À la nuit tombée, même le lieu grouillant de vie qu'était d'ordinaire le Sanctuaire retombait dans les méandres abyssaux du silence. Si certains devisaient toujours à la lueur des torches, ce n'étaient que des murmures en comparaison de l'animation qui régnait en maître sur la place à longueur de journée. Et s'il était d'agréable compagnie, toujours prêt à engager une conversation avec une courtoisie sans égal, il en aimait d'autant plus le calme et la tranquillité quand enfin on le laissait seul après une rude journée. Si autrefois la solitude avait pu lui peser il n'en restait plus trace, le fait d'être constamment sollicité en sa qualité de grand pope devant aider à apprécier les rares moments où il pouvait se ressourcer sans que nul ne vienne troubler sa quiétude. Ainsi, les jours se suivaient sans se ressembler. Le plus regrettable était de ne pouvoir regagner la maison du Sagittaire qui l'avait vu grandir et mûrir ces dernières années avant qu'on ne l'appelle vers de plus hautes strates. Veiller sur le domaine dans sa globalité n'était pas de tout repos mais ce qui lui manquait le plus était très certainement de converser à loisir avec le Scorpion qui le précédait dans la traversée ascendante des douze maisons.

Une activité certes discutable mais pouvait-on vraiment leur reprocher de ne pas être sur le qui-vive alors que nul danger ne menace ? Songeur, Arsiesys conclut que si le danger avait du être à leur porte il aurait eu toute confiance en Antares pour l'empêcher de venir jusqu'à lui. Cette époque était lointaine désormais et il n'y avait plus lieu de s'en faire, car avant d'arriver jusqu'à eux il fallait déjà franchir pas moins de sept demeures dont plusieurs avaient trouvé preneur. Si toutes n'étaient pas occupées, le rythme endiablé auquel les armures d'or trouvaient chaussure à leur pied dernièrement sous-entendait que cela pourrait ne plus être le cas très longtemps. Certes, être envahis de nouvelles têtes voulait aussi dire renoncer à toute une époque où ils étaient seuls à y monter la garde. Mais voir ce Sanctuaire qu'il chérissait tant pour tout ce qu'il représentait à ses yeux reprendre vie était un ravissement. Il regrettait juste de ne pouvoir être là pour leur faire un accueil chaleureux, cloîtré au sein de l'ultime étape attendant au bout de ces escaliers sans fin.

Prisonnier d'une tour gardée par un dragon, se disait-il avec amusement, se demandant si maintenant que c'était le prince charmant qui y était retenu une princesse viendrait à sa rescousse. Seulement, la seule qu'il puisse envisager ne les avait pas honorés de sa présence jusque là. Pourtant, ce n'était pas ce qui le découragerait de scruter chaque soir la statue à son effigie trônant sur l'esplanade. Peut-être était-ce dans l'espoir d'y voir un signe indiquant sa réincarnation prochaine, lui-même n'aurait su le dire. Mais il ne perdait pas espoir de devoir un jour poser genou à terre pour la recevoir avec les honneurs qui lui sont dus. Pour l'heure le mieux qu'il puisse faire était de prendre son mal en patience et de ne pas faillir à la tâche qui lui avait été confiée, la mission divine de prendre en main la régence du Sanctuaire et de tout faire pour en assurer la pérennité. Perdu dans ses pensées, il avait laissé ses sens s'engourdir et son cosmos s'éteindre, si bien qu'il ne se rendit compte qu'à la dernière minute qu'il n'était plus seul quand des bruits de pas lui parvinrent.
Un visiteur à cette heure tardive était chose peu commune mais une rencontre à la faveur des étoiles ne pouvait qu'être bon signe. Vêtu de l'habit traditionnel que lui avait conféré son statut de maître des chevaliers il ne payait pas de mine pour qui n'y prenait pas garde, mais son regard était toujours aussi déconcertant pour qui avait le malheur de le regarder en face plus que de rigueur. Sillonnée par le vent nocturne, ses mèches saphirines se mirent à danser tandis qu'il faisait volte-face pour mieux discerner celui qui avait eu l'impatience de s'introduire chez lui sans attendre le lever du jour.

- Si je m'attendais à recevoir de la visite à cette heure... À qui ai-je l'honneur ?

Corvus se sentait littéralement capable de voler lorsqu'il entra dans la demeure du Grand Pope. Et le fait qu'il portait à cet instant l'Armure du Corbeau n'était qu'une coïncidence.
Il vivait la même sensation que la première fois que les pièces qui composaient la Raven Cloth s'était emboîtées sur son corps : un sentiment de puissance, d'achèvement, de complétude. A présent, le port de son Armure se couplait à son entrée dans la haute sphère du Sanctuaire, le lieu qui accueillait celui pour qui il allait se battre et pour qui il avait tant donné. Le Grand Pope serait, c'était certain, un individu puissant et, peut-être, sage et protecteur. Il tardait à Corvus de le rencontrer depuis l'instant où il s'était mis en route vers Athènes. Ce soir, il allait se présenter à lui, dans son uniforme de Chevalier, pour lui prêter allégeance et l'assurer de son dévouement, pour lui et pour Athéna. Peut-être même, avait-il espéré, pourraient-ils converser – mais l'emploi du temps du chef des Saints ne serait sans doute pas compatible avec ce souhait, et il ne se fit pas de faux-espoir.

L'endroit lui était totalement inconnu. Il avait gravit la colline sur laquelle se dressaient les Maisons des Gold Saints et pour le moment, tout n'était que répétition : les mêmes salles sur les mêmes plateaux, avec les mêmes escaliers gardés par des colonnes de pierre. Il s'attendait à une nuance pour le Temple et il y en eu une : un tapis rouge, impérial, menant au trône.
Au trône vide.
Corvus plissa les yeux. Le Grand Pope n'était pas là ? Sa venue tardive, bien que quelque peu déplacée, aurait dû lui assurer la présence du chef suprême. Où pouvait-il se trouver, sinon en ces lieux ? Le romain eut une idée et, profitant de l'Armure sur son dos, invoqua un corbeau qu'il envoya chercher âme qui vive. Il n'eut même pas le temps d'explorer l'endroit que déjà le volatile lui indiquait l'arrière de la Maison.
Bientôt, Corvus escalada un autre escalier et se trouva devant une majestueuse statue représentant la divinité chargée de veiller sur les lieux. Il distingua également une silhouette et il prit la peine de s'incliner respectueusement devant la représentation divine avant de se tourner vers celui qui était de toute évidence, au regard de sa stature et de ses effets, le Grand Pope. La nuit ne facilitait pas les choses, mais Corvus crut remarquer des cheveux bleus, à la couleur plus marquée que les siens. Son corps bascula à nouveau, tandis que son corbeau éclaireur se posait sur son épaule.

« Je suis Corvus, Chevalier d'Argent du Corbeau et je viens me présenter à vous, Altesse, et vous assurer ma dévotion. »

En vérité, Arsiesys aurait pu reconnaître entre milles la Cloth du Corbeau. S'il s'était donné du mal pour mémoriser chacune d'entre elles, celles qui partageaient des points communs avec la sienne restaient les plus faciles à identifier. Qu'il soit à ce point éclairé sur la question, il n'y avait que peu de gens à le savoir et poser cette question anodine était bien souvent utile pour procéder à un test. En effet, tout chevalier digne de ce nom était tenu de venir présenter ses hommages à la statue dès son arrivée au Sanctuaire. Et invariablement, il émettait cette interrogation envers chacun de ceux qui gravissaient les marches jusqu'à elle.

Voir qui avait l'audace de lui mentir, quelle qu'en soit la raison, était une bonne manière d'en apprendre un peu plus sur tout un chacun – et peut-être aussi de savoir de qui il devrait se méfier à l'avenir. Par chance, Corvus s'était monté discipliné et ne s'était pas fait prier pour dire toute la vérité. Certes, ce n'était pas son véritable nom, mais cela le Sagittaire ne pouvait le savoir et il était libre de vouloir en changer. Il devait forcément y avoir une explication derrière cela, un motif qui ne regardait que lui. C'était sans importance, car au sein du domaine sacré de la déesse Athéna, il ne serait plus connu que comme le Corbeau. Celui qu'il avait pu être par le passé n'était plus, et c'était très bien ainsi. Ainsi donc, il adressa un chaleureux sourire à son visiteur, la mine paisible.

- Bonsoir à toi, Corbeau. Je ne peux que te féliciter de n'avoir pas manqué à tes devoirs. Tous ne sont pas si prompts à assumer leurs engagements. Je te rassure, ce n'est pas d'avoir la coercition de mon côté qui me fera te l'infliger si tu venais à faillir à tes obligations. Soit... Bienvenue parmi les tiens. Puisses-tu y déployer tes ailes comme bon te semble.

En écho à cette invitation, les siennes se déployèrent brusquement, mirifiques. Leur envergure était sans conteste impressionnante, plus qu'il n'en faut pour soulever un homme de terre et en faire un maître du domaine céleste. Cachées sous son habit, nul n'aurait pu soupçonner leur existence sans connaître précisément les fonctions que cumulait leur porteur. Ainsi, dans un souci de transparence, Arsiesys les avait forcées à se manifester pour que son interlocuteur sache précisément à qui il avait affaire. Non seulement au Grand Pope, mais également au Chevalier d'Or du Sagittaire, même si cela allait à contrario de la réglementation interne du Sanctuaire. Cela, Corvus ne pouvait en toute théorie pas le savoir – pas encore – et le fautif lui-même n'avait pas de quoi en être fier. Et ce n'était pas le cas.

On lui avait forcé la main pour qu'il en arrive à cumuler ces emplois, tant parce qu'il se refusait à braver un interdit que parce que le rôle de maître des chevaliers n'était à son sens pas taillé pour lui. Et finalement, il en était là. Et il fallait admettre qu'il ne s'en sortait pas si mal, en dépit de toutes ses protestations quand avait été émise l'idée de le mettre sur ce trône tant convoité. Serein, le Gold Saint s'avança à la lueur des torches, qui permirent à son vis à vis de se rendre compte que sa chevelure avait bien la teinte qu'il avait cru discerner. Peu commune en ce bas monde, mais tellement plus courante une fois en marge de la réalité, au coeur de cette guerre qui unit autant qu'elle déchire les hommes et les dieux. Une main est tendue, amicale et pleine d'encouragements.

- Ce n'est pas à moi que tu dois prêter serment, mais à la statue qui se dresse en mon dos. Je ne suis, au final, rien de plus que son émissaire. Si c'est moi qui donne les ordres en son absence, la déesse Athéna n'en reste pas moins la seule en mesure de recevoir ta gratitude et ta dévotion. En ce qui me concerne, je ne serai que ton compagnon sur le champ de bataille... Le protocole veut que tu doives me respecter et tu m'en vois navré, mais sache que je ne me considère pas comme ton maître. Je ne suis qu'un humble messager, et ce n'est pas d'avoir été autorisé à revêtir une armure d'or qui me rend meilleur que toi. N'en doute jamais.

- Ainsi, je parlerai et mon verbe sera ton ordre.

Son cosmos, de même que le vent, se leva pour le parer de son voile fabuleux. L'énergie qui entourait Arsiesys était celle d'un soleil, qui à son image éclairait ses pairs de ses lumières. Pour peu que Corvus se donne la peine de le mémoriser, il pourrait ainsi aisément le reconnaître à l'avenir, ce qui tôt ou tard lui serait utile. Le but n'était nullement de l'impressionner, mais de parfaire son éducation. Il était fort probable qu'il n'ait jamais connu la sensation que procure la proximité d'un chevalier d'or. Ainsi saurait-il ce ressentent ceux qui font route commune avec ces hommes d'exceptions, en plus de savoir comment localiser le maître des lieux en cas de besoin. À cet instant précis, tout son être devait vibrer de connaître pour la première fois l'aura qui émane de ceux qui à compter de ce jour seraient ses compagnons d'armes.

- En revanche, je n'apprécie guère être appelé par ce titre. Je ne peux admettre qu'on ne me connaisse que par son biais alors qu'il me rend différent de vous. Quoi qu'il arrive, je marche à vos côtés et en tant que tel je reste l'un des vôtres. Je me prénomme Arsiesys, tâche de t'en souvenir, veux-tu ?

Nulle remontrance dans la voix, tout au plus un ton professoral. Tous ceux qui avaient eu le malheur de nommer le Grand Pope par sa fonction avaient connu le même sort, le Corbeau ne pouvait donc pas déroger à la règle. Il était peut-être de haut rang pour avoir fini par céder aux supplications de ses camarades, mais refusait de se séparer d'eux en sacrifiant son nom au profit de son devoir. Il tenait à son identité et à ce qu'ils le considèrent d'égal à égal, même s'ils ne pouvaient décemment pas le traiter comme tel publiquement – à son grand regret. Son but était d'être considéré comme l'humain qu'il était plutôt que comme l'entité supérieure que l'on croyait deviner derrière le masque du Pope. Masque qu'il ne revêtait que trop rarement, de même que le casque, les cérémonies l'exigeant se comptant par chance sur les doigts de la main. En ces temps troublés, il estimait plus crucial que jamais de rappeler à tous qu'il était leur égal et pouvait à ce titre offrir une oreille attentive à toutes leurs appréhensions.

Sans se départir de son sourire, la mine rayonnante, il suivit du regard plusieurs des volatiles saillis du plumage de son interlocuteur. Amical même envers eux, il n'hésita pas à redresser l'une de ses ailes pour leur offrir un perchoir de qualité. La brillance étant une perpétuelle source de fascination pour ces animaux, il ne fallut qu'une fraction de seconde pour qu'ils se disputent cette place de choix sous son regard amusé. S'efforçant de la tenir parfaitement droite pour ne pas troubler leur quiétude, il reporta son attention sur le maître de ces compagnons à plume. Si on les disait de mauvais augure, lui n'y voyait qu'autant de nouveaux alliés aux talents multiples qui sauraient sans nul doute trouver leur utilité au sein du Sanctuaire. Lui-même avait d'ores et déjà constaté la parfaite opposition qui l'unissait à Corvus, lui aussi bête ailée mais d'une noirceur intense à la différence de lui qui brillait de mille feux même au fin fond de cette nuit étoilée.

Sa magnificence se suffisait à elle-même et en faisait une lueur d'espoir même au creux des plus noires ténèbres, et c'était sans doute pour cela qu'il excellait en tant que seigneur du Sanctuaire depuis qu'on lui en avait confié la lourde tâche et ce même s'il n'était pas de cet avis. Sa senestre s'éleva avec une grâce irréelle pour accueillir un énième corbeau, qui n'avait su trouver de place aux côtés des siens et choisit de s'installer sur la pièce d'armure couvrant sa première phalange. Observant l'obsidienne de son plumage avec une bienveillance ne faisant pas l'ombre d'un doute, il reprit la parole avec la limpidité du cristal, celle-là même qui semblait jaillir directement de son âme à travers toute la force de cette cosmo-énergie qu'il laissait en liberté avec la facilité d'une respiration. La délivrer de ses chaînes était si spontané désormais que c'était comme s'il savait le faire depuis la naissance, comme s'il l'avait toujours su au fond de lui.

- Parle, Corbeau. Conte-moi ton histoire et dis-moi comment tu es arrivé jusqu'à moi. Je veux tout connaître de ton récit, tes succès autant que tes déconvenues. Narre-moi l'obtention de cette armure que tu portes avec fierté, ce qui a fait de toi l'un des nôtres. Je t'écoute, n'aie crainte, aucun de tes mots ne saurait être vain.

Comme il était en droit de s'y attendre, le récit de la vie de Corvus ne différait qu'en peu de points de celle d'un Saints ordinaire. Une formation somme toute assez banale pour qui en était fin connaisseur. Ce qui était hors du commun pour un homme n'ayant pas leurs facilités n'était pour eux qu'une formalité de la vie de tous les jours. Cet entraînement avait vu le jour de manière à les détacher de leur condition humaine, de les purifier des vicissitudes de la vie avant qu'ils ne prêtent serment à celles qu'ils ont pour devoir de servir et protéger. Tous ne s'en tiraient pas avec la même facilité et s'il avait été acclamé pour son exploit parmi les siens, le Corbeau ne ferait ici que se fondre dans la masse. Arsiesys reconnaissait pour sa part la valeur de tous ceux qui réussissaient à tolérer ce passage obligé, du plus faible au plus fort. Si bien sûr il était plus enclin à se reposer sur ses semblables, c'était parce qu'ils couraient moins de risque face au danger que leurs subordonnés et qu'il tenait tout particulièrement n à ne pas verser dans les sacrifices inutiles.

Plus que quiconque il savait combien une existence peut être précieuse, peu importe de laquelle il s'agit, et s'il avait déjà du mal à se résoudre à porter le coup de grâce envers un ennemi cela n'allait pas en s'arrangeant quand il s'agissait de ses alliés. Même la plus petite étincelle de vie méritait d'être sauvegardée et c'était là l'un des principes auquel il s'astreignait avec rigueur en tant que Grand Pope. Une discipline certes louable mais non moins utopiste, et c'était là le nœud du problème. Une guerre ne se fait pas sans morts, et son camp ne ferait pas exception en dépit de tous ses efforts en ce sens. Cela lui laissait en bouche un goût amer, mais malheureusement il lui serait impossible de s'en défaire... Ce n'était pas en son pouvoir, pas plus qu'en celui de la déesse Athéna. Et s'il y était un tant soit peu attentif, Corvus aurait pu distinguer les légères cernes résultant du mauvais sang qu'il pouvait se faire à ce sujet. Distrait par ces pensées parasites, le Sagittaire n'eut pas de réaction quand son vis à vis lui avoua ses penchants – bien que le fait que cela ne fasse pour lui aucune différence devait aussi grandement y contribuer.

- ...Et c'est ainsi que Octavius disparut pour ne plus laisser que Corvus, Silver Saint du Corbeau. Une page qui se tourne et le début d'une nouvelle vie ! J'aurais aimé pouvoir en faire de même, mais mon passé ne me l'a pas permis. N'aie crainte pour ton secret, il sera bien gardé.

Tant que cela ne troublait pas l'ordre établi au sein du Sanctuaire, il n'avait pas de raison de s'en faire à ce propos. L'archer était ouvert à toute différence culturelle ou ethnique et tenait à mettre tout le monde sur un pied d'égalité pour que nulle discorde n'éclate en ses rangs. Tous n'y mettaient bien sûr pas autant de ferveur mais c'était pour lui d'une telle évidence qu'il n'imagina même pas que Corvus ait à redouter que cela crée un quelconque malaise. S'ils étaient respectivement d'or et d'argent, ce n'était toutefois pas ce qui les avait fait emprunter des chemins différents ; même parmi les siens Arsiesys restait une énigme et un cas à part, mais cela son subalterne ne pouvait s'en douter. À l'entendre proférer ces paroles, le Pope se contenta d'afficher un discret sourire l'espace d'une seconde avant de reprendre.

- À Rome, dis-tu... Ainsi donc, au sein même des terres des Oracles, les nôtres s'éveillent. C'est inattendu, mais cela pourrait jouer en notre faveur et plus tôt qu'on ne le croit. Tu l'auras compris, cette terre n'est pas placée sous ma juridiction et que tu en viennes malgré tout est une chance inespérée. Peut-être nous aideras-tu à raviver la flamme de l'union qui nous lie aux hérauts d'Apollon.

Lui qui se battait sans jamais toucher terre ne connaissait pas la peur du vide. Mais cela avait dû être une expérience terrifiante et il ne comprenait que trop bien à quel point cette épreuve avait pu l'acculer. Pourtant, il s'était élevé pour devenir un chevalier d'Athéna. Il avait affronté sa peur et cette chute vertigineuse n'avait en définitive été que son rite de passage, celui qui consacrait la fin de son initiation. Un réel succès, car s'il fallait lui reconnaître une vertu, c'était son panache. Les corbeaux eux-même semblaient être de l'avis de l'armure et se satisfaire de sa réussite. Car même s'ils semblaient s'être pris d'affection pour le maître des lieux, ils n'en restaient pas moins d'une fidélité sans bornes à celui qui avait gagné le droit légitime de leur commander. À l'entendre, son parcours n'avait pas été de tout repos et le Gold Saint pouvait parfaitement le comprendre. Même en ces temps reculés, la différence était synonyme de rejet car beaucoup n'y voyaient qu'une erreur de la nature. Mais Arsiesys était de ces hommes qui ont appris à voir au-delà de cela, bien au-delà. Et il avait bon espoir qu'il en soit de même pour tous ceux qui s'étaient ralliés à sa cause, celle de la déesse Athéna. Sa main se posa sur l'épaule de son interlocuteur en signe d'approbation, et il fut à son tour enveloppé de ce halo précieux qui l'avait tant captivé un instant auparavant. Tout enfant de la nuit qu'il soit, il était entré dans la lumière et n'était pas près d'en sortir, le Sagittaire s'y engageait.

- Tu es ici chez toi. Garde cela à l'esprit. Nous sommes tous nés de cette même terre, et nous nous battons tous sous la même bannière. Je ne peux te certifier que pas un ne ferait de commentaires si tu venais à le leur dire, mais je peux en revanche te faire la promesse de prendre les mesures nécessaires à ce que cela ne se reproduise pas si cela devait arriver. Tous autant que nous sommes, nous avons mérité d'être ici et chacun y a sa place dans notre fratrie. Quoi qu'ils puissent en dire, ils ne valent pas mieux que toi car nous sommes tous égaux. Ainsi, sois en paix et vole vers l'infini, Corbeau. Va ! La victoire t'appartient.

[HJ : Bon voilà c'est super court, mais j'avais pas d'idée pour conclure.]