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Théodora

La mort dans l’âme, Théodora quitte le temple de Poséidon. Ce qui la peine est toujours inscrit en elle, la mort de son maître est un évènement difficile et même ce qui vient de se passer, un moment pourtant intense, mêlé de confession et de fierté, a du mal à éclipser la douleur qu’éprouve la jeune femme. Théodora finit de sortir de l’endroit où se trouve le légat, après s’être agenouillée devant la voix de Poséidon. Celle qui venait d’être nommée comme protectrice de l’océan Pacifique Nord portait avec elle la scale de l’hippocampe. Ce n’était pas un hasard si peu de temps après s’être interposée pour sauver la vie de la bretonne, la scale lui revenait. Théodora avait été choisie. Sa nomination en tant que Générale ne pouvait être contestée car, au fond, cela revenait à contester le choix suprême de notre Dieu : Poséidon.

Pourtant, en sortant du temple, Théodora n’était pas vêtue de sa transcendante écaille, cette-dernière voletant à ses côtés. Au-delà des émotions, la scale était également marquée de la confrontation entre le Général de Poséidon et l’Oracle d’Apollon. Il fallait une nouvelle jeunesse à cette scale et c’était le forgeron Ajay qui devrait s’en charger, c’était ainsi qu’il avait décidé de servir. Soit. Pourtant, la femme aux cheveux violacés fut rapidement arrêtée : Sephios se dressait devant la fraichement nommée. Ainsi il avait eu vent de l’arrivée d’une nouvelle Générale dans les armées de Poséidon. Cela lui faisait plaisir car tous les généraux ne s’étaient pas encore réveillés et voir l’un de ses confrères arriver pour lui souhaiter la bienvenue lui réchauffait le cœur. Enfin, c’est ce qu’elle déduisait de la présence de ce Général.

- Enchantée, je me nomme Théodora. Je suis présentement la Gardienne de l’océan Pacifique Nord et, par la même, Générale de l’hippocampe. Ravie de vous rencontrer, Général du dragon des mers.

Ces paroles étaient douces, prononcées de façon assez chantantes. Évidemment, la parole fut accompagné du geste et elle s’inclina doucement et de façon courtoise devant son homologue. En réalité, Théodora ne s’attendait pas à la réciproque, pensant qu’elle devrait encore faire ses preuves. Car tout ce qu’elle avait fait au nom de Poséidon était de venger l’un de ses élus. Cela avait le mérite d’exister mais si elle voulait s’élever comme une Générale de renom, elle se devrait d’accomplir davantage pour son Dieu.

Doucement, la Générale dévisagea Dragon des mers, ne connaissant toujours pas son nom. Il avait de longs cheveux blancs, assez semblables aux siens. Son visage était assez dur pourtant il n’était pas déplaisant. Un autre trait commun qu’elle pouvait directement observé était toute la détermination que Théodora pouvait lire en ses yeux. Il était déterminé à faire valoir son Dieu, tout comme la jeune femme. N’étant pas une experte en physionomie, elle n’aurait su donner un âge mais elle le mettrait dans la catégorie jeune adulte, alors qu’elle paraissait encore adolescente à cette époque.

Pensée hasardeuse. Cette Gardienne se posait déjà mille questions : comment la voyait-il ? Quels étaient déjà les aprioris qui se dessinaient en lui ? De l’autre coté de la balance, Théodora se demandait comment le commun percevait ce Général ? Faisait-il peur ? C’est vrai qu’il semblait froid et direct mais Théodora n’avait pas cette impression de mal aise. Était-ce simplement parce qu’elle savait que cet être servait la même cause ? C’était possible mais tout, ou presque, serait confirmé dès qu’elle entendrait le son de sa voix, et surtout ce que le message dirait.

Spoiler:

Théodora fut réellement émue de voir Séphios se présenter et lui rendre hommage. Ainsi, au-delà de l'aspect pathétique qu'elle représentait, il l'avait accepté ? Orphéus aussi semblait l'avoir bénie. C'était une bonne nouvelle, plus qu'Ajay et ces homologues l'auront tous acceptée. Pour Théodora, qui carburait à la détermination, il était important de se sentir approuver par ses frères d'armes. Et c'était le cas, elle pourrait plus facilement servir Poséidon à présent.

Mais, visiblement, il était aisé de lire en elle car Séphios avait compris sa détresse et lui demandait l'origine de cet état. Il devait être troublant en effet de voir une jeune femme aussi peu encline à la joie en un jour aussi ... Unique !

- Navrée de vous inquiétez, Général Séphios. Je sais que ce jour est glorieux mais il est toujours délicat de vêtir la scale de son maître ...

Oui, une scale ne quittait quelqu'un uniquement si ce dernier était mort ou un parjure. Mais Xelar avait eu l'honneur de mourir au combat pour défendre ses croyances. Malgré la fierté qu'elle retirait de pareil maître, la douleur n'en était pas pour autant estompée. Mais son deuil devait être transparent et digne, ce n'était pas acceptable que d'autres s'en rendent compte.

Doucement, la Générale sourit à Dragon des mers et écarta une mèche inquisitrice. Séphios ne devait pas prendre Théodora en pitié car cette femme devait être forte maintenant investie de l'un des rôles sacrés de Poséidon. Pour cela, elle défendrait ardemment son pilier.

- Mais n'ayez crainte, je vais bien. Je suis sincèrement heureuse, vous avez su réchauffer mon cœur par votre seule présence. Je suis maintenant sûre que ma volonté ne faiblira pas : j'affrontrai les épreuves pour me montrer digne. Général Séphios, je dois rendre visite au forgeron Ajay, accepteriez vous de m'accompagner jusque là, que nous puissions discuter sur le chemin ?

La jeune femme commença à se déplacer vers Séphios, son armure la suivait fidèlement, bien sûr, elle s'arrêtera s'il décidait de refuser ce bout de chemin, propice à la discussion, mais par ce mouvement, elle contait l'inciter à la suivre.

Séphios venait de confirmer les dires du légat : Ajay était donc bien un Général. L'attitude pour le mentionner, par contre, était bien différente. Cela semblait sensé : Xelar avait été défait et pour certain, il ne valait donc rien mais aux yeux de Théodora, il resterait son maître, puissant et grand. Peut-être était-ce la même chose ici ? La bretonne se ferait une idée par elle même, c'était encore de loin la meilleure solution.

Perpétrer avec soin la mémoire de mon maître, disait-il ? C'était bien l'intention de Théodora mais peut-être allait-il trop vite pour dire qu'elle le faisait déjà, ce fait ne sera vrai que d'ici quelques mois. Mais la nouvelle Générale n'allait pas lui jeter la pierre : il tentait de se montrer compatissant.

- Mon maître m'a élevé au rang d'apprentie et sa mort m'a elevé à celui de Générale. Alors oui, j'ai fait vœux de poursuivre ses rêves mais il est encore trop tôt pour dire si oui ou non, il est fier de moi. Quoiqu'il en soit, mon souhait immédiat est qu'il repose en paix dans l'immensité bleutée.

Lentement, elle avançait vers le domaine où résidait présentement le forgeron Ajay, la chance de Séphios fut d'endosser une armure autre que celle de son maître. Mais peut-être connaissait-il l'ancien Dragon des Mers ? Ce n'était pas impossible, après tout, les Généraux n'étaient qu'au nombre de sept et peu d'entre eux étaient éveillés. Les rencontrer était donc chose aisé, il se pouvait également que le Dragon des mers se soient réveillé directement avec Séphios.

- Dites-moi ? Comment avez-vous eu votre écaille ? Connaissiez-vous son ancien détenteur ou s'est-elle éveillée pour vous ? Disons que cela m'intrigue, je n'ai que mon expérience personnelle et je ne sais pas comment les autres ont été choisi. Ont-ils tous reçu une Gold Sclale comme première écaille ou alors suis-je isolée ? Voyez-vous, mille et une questions circulent encore dans ma tête.

Dit-elle en souriant à nouveau : la femme de vingt-deux ans retrouvait enfin sa curiosité d'antan, celle-là même qui avait su poser ribambelle de questions et attirer bon nombre d'ennuis à son maître. Et oui, Théodora aimait à l'époque fouiner pour découvrir des choses, en apprendre d'autres. Elle avait aussi appris à rester stoïque suite aux grondements de Xelar. Tout un temps d'innocence qui n'avait plus lieu d'être : une Générale se devait d'être mûre et cette triste réalité avait su la modeler ainsi.

Effectivement, l'air se réchauffait : son objectif premier approchait. Non pas à grand pas mais bien à petits pas, en effet, sachant que la discussion allait se terminer une fois arriver devant le domaine dudit forgeron et visiblement la conversation nécessitait encore un peu de temps.

Ainsi les morts étaient-ils bercés de paix éternelle ? Probablement que non dans la majorité des cas mais il avait sans doute raison sur le compte de Xelar. Sans doute serait-il en paix aux côtés du Seigneur des Mers.

- Je ne partage pas votre avis sur la paix éternelle. Peut-être sommes nous appelés aux côtés de Llyr mais la plupart le seront dans le monde de Taranis. Enfin, n'y pensons plus. Mon maître est bien là où il est, c'est tout ce dont je souhaite.

Il lui raconta alors la façon dont il avait obtenu son écaille. Aux yeux de Théodora, il avait de la chance : son écaille ne soufrait pas. C'était vrai que l'écaille conservait une partie de ses anciens détenteurs et lorsqu'ils sont arracher aussi brusquement, les fêlures sur l'écaille ne sont pas les seuls dégâts.

- Je vois, cela doit être agréable d'avoir obtenu les plus hautes attentions de Llyr tout en continuant de marcher aux côtés de son maître. Malgré cette connaissance, je vous demanderai de ne pas me suivre jusqu'à Ajay : ce que j'ai à faire à ces côtés me parait intimes. Cela me désole déjà assez de ne pouvoir réparer mon armure de moi-même.

Oui, elle ne voulait pas que Séphios voie son maître marteler la Gold Scale de l'hippocampe. Cela ne le regardait pas et vu l'importance de la demande, elle ne voulait pas que la présence de Séphios soit interpréter comme un atout par Ajay. Après tout, il n'avait pas encore accepter de rendre l'éclat d'antan à l'hippocampe et seule Théodora serait actrice dans ces négociations : son écaille était une partie d'elle-même, s'incliner pour sa réparation était son fardeau.

Alors que les deux Généraux allaient se quitter, Séphios demanda légitimement la politesse à Théodora : pourquoi l'hippocampe l'avait choisie, elle ? Son visage s'assombrit quelque peu. Non pas qu'elle ne veuille répondre mais l'acquisition de son écaille est liée à la mort de son maître.

- Je ne compte pas rentrer dans les détails, pardonnez moi. Mais, j'ai tué la personne ayant donné la mort à mon maître. Sans l'intervention de l'hippocampe, je n'aurai su y parvenir. J'imagine que nos désirs de vengeance respectifs ont su se rencontrer au bon moment mais ni mon écaille ni moi ne sommes avides de combats, j'imagine que cela aussi l'hippocampe l'a compris en me protégeant. Et voilà où nous en sommes ! Bien, je suis sûre que nous aurons à nouveau l'occasion de nous rencontrer mais cette fois là, je vous montrerai ô combien l'hippocampe est majestueux. Au revoir.

C'est ainsi que la bretonne laissa Séphios derrière elle afin de rejoindre la demeure du forgeron Ajay, lui-même Général.