Cette serviable petite Okra... Un bon petit soldat que la porteuse de Pestilence ! S'inclinant profondément jusqu'à mettre genou en terre, elle ne s'était pas faite priée que pour se lancer à l'attaque comme son mentor le lui avait demandé. Elle avait bien évolué depuis qu'il avait été la dénicher... Le souvenir de cette enfant, seule face au monde, face à la puissance de son pouvoir qu'elle ne comprenait pas. Et la vision à présent de cette guerrière qui ne se départissait plus de son armure, prête à tendre son épée exotique et à en croiser le fer sur simple demande. Son pouvoir avait également évolué. Loin à présent le temps de ces émanations purement passives et non maîtrisées, le petit bout de femme pouvait depuis en manier plus ou moins à sa guise le dosage tout comme elle avait petit à petit mieux appréhendé son cosmos.

Ce qu'elle démontra d'ailleurs dès qu'elle avait relevé le gant lancé par Ephtal, crachant de son cosmos verdâtre qui part alors se déverser et emplir l'air ambiant. Heureusement, le Cardinal de la Mort s'est déjà entouré de sa protection de cosmos, possédant une véritable particularité de détraqueur, affaiblissant ainsi l'influence de ce venin. Mais son Burst of Laughter n'était plus entièrement suffisant dès lors qu'il s'agissait de contrer les émanations toxiques de sa protégée. Assez du moins que pour ne pas dépérir sur place et être capable de riposter. Et voici d'ailleurs le premier mouvement du Général du Feu, faisant tournoyer sa massive faux dans sa main, visant d'un même acte à dissiper le brouillard nocif ainsi que les premiers coups de lame qu'Okra pourrait tenter.

Ephtal n'était jamais plus à l'aise en combat qu'au corps et corps, et même si ce n'était pas une idée particulièrement brillante face à quelqu'un comme la Pestilence, il n'allait pas s'en priver... Rester à l'écart ne pourrait que signifier une peur qu'il ne pouvait pas se permettre de montrer, même si ce combat se déroulait dans l'antre de la Terreur. D'une impulsion, la vitesse de la lumière fut atteinte lors d'un déplacement au cours duquel il se servit de sa faux pour écarter la lame extensible de son adversaire. Et ce qu'il fit ensuite ne fut que pure provocation... Posant sa main sur l'embouchure dont émanait la brume nocive - veillant à renforcer sa protection sur sa paume plus particulièrement - il se permit d'entamer conversation.

Dommage que tu ne te défasses plus de ce masque... Ton visage n'était pas désagréable au regard pourtant...

Un léger amusement dans la voix de l'homme au masque de mort. Et déjà, sans avoir porté un coup, il s'écarte aussi vite qu'il était venu. Il ne pouvait faire durer ce contact plus longtemps, sa main s'engourdissant déjà malgré le cosmos qu'il y avait placé en barrage. Pour quiconque ne prendrait pas de suffisantes précautions, cette femme serait plus que redoutable... Pourtant, il se sentit de tout de même l'inciter à passer au niveau supérieur...

Allons... Tu peux faire mieux petite fille, je le sais... Ne me force pas à te gronder...

D'autant qu'il n'allait pas pouvoir l'envoyer dans sa chambre sans dîner, puisqu'ils s'y trouvaient déjà...

S'il n'avait pas eu son masque, l'on pourrait voir un grand et fier sourire sur le visage du Hun. Il ne s'était sincèrement pas attendu à la voir ôter son casque, si rapidement du moins. Ephtal n'aurait en effet pas pensé que sa simple petite remarque en guise de provocation porterait fruit dans l'immédiat, de cette manière en tout cas. Le regard lourd qu'ils se lancent tous deux n'est alors qu'un simple prémisse à la danse dans laquelle ils ne vont pas tarder à se lancer sérieusement. Ce qui est appuyé encore par la densité de son brouillard qui s'épaissit encore, alors qu'agilement elle se déplace profitant du fait que l'oeil ne puisse plus la suivre si aisément. La tension ne fait d'ailleurs pas que se percevoir, la lame de la jeune femme toujours solidement cramponnée à sa faux produit quelques tiraillements...

Il ne s'en laisse pas abattre pour autant, sachant avoir devant lui plusieurs solutions. Le Prophète pouvait très bien laisser son arme là et se jeter sur la Pestilence à mains nues. Pas vraiment adapté puisqu'il risquerait rapidement de se retrouver au dépourvu, elle disposant toujours de sa lame extensible en main. Ephtal pouvait également tenter de tirer un grand coup sur son arme, tout simplement. Essayer par là d'attirer Okra à lui, au corps à corps où il serait alors le plus fort mais soumis aux difficultés de tenir à proximité de la puissance vaporeuse de son adversaire. Alors qu'il fermait les yeux - ce qui ne faisait pour autant pas taire totalement la luminosité azurée en émanant - afin de la ressentir plus par son cosmos que par le regard, la troisième solution lui parut la plus efficace avec une certaine évidence.

C'est mieux, oui... Bien mieux !

Le plaisir qui se perçoit dans sa voix rocailleuse prouve bien que la situation ne lui parait pas tant gênante que cela. Puisqu'il en est ainsi, passons donc à la vitesse supérieure... Son énorme faux se met à vibrer, produisant à son tour une lumière puissante. L'instant d'après, elle se fractionne en de multiples pièces qui viennent alors se greffer au corps d'Ephtal en se soustrayant au passage de l'emprise de la lame d'Okra. Il apparaît alors en armure d'un blanc cassé et nacré aux formes anguleuses. De chacune de ses protections d'épaule partent deux cornes relativement longues et vaguement vrillées, et son casque est surmonté de huit appendices – quatre grands et quatre plus petits – recourbés évoquant de manière plus ou moins claire une couronne. À son poignet gauche, deux lames de faucille se trouvant à l'opposé l'une de l'autre, et donnant ensemble l'impression d'y voir un arc. De plus, certaines parties de son armure se trouvent doublées par les pièces devant à la base se greffer sur son destrier. Ainsi, son dos, ses épaules et ses genoux se retrouvent fortement renforcés, lui donnant encore une allure plus imposante.

Et finalement, plutôt que de chercher à la trouver pour la frapper, le Cardinal de la Mort possède une solution qui lui permettra de ne pas l'abîmer de ses poings... Sa main droite est levée, paume vers le haut. Et comme une sentence sa voix gronde...

Soul Possession !

Terrible capacité que celle-ci, permettant d'aspirer l'âme de sa proie où qu'elle puisse se trouver.

Si elle ne craignait pas autant les réprimandes de son modèle, Okra aurait pu se permettre de rire. Un rire de fierté, qui se dessina sur son visage juvénile aux yeux d’ombres. Car malgré la fosse spirituelle séparant maître et élève, la slave avait réussi par un vil stratagème à parvenir jusqu’à son idéal : combattre à armes égales. Jamais Ephtal ne daignait montrer sa cuirasse, ni même la porter en combat d’après les rumeurs. Malheureusement ici cela revenait à lui donner un avantage non négligeable puisqu’une arme de Cardinal entravée bride en partie ses manœuvres. Oh, il aurait bien pu y remédier autrement par la suite, mais elle aurait anticipé la chose et donné davantage de torts. C’est pourquoi Pestilence jubilait secrètement, voilée par les Huit et par son mur acide. D’autant plus qu’il lui renvoya le compliment, preuve indéniable de sa réussite.

Kryuk ne tarda pas à revenir sous sa forme initiale, tandis que sa maîtresse continuait de courir çà et là en quête de faille. Ses amandes poivrées ne discernaient rien de plus que ne le faisaient celles d’Ephtal, pourtant il lui fut aisé de percevoir le moindre mouvement adverse. Sa brume, véritable sonar mobile lui communiquait depuis peu toute information susceptible d’amorcer une riposte anticipée. Maîtrise forgée avec le temps dans la sueur, et une base surtout. Cela faisait un bon moment qu’elle portait l’armure de Pestilence, une lourde muraille de plaques noires rendant ses manœuvres plus laborieuses. Ne pas la porter risquerait de vite la mettre en péril, car au-delà du potentiel spirituel demeurait le gabarit, faible, voire médiocre. Impossible pour elle de s’imaginer en ligne de front, au contact. Sa voie se trace dans l’ombre de l’ennemi, son poing se doit de frapper a distance respectable et ses yeux, de crever loin derrière les ténèbres.

Elle ne put toutefois prévoir et surtout, contrer l’offensive. Son maître, désormais paré de lourdes plaques cornues souhaitait jouer sur son propre terrain, avec ses propres armes. Le drain, capacité naturelle lorsqu’on entreprend de parfaire ses aptitudes pestilentielles, n’est pas exclusif pour autant. Et il le lui prouva bien assez tôt. Déjà torturée par un pouvoir qui doit initialement corrompre les chaires de ses proies, elle dut également subir une ponction vitale fulgurante de la part du Prophète d’Arès. Une vague bleutée entourant désormais ses courbes, Okra n’en démordit pas pour autant. Sa crinière d’ébène flottait, mèches en bataille contre un visage impassible. Qu’importe la gravité et le nombre de ses blessures, son seul but : un baiser.

- Charmants atours, messire. M’accorderez-vous cette danse ?

Ottenok. En un souffle Okra fit face au colosse d’acier. Elle aurait pu, en sa condition de jeune femme jouer de ses charmes et s’empourprer afin de mettre un point d’honneur à son sadisme naturel. Au lieu de quoi elle se tint simplement là, droite, le temps de quelques battements. Elle fit ensuite mine de tendre la main, le regard pénétrant puis, tout en se mordillant la lèvre opta pour une fuite. Dans un tournoiement insolite et gracieux la belle mort s’évanouit, laissant un subtil nuage en guise de rémanence. Le voile se fit ombre, l’ombre silhouette, la silhouette clone jusqu’à ce que finalement, dix fléaux se mettent à danser au rythme de Kryuk. Chaque âme s’arma alors d’une lame, et chaque lame fouetta l’armure d’Ephtal comme autant de caresses. Car tout acte passionné et passionnel débute par des préliminaires.

Le lien était établi et l'âme d'Okra était peu à peu aspirée laissant dans son trajet un semblant de feu follet diaphane. Elle ne pourrait plus le semer ainsi... Où qu'elle soit, il le saurait avec exactitude. Mais même avec cela, elle n'était pas la première venue et il aurait d'abord sans doute à se défaire des offensives de la jeune femme avant de pouvoir contre-attaquer. La remarque de son élève lui arracha un sourire, comme elle se permettait d'y aller de sa petite provocation en se présentant devant lui. Penchant la tête sur le coté en l'observant comme elle s'était approchée, il la regarda lui tendre la main avant de s'évanouir dans sa brume. Alors comme ça elle voulait danser ? S'éloigner n'était pour cela pas une parfaite approche mais elle devait en avoir une parfaite conscience. Autant s'attendre au pire donc... Et il le valait mieux, afin de ne pas être pris au dépourvu pour cette attaque de clones. Une dizaine de Cardinale de la Pestilence prirent naissance autour du Prophète, formant ainsi un cercle d'acier dont les lames se levaient déjà avant de retomber à la rencontre d'Ephtal. S'accroupissant sur le champ, il leva ses poings fermés autour de sa tête, un énorme bouclier chimérique composé de flammes se créant alors au dessus de lui. Le bouclier d'Arès lui-même... Cela n'arrêta pas les lames tout de même, mais en atténua grandement la force afin que son armure puisse encaisser le reste sans qu'il n'ait à déplorer de trop importants dégâts.

Il se redressa alors d'une importante poussée sur ses jambes, le projetant dans les airs où il se concentra sur la localisation exacte de la Pestilence.

J'ai déjà connu des danses plus charnelles et passionnées... Avec tant de danseurs cela me semble plutôt être un ballet, ce qui je l'avoue n'est pas ma tasse de thé...

Il avait armé son bras en prononçant ces mots, aspirant le cosmos aux alentours ce qui eut le mérite d'atténuer de peu le brouillard verdâtre de la dame. De quoi panser un peu ses plaies avant de frapper à son tour. Faisant mine de diriger son coup vers le sol et les spectres créées par Okra, il dévia au dernier moment pour lancer son offensive sur la jeune femme elle-même, son énergie se changeant en de multiples faucilles comme elle se dirigeait vers sa cible dans un autre genre de chorégraphie.