* * *

Un homme tapotait sur le marbre blanc du rebord de la fenêtre de sa chambre. Le regard perdu vers l’horizon silencieux et faiblement éclairé par les lumières d’Athènes, cet homme pensait à ce qu’il avait apprit depuis quelques jours déjà qu’il vivait au sein du Sanctuaire sacré. La Déesse l’avait reconnu digne de porter l’Armure du froid, celle au visage de femme : l’Armure du Verseau. Une constellation liée à la légende du beau Ganymède, si pur qu’il aurait pu être une femme. Une armure forte à propos pour un être tel que lui. S’il avait quelque peu craint d’être découvert, il était à présent certain que le secret qu’il couvait était encore un secret. Et cela était tant mieux, car il ne souhaitait pas devenir un sujet de conversation ici ! Déjà que son entrée en scène avait été assez directe, avec ce petit entrainement contre le Bronze Saint du Dragon… Shaokan n’avait sans doute pas apprécié la façon dont ce nouveau Chevalier d’Or l’avait traité mais ce n’était pas contre lui. Comme il l’avait annoncé, il voulait juste s’entrainer à se battre en portant l’Armure d’Or. Objectif remplit. Et maintenant … ?

Il n’avait pas rencontré tous les Chevaliers de l’Ordre, et n’avait pas non-plus rencontré le Grand Pope. Tous ou presque étaient des inconnus pour lui… Perdu dans ses pensées, nostalgique d’un temps où il n’avait pas besoin de se présenter pour être reconnu, il ferma les yeux et commença à s’endormir, prit dans un rêve dont il ne voulait pas sortir, où Carthage n’était pas à feu et à sang… Jusqu’à ce qu’une impression familière ne vienne le tirer de sa torpeur. Balayant le cauchemar naissant de l’instant où il avait été brutalisé, une aura à la couleur vive transperça le rideau des ténèbres pour s’imposer à son esprit, chaleureuse mais perturbée. Entrouvrant son œil pourpre, l’homme à la chevelure bleutée vit plus bas dans le Sanctuaire une vague cosmique partir de l’une des maisons, puis s’élever dans les cieux. Une Armure venait d’être appelée ? Mais, qui quittait-elle ? Et pourquoi lui était-elle si familière ?

Se redressant sur ses mains, il faillit directement sauter par la fenêtre pour aller voir ça de plus près mais se retint : il y avait des personnes plus proches et plus compétentes que lui pour voir ce qui se tramait. Chacun chez soi, et les Saints seront bien gardés ! Baillant, le Chevalier du Verseau ferma le rideau de sa chambre nouvellement aménagée par ses soins et remit une buche au feu avant de se glisser entre les draps de son lit douillet. Il y avait là tout le confort qu’aimait avoir le marchand autour de lui. Avec une petite pointe de luxe fantaisiste en l’Armure d’Or dans sa Cloth Box, reposant sur un piédestal à deux mètres de son lit.

Ce n’est que le lendemain matin, sortant d’un rêve qui n’en était pas un, qu’Hannon se souvint dans un sursaut à qui appartenait cette aura colorée qu’il avait vu s’élever !

« Dormin d’Andromède ! »

Mais dans ce cas, pourquoi l’Armure s’en était-elle allée ? Voilà qui l’inquiétait quelque peu, à travers la joie de penser retrouver une tête connue en ce lieu où tous étaient des inconnus. Prenant quelques minutes pour se vêtir et soigner son apparence de manière à ne pas apparaître tout ébouriffé, il appela à lui l’Armure d’Or qui vint s’installer sur chacun de ses membres et plaça son casque sur sa tête avant de sortir, sa cape blanche claquant au vent.

Il descendit jusqu’à l’endroit d’où il avait vu partir l’Armure d’Andromède la veille, et fût surpris de s’arrêter face à la maison du Lion. Qu’est-ce que cela pouvait bien signifier ? Surtout qu’il sentait deux auras à l’intérieure… Pénétrant dans la demeure, il repéra bien vite les deux Chevaliers d’Or qui s’y trouvaient déjà : Sokaris de la Balance, agenouillé à terre et tenant dans ses bras un visage vaguement familier… Il s’approcha à pas de loup, bien qu’ayant été annoncé par sa propre aura, et mettant un genou à terre à gauche de la personne inconsciente, l’appela à voix basse.

« Dormin ? »

* * *

* * *

Après quelques secondes de flottement, l’inconscient rouvrit les yeux et s’étouffa au passage, les fonctions vitales de son corps trop brusquement rappelées à l’ordre par cet éveil forcé. Hannon poussa un petit soupire de soulagement : il aurait été dommage de voir un être si doux périr à cause de la puissance de l’Armure d’Or qui l’avait choisie ! Un comble pour un Chevalier Saint en somme. Fort heureusement leur monde n’était pas aussi pathétique - pas tout à fait - et c’est donc avec difficulté mais bien vivant que le jeune homme à la chevelure de feu se redressa, aidé par Sokaris de la Balance qui semblait encore plus soulagé qu’Hannon de voir Dormin revenir à lui. Non, en fait ce n’était pas du soulagement qu’il croisa dans son regard, mais de la fierté. Mais en fait le seul qui ne semblait pas comprendre ce qui se passait, c’était bien le malheureux encore à terre lui-même ! Le choc de « l’esprit » - appelons-le ainsi - de l’Armure du Lion avec son cosmos avait été très violent. Peut-être trop en fait.

L’essentiel était qu’il y ait survécu ! Pour renaître en nouveau Gold Saint du Lion ! Un véritable honneur et un bienfait sans l’ombre d’un doute pour le Sanctuaire en ces temps troublés. Malgré le bonheur de cette découverte, une ombre vint entacher ce si beau tableau : « Qui est à tes côtés ? » venait-il de demander à Sokaris de la Balance. Comment ? Tu ne me reconnais pas mon jeune ami ? Sans moi tu aurais eu grand mal à poursuivre ta route ! Son esprit s’emballant immédiatement, le Chevalier du Verseau garda le silence et laissa le soin à celui à qui le nouveau Chevalier d’Or s’adressait de répondre à la question qui lui était adressée. Aussi Sokaris le présenta-t-il comme le nouveau Chevalier du Verseau, Hannon. Il ne pouvait guère en dire plus car le marchand n’avait pas ajouté grand-chose de lui-même lors de leur rencontre quelques jours auparavant. Rencontre au bout de laquelle Hannon avait bien été reconnu par l’Armure d’Or et choisi par Ganymède pour être le onzième protecteur d’Athéna.

Une réelle fierté dans la voix cette fois, la Balance apprit à Dormin ce qui venait de lui arriver : il était le nouveau Chevalier d’Or du Lion ! Lui, un simple Chevalier de Bronze venait d’être élevé par la volonté d’Athéna et de l’Armure sacrée au rang d’Or de leur ordre le plus puissant et le plus droit qui soit - enfin, ça dépendait qui -. Fermant légèrement les yeux, Hannon eut un petit sourire et se releva pour laisser de l’air au jeune homme qui avait bien changé depuis leur rencontre, six ans auparavant. Il ne devait pas s’en souvenir, Chevalier d’Athéna qu’il était déjà alors, plongé dans des batailles qui l’avaient meurtri dans son cœur et dans sa chaire… Mais Hannon lui, se souvenait fort bien de leur rencontre. Reculant d’un pas, il sentit peu à peu la tension de la vexation diminuer en intensité. Jusqu’à ce qu’il soit en mesure de prendre lui aussi la parole.

« Il était de la volonté d’Athéna que ton courage et ta loyauté envers son idéal soient un jour récompensés, Chevalier du Lion. Aujourd’hui en tout cas, je n’aurais guère besoin de t’offrir une paillasse à l’écurie : tu as à présent tout droit de résider dans le Temple de ta nouvelle constellation protectrice ! » Il écarta les bras comme pour l’inviter à prendre la mesure de tout ce que lui offrait à présent son statue, avant de croiser à nouveau ses yeux verts de ses yeux verrons d’or et de sang. « Te souviens-tu de moi à présent ? Si tu as mal quelque part, je peux peut-être calmer ta douleur grâce à mon aura glacée… » Proposa-t-il avec douceur, radouci en fait par son propre discours.

Tout ceci ne pouvait être un hasard : son arrivée au Sanctuaire coïncidait avec l’exceptionnelle ascension d’un simple Chevalier de Bronze au rang de Chevalier d’Or qu’il avait lui-même aidé - et même sauvé pensa-t-il avec une certaine présomption - par le passé ! Rien n’était finalement le fruit du hasard en ce monde, n’est-ce pas très chère Déesse ?

* * *

* * *

Hannon haussa un sourcil. Lui qui n’avait pas vu Andromède depuis six ans pensait qu’il avait simplement grandi depuis leur rencontre, mais d’après son propre discours et celui de la Balance, cette soudaine poussée de croissance était apparu… d’un seul coup ?! Quel mystère était-ce là encore ? Il aurait bien aimé en savoir plus à ce sujet mais il se retint d’harceler le jeune homme aux cheveux de feu avec ses questions. Il devait être dans un état de grande fatigue après une telle épreuve, comme lui lorsqu’il avait reçu l’Armure d’Or du Verseau qu’il portait sur lui en cet instant. Mais malgré le fait qu’il ait mal, Dormin du Lion semblait heureux. Et oui, c’était un immense honneur pour lui d’être ainsi récompensé par Athéna pour sa loyauté et son courage ! Il y avait de quoi être heureux, même si cela signifiait également qu’une responsabilité plus grande encore reposerait sur ses épaules dorénavant.

« Le plaisir est partagé mon ami, te retrouver ici dans une telle situation me réconforte et me fait me sentir moins seul face à l’inconnue que sont le Sanctuaire et ses occupants pour moi. »

Le bel homme à la chevelure bleuté vint s’agenouiller aux côtés de Dormin et d’une main réconfortante laissa un froid léger mais salvateur parcourir son corps pour calmer ses douleurs. Sokaris à leurs côtés semblait amusé par la situation et par quelques plaisanteries - peut être un peu douteuses – tenta de détendre l’atmosphère mais surtout d’évacuer pour lui-même la tension qu’il avait dû ressentir à voir ainsi le beau Dormin allongé sur le marbre blanc du Temple du Lion. Il évoqua Narcisse du Capricorne : Dormin le connaissait-il également ? Visiblement malgré son jeune âge, ce Narcisse avait eu du succès dans le Sanctuaire ! Ce qui encore une fois était assez éloigné de la description que Zénon lui avait fait de son élève lorsqu’il l’avait laissé partir pour le Sanctuaire sacré. C’est donc le Verseau qui prit le premier la parole en gardant le contact avec l’épaule de Dormin, continuant de calmer ses douleurs.

« Il n’y a rien de bien grandiose à notre rencontre, je ne vois donc aucun problème à te la raconter Sokaris. Ahem… » Fit-il en s’éclaircissant la voix. « C’était il y a six ans maintenant, au port de Massilia en Gaule. J’effectuais alors un voyage pour un ami en ma qualité de marchand. Cela me permettait de rompre un peu avec l’entrainement mais aussi de continuer de nous offrir un certain confort de vie à Alexandrie. C’est là-bas que j’ai « rencontré » ce jeune homme à qui l’on refusait le gîte dans une auberge pourtant miteuse et bas de gamme. Touché par l’aura qui émanait de lui, je me suis permis de lui offrir une paillasse dans ma propre auberge et nous avons pu discuter… À ce propos, excuses-moi Dormin de ne pas t’avoir révélé que j’en savais plus qu’il n’y paraissait sur toi et sur Athéna lorsque nous nous sommes rencontrés. N’étant alors encore qu’un novice, même expérimenté, j’ai trouvé préférable d’écouter le récit d’un vétéran plutôt que de parler de mes piètres expériences. » Acheva-t-il en riant. « Puis il a reprit sa route et moi la mienne, pour finalement nous retrouver ici tous deux, frères dans la lutte contre le Mal. C'est un honneur. »

* * *

* * *

Hannon regarda s’éloigner Sokaris de la Balance, tout comme il l’avait vu s’éloigner lors de leur première rencontre : assez brusquement donc. Mais il s’agissait d’un homme plein de bonne volonté et de ce fait très prit dans ce Sanctuaire où tout était à faire tant la désorganisation y était grande. Aussi n’ajouta-t-il rien, si ce n’est qu’il ne connaissait pas lui-même cet « Oréstis » qu’avait évoqué Sokaris mais qu’apparemment il devait s’agir d’un autre élève de Narcisse du Capricorne. Mais son frère d’Ordre n’avait pas fait référence à Dormin en parlant de former trois Gold Saint ? Ce qui voulait dire que le nouveau Lion aussi…

« Tu n’as rien à te faire pardonné Dormin, comme tu le dis tu n’avais pas le droit d’intervenir dans mon apprentissage et le fait que nous nous soyons rencontré alors devait déjà être une source de dérangement pour mon maître. »

Il retira sa main de son épaule, cessant ainsi de diffuser le froid dans le corps d’un Chevalier au sang maintenant « chaud » de par la nature de sa constellation protectrice. Il était assez remit pour rester assis par lui-même et Hannon savait devoir lui laisser un temps de repos seul. Cependant, et contrairement à leur ami de la Balance, lui-même n’avait aucune obligation l’appelant chez lui. Si ce n’était de méditer et de s’entrainer mais pour la méditation, l’humeur n’y était pas, et pour l’entrainement, l’envie de suer n’y était pas non-plus. Il préférait cent fois mieux fêter ces retrouvailles avec ce visage du passé en restant à ses côtés pour continuer à discuter de choses et d’autres. Comme par exemple…

« Ainsi donc, tu as été toi aussi un élève du défunt Narcisse du Capricorne ? Tout comme Sokaris et cet Oréstis dont il a parlé ? On ne m’aura vraiment dit que du bien de lui depuis mon arrivée. C’est dommage que je ne l’aie pas rencontré, échanger avec lui aurait été amusant. » Dit-il en se relevant pour étirer ses membres endoloris.

« Après tout son maître a été le mien. » Hannon laissa ses bras retomber et fixa Dormin, ne sachant trop s’il pouvait lui demander une chose, mais il se lança, jugeant que le nouveau Chevalier d’Or avait encaissé le plus dur de son deuil… « Sokaris m’a cependant dit qu’il était mort, mais pas dans quelles circonstances. Était-ce pendant l’attaque qu’à subis le Sanctuaire avant mon arrivée il y a deux semaines ? »

* * *

* * *

« Ce serait avec plaisir mon ami. » Répondit-il simplement en inclinant la tête, souriant, vers le Chevalier d’Or du Lion.

Avec d’autres personnes il aurait été plus froid et distant. Avec d’autres encore, il aurait été plus chaleureux et intime. Disons que Dormin - du lion à présent - se situait à mi-chemin du sommet d’intérêt qu’Hannon avait établi dans la vie de tous les jours. Et de ce fait, ce garçon méritait bien un sourire, surtout après la difficile expérience qu’il venait de vivre et dont lui-même avait fait l’expérience quelques jours auparavant, non sans être un peu moins physiquement épuisé que ne l’était le Chevalier aux cheveux de feu. Peut-être parce que l’Armure du Lion était ainsi faite qu’elle savait déjà quoi trouver dans le cœur de son porteur, n’ayant plus qu’à tester son corps et sa détermination face à elle. Alors que Ganymède lui, avait du s’assurer de ce qui se trouvait dans son âme avant toute chose. Les Armures sacrées étaient décidément d’incroyables créations.

Ils s’installèrent dans ce qui était l’ancienne chambre du Temple, à l’heure actuelle vide de tout si ce n’était de quelques meubles… basiques ? Non vous vous trompez : il y avait là matière à s’émerveiller !

« De l’acajou sculpté à la main… J’ignore qui était le précédent habitant des lieux mais il avait des moyens à sa disposition pour faire venir un tel mobilier. » Déclara-t-il, aussi connaisseur qu’admiratif en matière de confort.

Mais bien évidement, placards et tiroirs étaient vides, ce qui ne les empêcha pas de s’installer à la table de la petite cuisine. Dormin n’avait pas grand-chose dans sa besace mais Hannon ne fit que picorer, laissant plutôt son ami à l’appétit de lion déjeuner à sa faim, qui de toute façon ne fut même pas rassasiée une fois sa bectance engloutie ! Reprenant la discussion où il l’avait laissé, Hannon commenta les dires de l’ancien Andromède.

« La passion des justes est la seule qui devait être admise au sein du Sanctuaire. Depuis que je suis arrivé ici j’y ai vu de nombreuses choses qui ont heurté la vision que j’avais pu avoir de ce lieu tel que me le décrivait Zénon. Mais il s’agissait d’un autre temps, et d’autres méthodes. J’ignore comment est l’actuel Grand Pope – ni pourquoi il est allé se promener aux Enfers plutôt que d’être là pour protéger le Sanctuaire – mais il devait avoir une bonne raison pour qu’il aille là-bas et n’en revienne que seul. Une bonne raison… » Du moins essayait-il de s’en convaincre.

« Racontes-moi donc ce qui t’es arrivé depuis que nous nous sommes rencontrés il y a six ans à Massilia, as-tu atteint tes objectifs ? »

* * *

* * *

Oui, qui sait ? Répondit-il mentalement à Dormin lorsqu’il évoqua la possibilité de voir ressurgir des méandres du passé cet homme à la nature si mystérieuse qui semblait traverser le temps sans que celui-ci n’ait prise sur lui. Si rencontre il devait y avoir avec Zénon, ce serait sans doute uniquement de sa volonté, et en dehors du Sanctuaire sacré. Quoique, il eut été amusant d’imaginer la brusque apparition du vieux maître en bas des marches du Sanctuaire, sage mais moqueur, réprimandant gardes et chevaliers pour leurs errements… Très amusant même, quand on connaissait un peu le personnage. Il y eut un silence, que son interlocuteur tenta de couvrir mais le marchand entendit très distinctement son estomac continuer de gargouiller. L’appétit du Lion était difficile à combler ! Malheureusement ce lieu était vide…

« Alors ce que tu prônes, c’est la politique du « laisser-faire » ? » Commenta-t-il en réponse à sa déclaration vis-à-vis du Grand Pope. « Je ne crois pas que laisser ceux ayant du pouvoir mal en user soit la chose la plus juste à faire. Car c’est bien pour cela que nous nous battons Chevalier du Lion ? Pour la justice, la paix, et le respect de tous à travers le monde ? Si tout ceci est une embûche sur notre route, pouvons-nous rester en arrière et attendre de sauver ce qui peut l’être ? … Mais je t’en prie, continue et raconte moi ton histoire. »

Dit-il en l’invitant à poursuivre sur la seconde question que lui avait posée le Chevalier du Verseau le concernant plus personnellement. Après avoir poussé un peu plus loin l’examen de sa demeure, Dormin revint vers lui et commença à raconter ce qui intéressait Hannon, qui l’écouta avec attention…

« Tout ceci a dû être très difficile mon ami. » Il se leva et détourna le regard pour se diriger vers une fenêtre du Temple donnant sur le reste du Sanctuaire et surtout sur de la caillasse.

« Mais tu es encore en vie, et avec la vie, comme le veut Athéna, reste l’espoir de pouvoir continuer le combat demain encore… Il est amusant de te voir ici occuper une place dont je me targue d’être souvent l’un des plus précieux dépositaires. Toutes les connaissances que tu as du Sanctuaire et de ses occupants sont les informations qui me font le plus défaut depuis mon arrivée et j’y vois un peu plus clair. Vois-tu, j’ai moi-même rencontré Sokaris avant aujourd’hui. C’est d’ailleurs lui qui m’a accompagné jusqu’à ma demeure, où j’ai été confronté à… mon armure, dira-t-on. Une fois remit j’ai prié au Temple d’Athéna qu’elle m’envoie un signe… Et voilà qu’avant de trouver le sommeil, une armure s’envole de la maison du Lion et file dans la nuit vers une destination inconnue ! Quelle surprise alors, de descendre en ces lieux et de te découvrir allongé à terre dans la flamboyante Armure du Lion ! J’irais presque jusqu’à dire que mes prières ont été entendus. » Acheva-t-il avant de se retourner vers Dormin en souriant.

« Et voici à présent que tes paroles m’éclairent, plus que celles de Sokaris encore. La Balance n’est guère un homme de réflexion à l’heure actuelle, mais il a l’air d’être un vaillant guerrier, très prit ! » Fit-il en riant un peu du départ qu’avait eu le dit Sokaris quelques minutes plus tôt. « Toutes ces attaques répétés sur le Sanctuaire sont inquiétantes… Et la promptitude de nos adversaires à attaquer durant les absences du Grand Pope laissent penser à la présence d’un espion en son sein. Ou bien serait-ce réellement des « coïncidences » ? … Mais d’ailleurs, tu ne sais donc pas, toi non-plus, ce qui a tué Narcisse ? Cette histoire non-plus n’est pas claire… Beaucoup de choses sont anormales ici. Trop d’ailleurs. Au moins pouvons-nous compter sur toi, et sur des personnages de confiance pour défendre le Sanctuaire et l’idéal qu’il représente. Un idéal que nos ennemis aimeraient bien détruire à jamais on dirait. »

Hannon revint s’assoir face au jeune homme à la chevelure de feu. Lui aussi silencieux pour quelques secondes. Ses soupires en disaient long sur son état d’esprit mais que pouvait-il y faire après-tout ? Pas laisser-faire non, mais dans l’état actuel des choses, ce qui importait c’était sans doute… de satisfaire l’appétit de Dormin !

« Si tu le souhaites je peux t’inviter à déjeuner en ville, autant que tu le voudras et où tu le voudras. Cela te permettra de te requinquer, et puis nous pourrons parler de tout, et de rien… Je ne suis pas souvent venu à Athènes vois-tu… » Et blablabla, le Verseau souhaitait changer de conversation pour l’heure, qu’ainsi Dormin repose aussi son esprit autant que son corps. Il l’avait déjà assez accablé de questions…

* * *