Nous ne sommes que des amis de l'Empereur des Mers... Et au pire, que pourrait bien faire un simple duo face aux puissances de Poséidon ?

En effet, la bonne nouvelle était venue rapidement... Un chevalier en armure s'était présenté à leur rencontre, sur la défensive. Son écaille - comme les marinas nommaient leurs armures - était un mélange d'orangé et d'or, ce qui pourrait selon l'intuition d'Ephtal le définir à un rang élevé parmi sa hiérarchie. C'était aussi ce que son Cosmos pouvait laisser penser... Le Cardinal de la Mort avait fait de la perception des cosmo-énergies une spécialité, aussi pouvait-il savoir ainsi que son jugement avait une valeur certaine. Un affrontement ici ne serait d'intérêt pour personne, d'autant que ça ne pourrait que rameuter d'autres "collègues" de cet homme... Mieux valait poursuivre de sa voix calme et grave, et se laisser mener jusqu'aux influents représentants qui pourraient réellement s'exprimer au nom de Poséidon. Voir Poséidon lui-même, s'il disposait d'une réincarnation...

Mais je pense que ton maître sera le mieux placé pour juger de nos intentions...

Insidieusement, la Mort avait laissé un peu de son cosmos se dégager de lui, afin de court-circuiter les émanations de Guerre. En effet, l'énergie de son second avait tendance à pousser les tiers au conflit, ce qui n'était ici pas dans leur nécessité, que du contraire. Quelques instants plus tard, les deux Cardinaux d'Arès se trouvaient à monter les marches nombreuses menant au Temple de Poséidon. Ephtal se sentait observer, mais cela n'avait pas de réelle importance pour le moment. Évident que l'on ne ferait pas confiance immédiate à ces deux colosses qui ne s'étaient même pas donné la peine de se présenter. Cela ne saurait tarder pourtant, lorsqu'après leur ascension ils se retrouvèrent face à un homme portant une armure similaire à celle du chevalier qui était venu "les accueillir". Ephtal se découvrit alors le crâne en faisant basculer le morceau de toge qui lui servait de capuche, laissant alors voir avec aisance le masque de mort qui couvrait son visage, encadré de sa longue chevelure brune. Toujours il se servait de sa faux comme d'une canne, et bien qu'il portait ainsi une arme avec pareille évidence il ne faisait montre d'aucun signe d'agression... Sa voix puissante et rocailleuse fut alors la première à se faire entendre.

Enfin, nous nous rencontrons... Je suis Ephtal, Cardinal de la Mort au service de Sa Majesté Arès dont je suis le Prophète. Et cet homme est la Guerre, tout comme moi fidèle serviteur de notre Maître commun. C'est en paix que nous venons, si vous le permettez...

Il aurait voulu citer le nom de son interlocuteur alors, mais ne le connaissait tout simplement pas. S'il réagissait positivement, il y avait fort à parier qu'ils ne tarderaient pas à l'apprendre...

Il est dit que la musique adoucit les mœurs. Et dans les faits, c'est plus ou moins le cas. Alors que dire de cette mélodie envoûtante qui s'élevait du temple de Poseidon en personne depuis quelques instants ? Les notes de flute étaient accompagnées d'une voix splendide, cristalline, donnant à cet air une harmonie comme il n'en existait aucune autre de par le monde. Une symbiose de deux arts qui ne pouvait laisser indifférent aucune oreille. Là, debout, son œil valide fermé, Orpheus jouait comme il respirait. Aucun défaut ne transparaissait dans cette partition et la voix de Cléo ne faisait qu'élever cette musique au rang du divin, tout simplement.

Littéralement transporté, le Légat de Poseidon ne faisait désormais qu'un avec son instrument. Ce qui n'empêchait nullement d'être à l'affût des changements qui s'opéraient dans son monde. Il avait ressenti la perturbation très particulière du cosmos de ces deux individus et à l'instant même où ils étaient arrivés par l'arche d'Orichalque, il l'avait su. Ses sens en éveil, il n'avait fait qu'attendre qu'on escorte ces deux hommes - en étaient-ils vraiment ? - jusque lui. Alors que les dernières notes se dissipaient dans l'air, il abaissa les bras et rouvrit son œil. Masque de mort sur le visage et faux en guise de canne, voilà qui ne laissait que peu de doute quant à l'identité de ce fier guerrier. Et que dire de celui qui l’accompagnait ? Un tel duo ne pouvait passer inaperçu.

Sourire aux lèvres, Orpheus écouta les premières paroles du titan. Respectueux de l'étiquette, sa voix laissait comme une étrange impression dans le cœur du Légat. Et que dire de Guerre... Cet homme, il le sentait jusqu'au plus profond de son âme, était dangereux. Mais plus que leur apparence, ce fut les propos qui firent réfléchir le borgne. Ainsi Arès était sorti de sa torpeur. Et si le Dieu de la guerre en personne s'éveillait, si ses Cardinaux se regroupaient, alors cela ne pouvait signifier qu'une seule et unique chose. Cette nouvelle Guerre Sainte risquait d'être la plus redoutable de toute.

- Je le permet, Ephtal, Cardinal de la Mort. Soyez les bienvenues dans le royaume de mon Seigneur et Maître. A vous et à Guerre. Je suis Orpheus, Légat de Poseidon, son représentant sur terre et dans les mers. Et voici Cléo, Marina de la Sirène.

Si ces deux hommes étaient aux faits des légendes marines, nul doute qu'ils comprendraient à quel point il ne fallait pas se fier à leur maigre apparence. Ephtal avait dit venir en paix, ce qui était un paradoxe intéressant lorsque l'on connaissait le nom de celui qui l'accompagnait. De même lorsque l'on avait face à soi le Cardinal de la Mort.

- Vous savez ménager vos effets, représentants d'Arès. Mes oreilles sont à l'écoute du moindre changement et le réveil du Seigneur de la guerre m'a totalement échappé. Quelle heureuse surprise de vous voir devant moi en ce jour. Vous dites venir en paix, n'est-ce pas ? Et bien je suis impatient de savoir ce qui a conduit les Cardinaux d'Arès en nos murs.

En réalité, il s'en doutait. Si les fauves d'Arès parcouraient de nouveau les terres, ce n'était pas sans raison.L Et que le Prophète en personne daigne se déplacer jusque sur le territoire de Poseidon ne pouvait signifier qu'une chose : une alliance ou tout du moins un pacte en ce sens. Mais si tirer des suppositions était chose facile, Orpheus escomptait clairement en apprendre plus avant de tirer des conclusions.

Ainsi ils avaient pénétré sur le territoire de Poséidon ... Guerre et Mort, aussi paradoxalement que cela puisse paraitre, se présentaient en tant qu'émissaires de paix dans cet endroit défiant l'imagination. L'océan s'était mué en voute céleste, et en dépit des profondeurs, le soleil qui parvenait à se faire remarquer aussi profondément faisait jouer sa douce lumière par des réverbérations d'une délicatesse infinie.
Ces mêmes aurores, qui n'étaient toutefois pas boréales, étaient agrémentées par le propre miroitement des torches, elles-mêmes renvoyées par le plafond ondulant et aquatique. C'était une ambiance singulière si l'on considérait ce jeu de lumières, mais également l'architecture pseudo-grecque environnante. Le comble restait toutefois cette douce et envoutante musique qui semblait émaner du plus profond d'un tel lieu enchanteur. Cette symphonie semblait être un peu plus que quelques notes et quelques octaves, elle pénétrait dans les âmes comme pour tenter de les apaiser. Guerre, de par sa nature, n'était pas convertible, mais il pouvait aisément ressentir un tel pouvoir. Il était à vrai dire impressionné de constater qu'à l'instar de ceux qui poussent les hommes à se battre entre eux, d'autres, tels de parfaits jumeaux antonymiques, étaient capables de les apaiser.
Guerre ne pensait pas avoir trouvé un ou plusieurs alter ego, qui étaient blancs tout comme il était noir, mais une chose demeurait toutefois certaine : il ou ils disposaient d'autant de pouvoir que lui.

Il parvenait à distinguer les Cosmos de la Cité devant lui et au moins un se distinguait du lot, s'approchant sans mal du sien et de celui de Mort. C'était sans nul doute le responsable des lieux et celui qu'Ephtal désirait voir. Il s'agissait d'un homme à l'allure plutôt ordinaire, dont le visage aux traits fins témoignait d'une sorte d'indifférence ou de nonchalance qui aurait pu paraitre humiliante si Guerre se serait attardé à des choses aussi futiles. Ne brillant ni par sa carrure ou par sa taille, il était beaucoup plus inquiétant de se demander quelles sombres qualités, qui n'étaient clairement pas physiques, avaient conduit un tel homme à se hisser à un rang aussi élevé, puisqu'il se présentait comme le Légat de Poséidon, et à un Cosmos aussi puissant. Ses cheveux, tout aussi fins que pouvait être le dessin de sa figure, retombaient nonchalamment sur un bandeau qui recouvrait son œil droit. Le mystère restait entier quand à l'origine d'une supposée lésion aussi profonde, mais tout cela n'avait pour effet que de renforcer la couleur bleutée et l'intensité de l'œil restant.
Orpheus, Légat de Poséidon était accompagné par une personne au Cosmos nettement moins imposant que lui. Cléo, Marina de Poséidon, était une jeune fille à l'allure frêle et ayant dépassé de peu la puberté, pour peu qu'elle n'y soit pas encore. Son apparence fragile et son regard azur restait toutefois un leurre absolu pour le Cardinal de la Guerre. Il raisonnait peut être à tort, mais selon lui, n'était pas Chevalier, Berserker ou Marina le premier venu. Si son apparence n'incitait pas à lui confier un tel rang, son Cosmos et ses qualités, eux, ne devaient pas susciter autant de doutes à un tel sujet.

Ephtal et Orpheus avaient échangé, se présentant et offrant les politesses de base. Mort l'avait d'ores et déjà présenté, aussi n'eut il pas à prendre la parole dans une telle entreprise. Son prophète s'évertuait bien assez à tarir son Cosmos pour prévenir les Marinas de ses effets néfastes pour que Guerre ouvre la bouche. Etant un tel Cardinal, il ne pouvait que se réjouir des discussions à venir, se délectant de l'échange de dirigeants. Il fallait toutefois le reconnaitre, dans la majeure partie des cas, les guerres n'étaient issus que de la volonté de meneurs de peuples et de défendeurs d'intérêts.

Toutefois, après s'être présenté, la Marina s'exprima en des termes des plus étonnants. Si en effet, elle avait fait preuve de franchise tout en s'évertuant de se montrer la plus respectueuse possible, son point de vue, bien que compréhensible, restait toutefois erroné selon Guerre. Se sentant, une fois n'est pas coutume, une âme de diplomate, il posa ses yeux blancs délavés sur la jeune fille et prit la parole de sa voix grave et gutturale, laquelle donnait une impression de "non naturelle" :

- Ne vous tracassez pas, Cléo, Marina de la Sirène, nous sommes conscients de ce que nous sommes, de ce que nous incarnons. Toutefois, malgré votre franchise, que j'apprécie, et ce que nous pouvons vous évoquer, vous avez la sagesse de ne pas nous fermer vos portes. Je ne vous demanderais pas de nous "aimer", mais la Guerre et la Mort sont des concepts bien plus anciens que les hommes, voir que les Dieux eux-mêmes.

L'effort était fait de se vouloir promulgateur de paix, bien que cela ne soit pas vraiment dans sa nature, encore que : la guerre sous-entends des ennemis, mais qui dit des ennemis parle aussi d'alliés. Toute la logique restait présente, même si Guerre aurait eu tendance à vouloir amplifier le malaise de la jeune Marina pour faire naitre en elle son désir de combattre et d'affrontements, il avait l'intime conviction que les enjeux étaient plus grands. Pour servir des desseins plus vastes, intuition qu'il avait dans sa foi en Arès, dans son observation d'Ephtal et dans la propre raison de leur présence ici, avoir des alliés leur permettrait d'être plus viables dans un confit plus vaste, perspective qui le réjouissait.
Tout le jeu de la diplomatie, de la manipulation, du sous-entendu et de la stratégie allait se dérouler maintenant entre les deux représentants divins, offrant ainsi un spectacle que Guerre allait déguster comme un mets de choix.

"Légat de Poséidon". Voilà tout ce qu'il voulait entendre ! Avec la pouissance qu'il ressentait en ce temple, il lui semblait assez clair que Poséidon ne bénéficiait pas de réincarnation mais qu'à l'instar d'Arès, son âme reposait ici. À la différence que l'aura de l'Empereur des Mers n'avait rien de comparable avec celle de son Maître. L'on ressentait là bien le lien de parenté et ce qu'il impliquait, qui était l'oncle et qui était le neveu... Mais au jugé d'Ephtal, son propre Maître avait ce petit truc en plus qui selon lui comblait la différence... Soit ! Ce serait donc au Légat qu'il aurait affaire ici, son réel vis-à-vis, tout comme lui représentant et porte-parole d'une divinité du panthéon. Bien que borgne, le Prophète savait que ce genre d'handicap ne jouerait en rien dans le fait que cet homme se devrait d'être redoutable. Il n'était de toute manière pas taillé pour jouer dans le domaine de la force pure, mais il devait sans aucun doute avoir d'autres atouts, tel le totem qu'il représentait. La Sirène Maléfique... Rien que ça ! Et il n'était sans doute pas anodin que la jeune femme qui l'accompagnait soit la Marina de la Sirène.

En effet Orpheus, non pas que cela nous plaise d'être cachés mais c'était une nécessité... Sinon je n'aurais pas de Mort que le titre, mais également l'état, je suppose...

Pas besoin d'en dire plus à ce sujet. Pas étonnant qu'une citadelle souterraine construire par les soins des hommes d'Hadès ne soit pas si aisément repérable, et les multiples protections dont le domaine du Dieu de la Guerre avait été entouré permettait que son cosmos belliqueux ne puisse se détecter aussi simplement. Mais toutes ces données précises, il valait mieux de loin les garder pour lui, question de survie... L'homme lui parut toutefois aimable, ce dont il ne put se dire concrètement s'il estimait que c'était une bonne chose ou non. Si cela pouvait laisser penser que ça simplifierait la discussion, il était conscient qu'au final ça ne voulait rien dire... Le plus doux des visages peut n'être que le sucre enrobant le plus impitoyable des démons...

La jeune femme quant à elle donnait une réelle impression de naïveté féminine. Un coeur tendre à qui l'on a confié une armure redoutable pour qu'elle aille se battre... Pas à sa place, mais il n'était pas là pour juger. Toutefois, le Cardinal de la Mort n'appréciait qu'à moitié le jugement qu'elle venait d'émettre. Non pas qu'elle avait tout à fait tort, mais elle n'avait à son sens strictement rien à faire dans leur discussion, et il comptait bien le faire savoir... Non sans avoir au préalable accordé un coup d'oeil entendu à son acolyte qui s'était déjà chargé de lui faire savoir ce qu'il en pensait.

Sauf votre respect, jeune fille, une sirène n'est-elle pas censée être particulièrement bien placée pour savoir qu'il ne faut pas se fier aux apparences ?

Ce fut tout ce que sa voix rocailleuse lui adressa, le temps d'un furtif regard. C'était déjà bien qu'il lui ait adressé la parole. Et encore mieux qu'il ne se soit pas adressé à elle d'une manière plus naturelle ! Ephtal n'était pas parmi les plus grands adeptes de l'étiquette et de la diplomatie, la barbarie rentrant bien plus dans son domaine... Aux imaginations ensuite de s'entendre ce qu'il pensait si fort mais ne disait qu'à demi-mot. Certes, il aurait pu s'en tenir à la réplique que Guerre lui avait justement faite, mais il s'était senti d'enfoncer un peu le clou et de faire part de sa propre répartie... Toutefois, il n'y avait pas matière à s'y attarder plus encore. Les Cardinaux n'étaient pas là pour faire la discussion à une petite blonde de cet acabit.

Cet aparté fait, parlons bien...

Manière de dire "fini les ronds de jambe et les palabres inutiles". Encore une fois il avait dû faire un petit effort pour ménager sa franchise. Soit, maintenant que c'était fait, autant rentrer dans le vif du sujet.

J'ignore qu'elle est votre manière de voir les choses, mais je ne compte pas tourner plus longtemps autour du pot : si nous sommes là, c'est dans le but de rapprocher les forces de la Destruction et des Océans. Vous devez tout comme moi avoir pris conscience que l'alliance entre Athènes et Rome s'étiole, mais qu'ils restent malgré tout un ensemble robuste qu'il ne serait pas aisé de mettre à mal. Quoi qu'il en soit, ce monde a déjà bien assez mal tourné tant qu'Athéna et Apollon se trouvaient dans la lumière... Et cette Terre n'est plus peuplée que par des hommes décadents aux entreprises égoïstes ! Il est temps que d'autres plus compétents prennent l'avenir de cet univers en main...

Sa voix froide et grave avait été particulièrement directe. Un clair étalage des raisons qui le menaient à se présenter ici. Pas de mauvais tour à jouer, juste la proposition d'un projet commun, d'une association, d'une entente afin d'accomplir un but commun : renverser le pouvoir en place... Ni plus, ni moins !

Orpheus connaissait suffisamment bien Cléo pour savoir qu'elle ne faisait que respecter ses convictions les plus intimes. De tous, elle était certainement l'une des rares à être en parfaite symbiose avec son écaille. Une sirène en apparence frêle mais qui pouvait devenir une gardienne redoutable si le Légat de Poseidon se trouvait en danger. Mais plus que tout, ce fut l'intelligence des différentes réponses qu'elle reçue qui surprit le Légat. Guerre et Mort venaient de faire preuve d'une étonnante retenue en répondant à la Sirène. Preuve évidente que Arès n'avait pas choisi ses guerriers avec hasard. Si Orpheus ne tenait pas rigueur des propos de Cléo, il lui adressait tout de même une petite mise en garde silencieuse, l'invitant à ne pas faire trop étalage de ses états d'âme. Car aujourd'hui se jouait une alliance qui pouvait faire pencher la guerre d'un côté comme de l'autre.

Arès était jusque là resté silencieux. Mais ses armées se formaient. Qui pouvait se vanter de connaître cette information ? Le Légat le savait : personne excepté eux désormais. L'alliance entre Apollon et Athéna faisait bien pâle figure face à celle proposée par Ephtal. Cette fois, la diplomatie primait. Et savoir que l'oncle et le neveu batailleraient ensemble, c'était évidemment la promesse d'une belle victoire. Car des dieux de l'Olympe, ils étaient redoutés de par leur tempérament. Ainsi, pas étonnant que leurs armées fassent trembler la terre elle-même.

- Nous sommes d'accord avec vos paroles sages, Prophète Ephtal. Et l'Empereur des Mers a toujours soutenu que les humains pourrissaient cette terre. Ce monde mérite mieux... Et Poseidon n'a plus aucune confiance en Apollon qui l'a déjà trahi par le passé, lors de la guerre de Troie. Quant à sa nièce, il est de notoriété publique qu'il n'apprécie pas sa façon de voir les choses. Car si la déesse est celle de la Sagesse, elle n'en reste pas moins trop souple avec ces mortels. Votre venue en ce lieu est donc une aubaine et nous apprécions la marque de confiance que vous nous accordez.

Pour le moment, Orpheus préférait taire ses questions concernant l'endroit où se terrait l'armée du seigneur de la guerre. Car Ephtal avait raison en donnant les raisons d'un tel secret. La crainte qu'inspirait Arès était presque aussi importante que celle d'Hadès. D'une manière différente, cependant, mais pas moins tranchante dans les cœurs des hommes. Berceau de l’humanité, accompagnant les hommes depuis le commencement. La guerre reste et resterait une constante pour l'humanité.

- Qui d'autre sinon les seigneurs de guerre pour lutter à nos côtés... Aucun allié ne pourra nous être aussi utile que vous. Mais s'il en est ainsi, qu'en est-il du secret qui entoure le retour des armées du maître Arès ? Car je présume que nous avons la primeur de l'information. Ne voyez là aucune offense mais ma fonction et le rôle que j'occupe m'obligent à vous poser la question. Quelle preuve de confiance autre que celle de connaître l'emplacement de votre propre sanctuaire pour sceller cet accord ? Sachez que quoi qu'il advienne, nous n'avons qu'une parole. Poseidon ne revient jamais sur la sienne. Si vous mêlez vos forces aux nôtres dans la bataille titanesque qui s'annonce, alors personne ne pourra nous résister. Nos armées sont déjà prête au combat.

Comment avoir la certitude qu'ils combattraient côte à côte ? C'était presque impossible d'en être persuadé. Pourtant quelque chose poussait Orpheus a avoir foi en leur propos. S'il avait envoyé des émissaires voir les autres nations, ce n'était pas seulement pour tenter de connaître leurs intentions mais aussi pour leur montrer que l'Empereur des mers était disposé à écraser ceux qui s'opposeraient à sa conquête. Arès était différent. Et se partager la terre ne serait pas compliqué. Mais chaque chose en son temps et s'il était important de partir sûr de soi en pleine bataille, il ne fallait pas pour autant vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué.

Il fallait reconnaitre que les évènements prenaient une tournure inattendue sans qu'elle soit pour autant non appréciable. Bien que la situation n'étant pas imprégnée d'un pacifisme écœurant, surtout pour lui, Guerre trouvait que chaque intervenant avait grandement fait preuve de sagesse et de respect. Des propos du Légat, qui n'eut pas l'air d'hésiter une seule seconde ni même de douter un seul instant de ce dont quoi les dépositaires de la volonté d'Arès étaient capables, jusqu'aux excuses du simple Marina, tout cela n'était pour lui que des signes comme quoi ils avaient fait le bon choix en s'approchant des fils de Poséidon.
Le respect était pour lui le mortier de toute alliance militaire car du respect découlait souvent la confiance, bien que lui plus que quiconque savait qu'il s'agissait d'un élément factice d'une telle alchimie car il était l'exemple du concept même comme quoi la fin justifiait les moyens. Enfin la sagesse était simplement une garantie de survie. Le cas contraire aurait supposé de devoir œuvrer avec des demeurés congénitaux, n'ayant aucune lueur ou même un espoir de lueur d'intelligence, incapables d’aligner trois mots sans faire une faute de grammaire et ne jurant que par « taper, tuer, détruire ». Bien que n’importe quel conflit regroupait d’une manière ou d’une autre ces trois actions, la guerre était bien plus habile que ca, plus vaste, plus belles, ses horizons se portaient bien au-delà.

Mais pourtant Guerre restait malgré tout cruellement terre à terre, l’idée de passer les remous des temps à venir avec des alliés s’annonçant aussi « parfaits » l’enthousiasmait comme un enfant venant d’avoir un nouveau jouet … ou plutôt venant de se faire de nouveaux camarades de jeu. Un sourire se dessinait dans son esprit à la simple perspective du futur avec Poséidon à leurs côtés. Il inclina la tête avec respect :

- C’est à nous … à moi de vous remercier pour la confiance que vous nous témoignez, Légat de Poséidon. Peu sont ceux qui auraient su accorder du crédit aveuglément à une armée émergeant de nulle part et représentant la volonté d’un Dieu effacé. La seule réponse raisonnable qui s’offre et que vous vous en remettez au simple nom d’Arès et à ce qu’il est, bien sûr vous avez votre Maitre et nous le Notre, mais il s’agit toutefois d’un acte que je n’oublierai pas, soyez en assuré.

Effectivement, il était sincère. Le fait de « ne pas oublier » s’appliquait à double titre, dans le meilleur des cas parce qu’il s’agissait d’un acte qui l’avait touché. Mais dans l’autre, dans le cadre d’une réponse « non raisonnable » aux questions de Guerre, qui serait par exemple un coup d’esbrouffe magistral pour mieux les doubler et les trahir, il serait loin de l’oublier également.
Le Cardinal « était » la guerre, il ne connait que trop bien les lois de la manipulation et de la trahison, ce qui consiste une des raisons qui l’amène toujours à se réjouir avec retenue, évaluant et construisant en permanence des plans à l’intérieur des plans, créant ainsi un arbre ayant pour objectif d’avoir autant de branches qu’une plage peut avoir de sable.
Guerre poursuivit de sa voix outre-tombe, s’adressant à la Sirène pour revenir ensuite à Orpheus :

- Merci pour votre sollicitude, Cléo, Marina de la Sirène. Bien que nous soyons habitués à de tels raccourcis, vos propos vous excusent entièrement.

Il plongea ensuite son regard délavé dans l’œil unique de son interlocuteur :

- Votre demande est bien entendu légitime, outre la confiance que nous vous accordons en vous dévoilant notre existence, je comprends que vous vouliez connaitre l’emplacement de notre sanctuaire, puisque nous connaissons le vôtre. En ce qui me concerne, je n’y vois aucun inconvénient, surtout s’il s’agit de la condition sine qua non pour matérialiser notre accord. Si vous le désirez, je me ferais un plaisir de vous le faire visiter.

En suggérant que les Berserkers avaient tout de même pris un risque énorme en se dévoilant à Poséidon. Guerre espérait secrètement qu'Orpheus comprenne qu'en fin de compte, l'égalité était bien là et renonce à voir leur Sanctuaire. Bien que les modalités pour y pénétrer les protégeaient contre presque tout, si il était possible de se passer de la divulgation d'une telle information alors autant saisir une telle opportunité. L’heure était toutefois venue pour le Prophète d’avoir le dernier mot, et donc celui d’Arès.

Les demandes d'Orpheus lui paraissaient raisonnables. Ephtal trouva tout du moins intéressant que le Légat partage une vision des choses assez proche de la sienne. Tant mieux, ainsi il n'y aurait pas de perte de temps en discussions inutiles. Personne à convaincre lorsque les leaders déjà sont d'un avis similaire. Tous deux voyaient l'utilité en le rapprochement de leurs armées, aussi n'y avait-il pas à prolonger la discussion sur ce fait et les intérêts qu'ils pourraient y trouver. Guerre quant à lui se montrait comme un grand diplomate, preuve s'il en était que le nom qui le désignait ne faisait pas de lui un simple monstre assoiffé de conflit et de sang. Peut-être aurait-il été avisé de lui confier l'expédition en Asgard... Mais il n'aurait alors pas bénéficié du cosmos d'Ephtal, capable d'amoindrir l'influence de celui du Général des Flammes. C'était en effet le point dommageable si on lui confiait ce genre de mission : sa cosmo-énergie possédant la particularité de provoquer le conflit, comment le laisser partir seul pour mener de diplomatiques discussions ? Non, c'est ensemble qu'ils seraient plus efficaces, il n'y avait pas à revenir sur ce fait. Toujours est-il qu'il avait bien parlé. Certes, le Cardinal de la Mort aurait pu s'offusquer que son second prenne la parole pour signifier un accord sur lequel le Prophète lui-même ne s'était pas exprimé, mais Guerre s'était exprimé avec sagesse et raison, point de raison de le brimer donc. Avant de parler à son tour, Ephtal lança toutefois un regard à l'adresse de la jeune femme. Un coup d'oeil si froid et dur qu'il ne pourrait être qu'évident qu'il se serait bien passé de sa présence... Pour peu, s'il s'était laisser aller à faire part de ses caprices, il aurait réclamé à ce qu'elle quitte la pièce avant toute chose, mais cela n'aurait fait que causer une perte de temps. De plus, il suffirait à Orpheus d'informer sa suivante dès le départ des Cardinaux, et cela n'aurait donc servi à rien. Il ne réclama donc rien, préférant ainsi conserver la bonne entente qui était parvenue à s'installer entre les principaux interlocuteurs.

C'est une demande légitime, comme le fait remarquer Guerre. Je ne vois donc aucune raison de vous priver de cette information, vous faisant confiance quant au fait que vous la garderez pour vous... La citadelle d'Arès se trouve aux abords du lac Shkodër, en les plaines balkaniques. Ce dernier est assez vaste, et notre antre est souterraine, aussi même avec ces informations vous ne pourrez sans aucun doute pas la trouver sans un guide. Mon ami ici présent s'est déjà proposé en ce rôle, aussi ne vous privez pas d'y faire appel, même s'il m'est avis que vous avez d'autres chats à fouetter plutôt que de vous adonner au tourisme...

Faisant passer son énorme faux dans sa main gauche, il tendit la droite gantée au Légat de Poséidon, ne quittant pas le borgne des yeux depuis qu'il avait commencé à révéler l'emplacement du Temple du Dieu de la Destruction.

Il me semble donc qu'il ne reste plus qu'à enterriner cet accord d'une bonne poignée de main, non ? À moins que vous ayez encore d'autres réclamations à nous faire part...

Sa requête était acceptée, entérinant alors l'accord verbal des deux armées. Les plaines balkaniques... Ainsi c'est là que le dieu de la Guerre avait décidé d'héberger son armée. Une citadelle souterraine, voilà qui n'était pas commun. Mais pourquoi pas après tout puisque Poseidon lui-même siégeait dans un palais situé sous les mers. L'idée n'était par ailleurs pas stupide puisque cela leur permettait d'avoir un contrôle absolu sur les entrées et les sorties de leur territoire. Guerre s'étant proposé à servir de guide, le Légat n'allait certainement pas s'en priver. Même si Ephtal avait raison sur un point : l'heure n'était pas au tourisme mais bel et bien à la consolidation des positions du Seigneur des Mers.

Songeur, Orpheus notait mentalement les informations qu'il venait de recevoir. Car désormais, le pacte entre Arès et Poseidon était en passe d'être scellé. La main gantée du Prophète s'avança vers lui, en guise d'acceptation. Et il ne voyait aucune raison de refuser ce contact qui était une sorte de coutume pour certaine nation. Alors qu'il l'empoignait, les fluctuations de cosmos du Prophète surprirent le Légat. Lui qui était sensible à ce genre de chose, il en fut un instant déstabilisé. Il ne montra néanmoins pas son trouble, préférant se reculer une fois le pacte entendu.

Son regard passa alors sur Guerre. Plus il était proche d'eux, plus il sentait les pulsions qui émanaient de ces deux êtres. ce qu'il avait ressenti ne ressemblait aucunement à de l'animosité. Mais plutôt à une sorte de contrôle. Guerre et Mort ensemble étaient dotés de grands pouvoirs, à n'en pas douter. Et la preuve était là, devant lui, presque invisible aux yeux des mortels et qui pourtant pouvait apparaître clairement à qui savait regarder. Surtout pour un homme habitué à jouer avec les sentiments des autres. Cette alliance promettait de belles choses entre ces deux armées, Orpheus en était persuadé. Encore fallait-il ne pas céder aux pulsions des guerriers d'Arès.

- Aucune autre réclamation, Prophète Ephtal. J'accepte également avec plaisir l'invitation de Guerre concernant la visite de la Citadelle. Encore que pour le moment, je ne sois pas vraiment disponible. Puisque les choses sont entendues, je vous prie de m'excuser tout deux mais je ne vais pas pouvoir profiter de votre présence encore longtemps. Les affaires de mon Seigneur m'appelle à quitter le Sanctuaire sous-marin pour laisser un message retentissant aux guerriers d'Athéna. Il est temps pour nous de nous élever aux yeux du monde. Je tairais notre alliance pour le moment, afin de garder au mieux l'effet de surprise.

Pourquoi mentir sur ses intentions ? Orpheus n'en voyait pas l'utilité et essayait de leur prouver immédiatement l'importance de cette entente. Affirmer qu'une alliance avec Athéna était exclue d'emblée prouvait que Poseidon savait à qui parler. Adressant un petit signe de tête aux deux hommes, signe qui signifiait clairement la fin de cet entretien, il attendit qu'ils quittent les lieux. La Marina de la Sirène avait tenue son rôle et il était inutile de lui demander de taire ce qu'elle avait entendu en ce lieu. Le culte du secret était sans doute idiot mais Orpheus avait une foi aveugle en la jeune femme. Les mots étaient donc superflus.

Restait désormais à préparer l'expédition à Athènes.

Citation :

RP terminé

Les mains des deux leaders se serrèrent, confirmant alors l'accord entre ces deux factions. Ainsi, par une poignée entre deux hommes, ce furent des Dieux qui venaient de s'allier dans la Guerre Sainte qui les opposeraient bientôt à Athéna. Poséidon et Arès marcheraient donc de concert, dans une entente qui ne pourraient que s'annoncer puissante et belliqueuse. La fureur des Océans et la rage de la Destruction, de quoi retourner le pouvoir en place sur cette planète par la force. Dans un sourire, l'homme au masque de mort inclinait légèrement la tête, comme reconnaissant des fruits de cette discussion rapidement menée.

Vous m'en voyez ravi !

C'était réellement le cas... Les troupes d'Arès ne pourraient que grandement bénéficier de l'apport des armées de Poséidon. L'inverse était vrai également, mais il était évident que l'Empereur des mers possédait une plus grande puissance de frappe. La poignée de main s'interrompit alors qu'Orpheus proclamait la fin de l'entrevue. Il n'y avait en effet plus rien à rajouter. Que dire d'autre à présent ? Tout ne pourrait être que futile... Et puis ce n'était pas comme s'il y avait déjà des plans à organiser, cela viendrait en son heure, plus tard... Ephtal devait avant tout apprendre ce qu'Hadès et ses Spectres pouvait bien avoir en tête. Car en effet, l'alliance ici décidée n'était pas la seule à mettre au crédit des Berserkers. Le Dieu de la Guerre et celui des Enfers, après tout, étaient alliés depuis bien plus longtemps, la citadelle infernale ayant même été érigée par les mains des hommes d'Hadès, ni plus ni moins... Le Prophète n'en ignorait rien, et son maître avait déjà pu lui souffler que l'heure serait bientôt venue où son oncle sortirait de son Royaume pour laisser ses forces se déverser sur le monde. Et cela, Ephtal ne trouva aucun intérêt à le révéler... Orpheus s'en rendrait bien compte en temps voulu...

Et bien, dans ce cas... Nous aussi nous avons encore à faire, et comprenons donc parfaitement qu'il n'est pas nécessaire de provoquer de pertes de temps supplémentaires aussi bien pour vous que pour nous. Si vous pouviez juste... ne pas ravager totalement le Sanctuaire et nous en laisser un peu, cela serait un geste appréciable...

Une légère pointe d'amusement dans sa voix lorsque ces mots sont prononcés. Le moment de faire demi-tour est venu. Sans rien ajouter, il tourna donc les talons, se dirigeant vers la sortie du temple sans même un regard pour la jeune femme.

Viens, Guerre, allons-y. Nos montures doivent se languir de nous sans doute...