particulière avec le Prophète. Pour grimper, il suffisait de s'appuyer sur la tête des autres, et plus celle-ci était élevée, plus l'ascension était rapide.

J'ai hâte de voir c'que tu vaux en vrai, mon mignon! Aller, vas y, viens donc tisser!

Et d'éclater d'un rire gras. Il commençait à s'amuser, dans son élément. Et il n'avait pas besoin d'une masse pour exploser les crânes, puissant comme il se sentait. Le Razorback s'était joint à la danse, et lui refilait sa sauvagerie, et sa puissance au combat. Sa faisait mal, à l'état brut, mais c'était bon.

Aucune réplique aux propos de mon adversaire. Les seuls bras qui tomberaient en ce lieu, ce serait les siens s'il osait s'approcher trop près de moi. Cependant, je ne pouvais lui enlever sa rapidité et son tempérament. Tant et si bien que le premier coup, je le reçu de plein fouet. Mais pire encore, je constatais cette étrange perturbation suite à cette attaque, preuve s'il en fallait qu'il ne s'agissait pas d'un assaut si simple que cela. Au moins j'étais prévenu : il me faudrait me méfier de lui au corps à corps, domaine qu'il devait certainement maîtriser à la perfection.

Mais déjà, il récidivait. Cette fois, je n'allais pas laisser son coup me toucher. Je déviais celui-ci du bras et d'un bond, je remettais un peu de distance entre lui et moi : rester trop prêt signifiait la fin du combat pour moi. D'ailleurs, même si j'étais parvenu parer son second mouvement, l'engourdissement de mon bras me prouvait la force qui était la sienne. Et ce n'était pas mentir de dire qu'à ce jour, il était celui que j'avais affronté qui cognait le plus fort. Quelle poigne ! Je devais me méfier doublement. Mais était-ce vraiment suffisant pour me museler ?

- Tu es déjà prit au piège, Lazar. L'araignée n'agit jamais dans la précipitation ! Mortal Cobweb !

Je savais que le changement qui s'opérait risquait de surprendre Lazar. Mon aura, d'ordinaire argentée, prenait dès lors une teinte noire, comme la nuit elle-même. Mais mieux que ça, ce qui allait suivre révélerait à cet homme qu'il n'était pas le seul guerrier dangereux dans cette pièce. Je sentais déjà le contre-coup de ma technique agir sur mon corps alors même que le courant électrique apparaissait autour de moi. Il ne m'était pas facile de maintenir cette technique en place très longtemps mais le jeu en valait la chandelle. Car si je parvenais à porter ce coup, nul doute qu'il serait mal en point.

Je levais ma main droite et une multitude de filins aussi tranchants que des lames sortirent du sol autour de lui. Claquant comme des fouets tout d'abord, ils ne tardèrent pas à tenter de fixer sur place le Berserker que j'affrontais. Le simple fait de le paralyser, même temporairement, me suffisait : je ne voulais pas qu'il puisse s’enfuir avec ce que je lui réservais comme accueil. Car dans ma seconde main venait d'apparaître le dernier de ces fils, celui qui me reliait moi à tout les autres. Et en un instant, je libérais la terrible décharge. Le courant passa par le filin central avant de se répartir dans tout les autres. Lorsque l'électricité toucherait ma cible, il grillerait sur place. Du moins était-ce l'espoir que je caressais.

Je frappais sans doute moins fort que lui. Mais en terme d'organisation et de précision, je n'avais aucun rival sérieux dans toute la Citadelle. Et je comptais lui apprendre cette leçon.

- Fais moi plaisir... Ne tombe pas trop vite, je n'en tirerai aucune gloire !

Citation :

Attaque physique symbolisée par les filins qui tentent de te frapper comme des fouets

Il s'était mangé la première baffe, mais déjà reculait sur la deuxième. Bien, la petite Tarentule comprenait à présent qu'il ne fallait pas sous estimer le colosse, d'autant qu'il se sentait étrangement dopé par l'énergie sauvage de son animal totem. C'était comme si tout devenait possible, comme si chacune des idées germant dans son esprit prenait pieds dans la réalité, lui permettant d'assouvir ses fantasmes. Quelle joie, quelle félicité! La conception même de bataille s'en trouvait changée, renouvelée, tellement excitante!

Cette félicité fut interrompue par la réplique bravache du moucheron, qui déjà esquissait une technique. Il avait un avantage certain, celui de connaitre son amure et de savoir user de ses arcanes. Comme autant de serpents rapides et furieux, une infinité de fils tentaculaires virent le fouetter, le frapper et s'enrouler autour de ses membres. Comme plus tôt dans la conversation qu'ils avaient eu, il était encore une fois pris dans les rets de l'araignée.

Hé, hé, si tu crois qu'une simple toile va me...

Mais l'autre répliquait. Fidèle à cette image de type malin qu'il affichait à tout le monde, du moins à l'oriental, le Nosgoth se servait de son réseau filaire pour assener une attaque électrique d'un puissance largement sous-estimée, pourtant assez grande pour griller le colosse comme une saucisse. Pris dans sa nasse, il ne pu que subir, tressautant sous l'effet des éclairs venant lécher son corps, le cœur au bord de l'explosion. L'attaque finie, il pouvait largement mériter son surnom, tant l'odeur de cochon grillé était forte. S'agitant de soubresauts, sous l'effet du courant parcourant ses membres de façon intermittente. Un sourire se dessinait sur son visage, et il se mit à parler, malgré les dents claquantes.

- Et b-b-b-bien, c't-t-t-t-tout c'que t'as? J'esp-p-p-père que c'était pas la m-m-meilleure at-t-t-t-taque de la Tarentule, parce que j'vais être déçu si tu m'oppose une p-p-petite résistance par la suite!

Tue! Tue! Tue!

Mais il est loin maintenant, faut que j'me rapproche.

Pouvoir, puissance!

Cherchant un moyen d'atteindre sa cible, alors que celle-ci prenait de la distance, ayant compris qu'elle ne ferait pas le poids au corps à corps, la réponse vint d'elle même au géant. Il pouvait créer ce qu'il voulait à partir de son énergie cosmique, son imagination n'était que la limite de ce qu'il pouvait faire! Soit, il prendrait donc les choses au pied de la lettre.

Et bien, j'crois que puisque tu places la barre aussi haut, j'me dois d'faire de même. J'vais la déloger d'son perchoir, la petite bébête!

Laissant la puissance dévastatrice du Phacochère l'investir, l'armure étant cette fois complètement coopérative, il imagina une masse d'arme gigantesque, toute faite de piques, et reliée à une chaine jusqu'à ses mains. Alors que l'énergie le parcourait, celle-ci sorti du néant, véritable création cosmique qui le fit frémir de plaisir. Il prenait la pleine mesure du pouvoir de sa Cuirasse à présent, obligée d'investir toutes ses ressources afin qu'on ne se moque pas d'elle. Il respectait cette attitude, et comprenait un peu plus les motivation sauvages de son armure.

La gloire dis tu? Mais penses déjà à tenir sur tes pattes!

Car cette attaque lui couperais les jambes, c'était certain. Non content de l'écraser sous la masse de ce véritable boulet de démolition, cette attaque lui saperait le moral, sans aucun doute. Qu'il était doux de combattre dans de telles conditions. Comme cela semblait épique! Il remerciait le Gardien du Dédale, au fond de lui, de lui fournir ce prétexte pour exprimer ses envies et son potentiel refoulé!

La masse m'arrivait dessus et je compris d'office qu'il était dangereux de subir son choc de plein fouet. Malheureusement, que pouvais-je faire ? L'énergie déployée me clouait sur place mais ce n'était pas la seule raison de mon inaction. Je désirais frapper fort. Psychologiquement parlant, évidemment. Et rien de telle que de subir l'une de ses meilleures attaques sans broncher. Concentrant tout de même mon cosmos dans ma cuirasse, je levais les bras et formais une sorte de bouclier spirituel. Ce dernier ne retiendrait qu'une partie de l'attaque tant la force me paraissait irrésistible. Mais il n'avait pas que pour but de limiter l'impact physique. J'espérais surtout supprimer le cosmos qu'il dégageait afin de m'épargner une suite de combat délicate.

Comme prévu, le choc fut redoutable, tant et si bien que je ne pus me maintenir à ma place plus longtemps. Mes genoux fléchirent et l'onde qui suivit me balayait déjà comme un fétus de paille. Traîné au sol comme un moins que rien, je sentais la douleur me paralyser brièvement les membres. Cependant, j'étais parvenu à repousser son cosmos et je me relevais, ravi de mon petit exploit. Sang et sueur se mêlaient mais j'allais moi aussi poursuivre mon offensive.

- Tu frappes fort mais ce n'est pas assez pour me scier les pattes. Dis moi, l'ami... Tu es sûr d’être un Berserkers ?

Petite réplique pour m'amuser. D'ordinaire, ça avait tendance à agacer les soldats d'Arès lorsque l'on remettait en doute leurs capacités martiales et leur droit d'êytre ne ce lieu. Et s'il s'énervait, alors il laisserait de grosses ouvertures dans lesquelles je m'infiltrerais pour lui porter le coup de grâce. Défier la Tarentule... Quelle erreur pour lui. Et je comptais bien le lui démontrer par la manière forte. Être un assassin ne signifiait pas pour autant être incapable de soutenir la comparaison face à un soldat plus brute que moi. Il cognait plus fort que moi. Mais était-ce suffisant pour me faire ployer ?

- Death current !

Profitant du fait que je n'étais pas loin de lui, j'optais pour une stratégie qui avait déjà portée ses fruits par le passé. L'électricité était une forme de combat que nombre d'homme n'appréciait pas. Mais pour ma part, j'aimais ses effets neutralisants. Pouvoir griller un adversaire, c'était plaisant. Mais le mettre à terre, à ma merci, voilà une chose qui me plaisait d'autant plus. Peu à peu, je redevenais ce paratonnerre vivant. Mes avants-bras semblaient concentrer la puissance électrique pour surprendre Lazar.

D'un bond, je me rapprochais de lui. Stratégie peut-être dangereuse du fait qu'il maîtrisait à la perfection l'art du combat au corps à corps. Néanmoins, il s'agissait aussi de ma spécialité, bien que je ne sois pas aussi fort que lui. Plus dans la surprise, plus dans la fourberie, je tentais une série de coup contre lui. Et enfin je voyais l'ouverture. Poussant sur mes jambes, je tentais de le repousser en arrière en basculant tout mon poids contre lui. Et là, je plongeais ma main vers son poitrail, espérant décharger une forte dose d'électricité afin de me permettre par la suite de le surprendre et de toucher au but. Affaiblir ma proie pour la dévorer sans qu'elle ne puisse réagir. Telle était le seul et unique but recherché lorsque je combattais.

La puissance de sa propre attaque avait caché sa cible, le temps d'un instant, posant une aura de mystère sur la suite des événements. Au travers du jeu de lumière, conséquence d'un tel déploiement d'énergie, Lazar vit le frêle mais néanmoins coriace combattant tenir tête, les pieds bien appuyés sur le sol, pour néanmoins chuter au bout d'un moment, sous l'effet de l'onde de choc. Affichant un sourire suffisant, le colosse écouta la piètre tentative de son adversaire pour se justifie, faire pencher la balance une fois de plus.

Étrange, pourtant. Tu rampais comme un vers l'instant d'avant, et maintenant tu t'pavanes! On peut dire que t'as des couilles!

Il ne notait pas l'attaque verbale de son vis-à-vis, la laissant glisser sur lui, comme le vent sur sa Cuirasse. Néanmoins sanguin, il savait que certains éclats n'étaient là que pour le pousser à la faute, et face à un maitre de la manipulation comme celui qui se trouvait face à lui, ç'aurait été une erreur monumentale.

Je n'suis pas très sûr de ce que j'suis. Mais heureusement, t'es là pour m'aider à l'découvrir!

Le laissant venir, puisqu'apparemment c'était là son intention, l'homme se frotta les mains, comme pour se préparer à devoir le saisir à bras le corps. L'autre usait une nouvelle fois de ses éclairs, semblant les générer autant qu'il s'en vêtait. S'étant laissé prendre une fois dans un piège de ce genre, le géant prenait maintenant ses précautions, préférant juger d'abord du degré de puissance de ce qui allait immanquablement lui arriver dans la tronche. Quand l'autre fut sur lui, il le laissa frapper, parant certains coups, en laissant passer d'autres, pour endormir sa méfiance. Visiblement, après tout ce qui s'était passé jusqu'à présent, l'oriental pouvait affirmer sans se tromper que l'homme en face de lui n'était pas habitué à l'échec, et mettait tout en œuvre pour ne jamais avoir à en goûter l’amère saveur. D'où peut être une excessive confiance en lui...

La somme des coups reçu commençait à se faire sentir. Vaincu par le nombre et la rapidité, le géant sembla trébucher, rien qu'un instant...suffisant pour que la Tarentule y trouve une ouverture et porte la frappe finale, de sa main crépitante. Directement pointée sur son sternum, celle-ci se retrouva pourtant bloquée à mi-chemin, par une mains aux proportions titanesques. Regardant son adversaire dans les yeux, Lazar sourit, une fois de plus, malgré les éclairs s'échappant par simple effet statique, et venant lécher son corps, le faisant une nouvelle fois tressauter. Quand enfin le dernier éclair s'en fut, l'homme lâcha la mains ainsi offerte. L'effet n'était pas amoindri: il avait prouvé sa capacité à encaisser les attaques de son adversaire. Et surtout qu'on ne pouvait le surprendre deux fois. Refusant de montrer à ce que cette bravade lui coûtait, il tenta de maintenir son dos bien droit, de garder l’œil grand ouvert. C'était la première fois qu'un combat prenait des proportions aussi épiques pour lui, et il se sentait, dans une certaine mesure, un peu dépassé par les événements.

Et ben, j'dois dire qu'tes tours de passe-passe sont plutôt amusants. Et j'pense même que ton entrainement et l'habitude que t'as d'user d'tes pouvoirs finiront peut être par avoir l'dessus sur moi. Mais j'te laisserais pas partir sans quelques doutes dans ton esprit, et surtout sans t'avoir complètement pressé comme un citron! Qu'tu saches que l'Prophète est pas v'nu m'chercher pour des prunes!

Tandis qu'il parlait, une aura puissante se répandit d'abord sur sa Cuirasse, pour ensuite se propager sur l'ensemble de son corps. Le Phacochère lui permettait de combattre encore un peu, lui prêtant sa puissance pour lui redonner vitalité et pouvoir. Usant de ses deux mains comme de cymbales, le guerrier vint les claquer l'une contre l'autre avec force, créant une nouvelle onde de choc. A cette distance, l'autre aurait bien du mal à se dépêtrer de cette attaque. D'autant que son adversaire avait la particularité de dépenser une énergie insoupçonnée, lorsqu'il se trouvait aux pieds du mur.

Me presser comme un citron ? Moi ? Décidément, il parlait vraiment trop. Qu'à cela ne tienne, j'étais disposé à subir son assaut en homme et à frapper une dernière fois pour lui montrer qu'on ne défiait pas ainsi le Maître de ce dédale. Ephtal ne l'avait pas trouvé pour rien, c'était une évidence, mais cet homme avait décidé d'éprouver la hiérarchie déjà existante et je ne pouvais permettre à n'importe qui de remettre en cause ma place. S'il voulait devenir important, il allait devoir travailler. Ce n'était pas aujourd'hui qu'il parviendrait à se faire une réputation sur mon dos. Je me le jurais.

Je fus toutefois assez surpris par l'aura qui émanait de lui. Le genre de pouvoir que ma propre cuirasse utilisait lorsque j'étais au pied du mur. Aujourd'hui néanmoins, je n'en ferai pas la démonstration. Mais voir cela de mes yeux me permettait de comprendre une chose : sa cuirasse semblait combattre à ses côté. Alors même qu'il était nouveau. Preuve d'une force de caractère étonnante, il est vrai. Quoi qu'il en soit, je repris rapidement mes moyens. Car déjà il passait à l’attaque et vu l'aura de puissance qui l'entourait, je craignais le pire.

L'onde de choc était déjà sur moi. Et le cosmos de Lazar eut pour effet de restreindre mes propres capacités. Cela, je ne le remarquais que trop tard, alors même que je tentais de me dépêtrer de son assaut. J'en repoussais une partie vers le plafond, générant un léger tremblement des fondations tant il venait de cogner fort mais j'en encaissé tout de même une bonne dose, me plaquant moi aussi au mur le plus proche. Un choc interne, sans le moindre doute. Car ce que je crachais au sol, ce n'était pas de l'eau, à coup sûr. Épongeant mes lèvres d'un revers de la main, je reportais mon attention sur le porc. Cette fois, c'en était fini de lui. Car en mon for intérieur, je savais que jamais je ne pourrais encaissé de nouveau pareille attaque. Et il en avait encore sous le pied, c'était une évidence.

- Des doutes ? Crois-tu vraiment que ce que tu m'as montré peut semer le doute en moi ? Imbécile. Des adversaires de valeur, ici, j'en ai affronté beaucoup. Et aucun ne m'a jamais vaincu. As-tu entendu, Lazar ? Aucun... Tu ne seras qu'un nom de plus sur la liste de ceux qui ont tentés de me déloger.

Ce que je ne disais pas, c'est que parmi ceux que j'avais affronté, aucun n'était parvenu à frapper aussi fortement au corps à corps. Ses coups m'avaient très certainement cassés une côte et cela devait se voir à ma façon de me mouvoir désormais, chaque pas devenant plus douloureux encore que le précédent. Incapable de faire appel à toute ma vitesse ordinaire, j'allais devoir passer par des moyens moins directs pour le vaincre. Heureusement, je n'étais pas l'assassin d'Ephtal pour rien. Et j'espérais que Lazar le comprendrait vite.

- Soit honoré, Lazar. Tu vas tomber sous les coups de la Tarentule ! Sudden Death, Mortal Cobweb !

La même technique, à une exception prêt. Car cette fois, ce ne serait pas que les fils qui seraient un danger. Dos au mur, je sentis mon ombre former un passage dans la paroi. Adressant un faible sourire au porc, je reculais d'un pas... Me fondant alors complétement dans les ombres. Je venais de disparaitre de sa vue et j'espérais bien jouer sur l'effet de surprise. Manipuler les ombres me demandait une dextérité particulière. Mais lorsque je parvenais à atteindre ma cible, elle n'avait aucune chance de se préserver de mes coups. Mais la douleur qui m'habitait était telle que je ne voulais plus jouer au jeu de cache-cache plus longtemps.

Dans son dos, j'ouvrais le second passage. Réapparaissant alors à ce moment précis. Comme précédemment, l'électricité parcourait mon bras. Et je plongeais ce dernier vers ma cible, espérant me servir de la force de pénétration de mon affinité et de la surprise de ma technique pour le frapper durement, mettant alors un terme à ce combat. Les dés étaient jetés.

Il avait claqué des mains, et ça avait porté pas trop mal. A vrai dire, même s'il se sentait de plus en plus las, le grand fauve profitait un maximum de ce qui lui arrivait actuellement. Comment ne pas faire autrement lorsque l'on découvre qu'un potentiel encore inexploité de destruction sommeille en soi? C'était comme de voler la pomme d'un vieillard, juste avant qu'il ne la croque. C'était divin. Son adversaire fit front, bien sûr, mais ne pu endiguer complètement la puissance de ce qui déferlait sur lui. Il avait peut être la technique, la maitrise et l'expérience, mais le colosse avait pour lui une envie, une puissance brute, comme un diamant encore à l'état naturel, qui demandait à être affinée, bonifiée avec le temps. Ses possibilités, à ce stade, étaient quasi-illimitées.

Avisant son adversaire au pied du mur, au sens propre, Lazar écarta ses mains, dans un geste triomphal. Ouvrant bien grand les bras, on aurait dit qu'il voulait serrer le monde entier dans ses bras. La Tarentule continua le petit jeu consistant à le mépriser de tout son être. Soit! L'oriental y répondrait de toute sa fougue!

Mais quand me prendras-tu au sérieux, mon ami? J'n'en suis qu'à mes début et déjà, j'te meurtris...ne joues donc pas au jeu de celui qui pissera l'plus loin avec moi, j'sais bien c'que j'tenvoies dans la tronche, aussi sûr que j'sais maintenant que tu frappes aussi fort qu'une tempête de sable! A ceci près que j'n'en suis qu'à mes débuts, ce qui veut dire que j'ai tout le temps devant moi pour revenir te titiller avec de la maitrise...traites moi d'imbécile si tu le souhaites, je te laisses ce droit, tu m'as été un très bon professeur, en même temps qu'un guide sympa. Bon et maintenant, je crois qu'on doit en finir...

Et c'est ainsi que le guerrier de la petite bébête velue à huit pattes disparu dans l'ombre, laissant le Phacochère seul, dans un silence qui sembla durer une éternité, à ce demander quoi faire.

Mais il est parti où le con?

Dans ton dos, mon gros. Comme l'éclair qui parcourait son bras, le svelte Gardien du Dédale frappa, embrasant une nouvelle fois le corps de sa cible de ses arcs électriques. Le cochon était cuit à point cette fois-ci, c'était une certitude. Il s'était précipité à la bataille comme un kamikaze, y laissant sa santé aussi vite qu'une bougie se consume. Mais il n'était pas triste, ni fâché, au contraire. Alors que la douleur s'insinuait en lui, emplissant peu à peu chaque fibre de son être, il se laissa aller à elle, savourant celle-ci comme une jouissance depuis jamais égalée. Il avait trouvé un type capable de lui faire prendre son pied, et s'en félicitait. Alors que son corps heurtait le sol, amas calciné, il attendit que tout se calme, que son corps sorte de ce tourbillon de noirceur, qu'il lui permette même l'usage de la parole, pour enfin adresser une ultime déclaration à son adversaire.

...

...

...

Vache, mon petit, si j'étais pas par terre, j't'embrass'rais sur les deux joues! Sans mentir, je crois que tu m'as fait venir dans mes chausses! Tu peux m'appeler mon cochon sans problème, mon chou, j'avais pas ressenti ça depuis la fois où on a chopé la caravane d'eunuque du sultan Al' Harib' Zahrum et qu'on les a obliger a sauter dans le vide, une pierre attachée à leur zigouigoui! Merci, mon ami, merci!

Et il laissa son nez retomber dans la poussière.

Citation :

Défaite, merci coupain! C'était chouette!

Mon ultime attaque avait portée ses fruits et c'est avec une certaine délectation que je l'avais vu chuter. Non pas que je prenne plaisir à vaincre mes semblables mais celui-ci s'était montré beaucoup trop arrogant pour que je lui laisse une chance de s'en sortir. Ses paroles creuses ne sauraient me faire réfléchir de plus. Je n'étais pas homme à être facilement déstabilisé par ce genre de chose. N'était-ce d’ailleurs pas un de mes moyens détournés pour perturber mes adversaires ? On ne pouvait donc attaquer un maître sur son propre domaine, une chose encore qu'il aurait à apprendre rapidement.

Mais blessé, je l'étais. Et un peu de repos ne saurait que trop me faire du bien. Pourquoi m'inquiéterais-je de son état de ce fait ? Une chose me paraissait évidente : il réclamerait sa vengeance lorsqu'il se sentira en état de me combattre de nouveau. Je doutais fortement qu'il ne soit pas ainsi, étant donné ce qu'il m'avait démontré. Je restais néanmoins satisfait d'une chose : s'il intégrait l'armée de mon seigneur et maître, alors nul doute qu'on en serait renforcé. Je préférais savoir le porc avec nous qu'avec l'un des trois autres. Mon amour limité pour les Cardinaux me forçait à me méfier de chacun d'eux, que je trouvais quelque peu irritant.

Mais je devais partir. Et vite. Car cette bataille avait déclenché quelque chose que je redoutais plus que la mort elle-même. Cette faim insatiable qui me prenait dans les situations les plus complexes. Et être prit en traître par cette drogue, alors même que face à moi se trouvait un homme inanimé, pouvait être plus dangereux encore qu'un combat. Il serait si facile de trancher la gorge à cet impudent et de se repaître de ses viscères. Tentant et quel repas, ma foi !

A cette simple pensée, je plaquais mes mains sur mes tempes, fermant les yeux et abandonnant toute réserve. Est-ce que d'autres entendirent le cri de rage que je venais de pousser ? Qu'importe, ils mettraient cela sur le compte du Gardien du Dédale. J'étais méconnu et cela me ravissait. Partir... Partir de cet endroit primait sur le reste. Tant pis pour Lazar, il découvrirait bien à son réveil comment sortir de cet endroit, de toute façon il restait proche de la sortie. Pour le moment, je me détournais et prenais mes jambes à mon cou.

Foutue faim !

[Repos 1/3]